Souffrir 20 ans pour engraisser un rhumatologue

Publié le 15 mai 2010 par Suzanneb

Christine nous parle de son conjoint, de sa douloureuse lutte, des questionnements qui s’en suivent… Vous comprendrez que nous sommes à des années lumière de ce qu’on appelait autrefois «la vocation de médecin». À noter qu’on parlait des enseignantes et des infirmières dans les mêmes termes. Ces professions représentaient la summum de la grandeur d’âme. Si l’illusion est toujours présente, trop souvent la vocation elle, n’y est plus. Je vous laisse juger de ce qui l’a remplacée…

Mon mari qui a 45 ans, souffre depuis des années d’une forme d’arthrite. Depuis plus de 20 ans, il doit prendre des anti-inflammatoires tous les jours, 365 jours par année. Quand ce n’est pas également des relaxants musculaires pour soulager les crises.

Sa hanche est particulièrement touchée. En fait, elle n’a plus du tout de cartilage et c’est os contre os que la hanche et le bassin se frictionnent au quotidien. Depuis longtemps, il doit marcher avec une canne et depuis plus de 20 ans, il ne peut pas faire de sport, ni courir, ni se pencher, ni faire des travaux trop intenses, ni marcher plus que le temps d’aller faire l’épicerie. Le reste du temps, il est confiné à une chaise ou un divan et doit endurer la douleur 24 heures sur 24 malgré les anti-inflammatoires qui le soulage à peine. Depuis les derniers mois, il doit faire la navette entre le lit et le divan du sous-sol parce qu’il ne tolère même plus de dormir toute la nuit dans le lit.

Dans les dernières années, voyant son cas se détériorer, nous avons fait des pieds et des mains pour rencontrer un rhumatologue sérieux qui prendrait le temps de faire autre chose que lui prescrire des anti-inflammatoires. Nous avions entendu parler d’un traitement, le Remicade, qui se fait par injection. Un ami nous avait parlé du cas de son père puis nous a référé à son rhumatologue. Nous voulions en savoir plus long.

Mon mari a rencontré ce rhumatologue qui lui a fait passer quelques tests, radiographies. Il lui a parlé du Remicade mais lui a dit qu’il devait d’abord passer un test pour la tuberculose avant, car s’il avait déjà été en contact avec la tuberculose, cela changeait quelque peu la donne.

Malheureusement, il a été testé positif. À partir de là, la proposition du rhumatologue était la suivante: il faut prendre des antibiotiques pendant 10 mois (quand on sait ce que cela fait au système immunitaire…) et les risques sont grands d’atteinte au foie, donc vous devrez passer des tests sanguins aux deux semaines au début et très régulièrement par la suite (c’est dire le risque énorme).

Au bout de 10 mois, vous aurez droit à l’injection mais il se peut que ce ne soit pas efficace, que ca ne fonctionne pas pour vous. Mon mari est revenu à la maison la mine déconfite sans compter l’attente interminable dans la salle d’attente avant de voir le rhumatologue alors qu’il avait un rendez-vous. Rester assis des heures sur une chaise dure, c’est l’enfer pour lui.

Nous avons discuté du sujet et tous deux en sommes venus à la conclusion que nous attendrions pour ce type de traitement et que nous y aurions recours s’il n’y avait pas d’autre espoir. La perspective de mettre sa santé, son système immunitaire, son foie, en danger (déjà qu’il n’a plus de vésicule biliaire) ne nous enchantait pas du tout.

Quand mon mari s’est donc présenté à son rendez-vous suivant pour dire au rhumatologue que pour le moment, il ne prenait pas de décision et qu’il s’attendait maintenant à ce que le rhumatologue le rencontre que lorsque nécessaire (par exemple pour le renouvellement de sa prescription de médicaments) le ton et l’attitude du rhumatologue a changé. Il ne s’intéressait nullement à l’opinion de mon mari et il avait un discours l’air de dire que si mon mari ne voulait pas passer par ce traitement, qu’il le mettrait au rancart. Du moins, c’est ce que mon mari a perçu lors de sa rencontre avec lui.

Dans tout ce débat «oui ou non» pour le Remicade et les antibiotiques, jamais le rhumatologue n’a proposé autre chose. Mon mari lui a parlé de l’opération pour changer sa hanche et le rhumatologue refusait toujours cette option, disant qu’il voulait préserver la hanche de mon mari au maximum et que de toute façon, une hanche artificielle n’a qu’une durée de vie de 15 ans, par conséquent, il voulait repousser l’éventualité d’une opération après 60 ans.

Autrement dit: Souffrez monsieur encore une autre quinzaine d’années. Bourrez-vous de pilules une autre quinzaine d’années. Vous passerez donc près de 35 ou 40 ans sur les Celebrex, ne vous en déplaise.

Note: On a déjà changé sa prescription pour des Vioxx, un autre anti-inflammatoire qui quelques années plus tard, a été retiré du marché parce qu’il tuait trop de gens de crises cardiaques! On a donc remis mon mari aux Celebrex.

Désespérant comme perspective d’avenir. D’autant plus que je ne fais pas mention ici de la qualité de vie, de notre quotidien à tous les deux avec la maladie. Comparez cela à une vie avec un homme qui doit marcher comme un enfant. Ni trop vite, ni trop loin, ni trop longtemps. Et dont chaque activité est décidée en fonction de ces capacités et de son endurance. Pas question de faire du camping, de prendre de longues marches dans la nature, de faire des activités extérieures.

Or, finalement, en décembre 2009, nous avons rencontré une autre rhumatologue. Batterie de tests et de radiographies. Le verdict est clair: mon mari doit se faire opérer, c’est urgent, et il aurait été inutile qu’il traverse l’épreuve des antibiotiques et des injections, considérés par la rhumatologue comme un remède de cheval qui n’aurait rien changé au fait que sa hanche est finie et nécessite d’être remplacée, il aurait mis son système immunitaire à terre pour rien, alors que le seul problème c’est une hanche!

Ayant fait des recherches avant notre rendez-vous, j’ai découvert sur internet que depuis plus de 7 ans, à Maisonneuve-Rosemont, une nouvelle hanche, une nouvelle technologie,a fait son apparition. Résultat: la hanche dure 30 ans au lieu de 15 et ne cesse d’améliorer sa performance. Le hocheyeur Guy Carbonneau a subi la chirurgie de ses deux hanches avec cette technologie (allez voir sur Youtube avec les mots clés) et ca a changé sa vie. Finie la douleur!

Nous avons donc parlé de cela à la rhumatologue. Elle a référé mon mari à un chirurgien qui l’a rencontré une semaine plus tard (elle a convaincu le chirurgien de l’urgence de la situation) et depuis, nous attendons avec impatience son opération (qui prendra plus de 8 mois d’attente car nous n’avons encore aucune date de fixée, tout est “booké” jusqu’à la fin juin, donc ca n’ira pas avant juillet et peut-être plus, on ne sait pas.)

Pourquoi le rhumatologue no 1 ne lui a jamais parlé de cette nouvelle technologie?

Pourquoi voulait-il laisser mon mari souffrir encore 15 ou 20 ans? N’était-il pas au courant de cette technologie qui se fait à un des hôpitaux de Montréal et qui est connue même des hôpitaux de Québec? Pourquoi l’avoir traité comme il l’a fait parce que mon mari refusait le traitement à la lumière des informations qu’on lui a fournies? (Consentement éclairé… vous connaissez ?)

Cela me porte à croire l’histoire de ce médecin qui a témoigné ici pour dire que si vous refusez un traitement, vous vous verrez mis sous pression, menacé ou rejeté par votre médecin. Nous pensons que ce rhumatologue connaissait cette technologie mais n’en a pas parlé pour des raisons qui nous échappent.

Était-ce plus rentable pour lui de laisser souffrir un patient? De lui fournir des prescriptions pour encore 20 ans, d’avoir à le suivre encore et encore? Pourquoi avoir caché les autres possibilités bien plus intéressantes qui peuvent améliorer sa qualité de vie comme on n’en aurait jamais pu rêver?

L’attente pour sa chirurgie est interminable. Si on nous avait parlé de tout cela bien avant, mon mari aurait gagné des années à ne plus avoir besoin de médicaments, de canne, ni se priver de vivre une vie bien plus intéressante que de rester assis jour après jour à ne plus croire en rien.

Nous sommes dégoûtés mais nous gardons espoir. Car enfin, LA solution est à notre portée. Mais nous ne sommes pas prêts d’oublier comment ça fonctionne la médecine qui est sensée se préoccuper d’abord et avant tout du mieux-être, de la qualité de vie et de la santé des patients et qui en laisse souffrir certains, au nom de quoi je vous le demande?

Grain de sel de Suzanne

Chacun tire sur son bout de couverture, plus ils se sentent importants, pires ils sont. Alors qu’on s’attend à de la compassion on assiste à des attitudes aussi cruelles que dans un abattoir.

Ils veulent toujours en faire plus, en avoir plus. Les gros «donneux de pelules» ne vous réfèrent pas facilement aux chirurgiens. WTF ? c’est plus payant de vous garder sous médication. Vous êtes un «client» et sur cette base, vous êtes payant pour eux. Ils ne vont pas vous envoyer chez le compétiteur. Il y a une RÉELLE compétition entre certaines spécialités. Certains médecins se regardent de haut, se cachent de l’information, y’a qu’à voir comment les spécialistes se sentent «au-dessus» des omnipraticiens… Un oncologue de l’hôpital l’Enfant-Jésus m’a déjà dit en parlant de mon médecin de famille: «Si vous préférez croire un médecin de campagne…» Ça en dit long sur leur respect entre confrères.

L’industrie de la maladie, la consommation de médicaments, la recherche de profits à tout prix, la cupidité, ne cherchez pas plus loin, ce sont les finances qui dirigent le monde de la santé et les ambitions de certains individus parmi les plus instruits de notre société.

C’est la plupart du temps dans l’adversité que l’humain retrouve son coeur et qu’il arrive à replacer les priorités aux bonnes places. Il y a au moins une justice, ceux qui nous traitent comme du bétail ont un corps eux aussi, ils connaîtront peut-être la souffrance un de ces jours. Et alors, vulnérables et découragés, ils goûteront eux aussi la médecine qu’ils nous servent depuis trop longtemps.

Si certains ont envie de se réveiller… décrochez vos diplômes et essayez de vous humaniser un peu. Le monde s’en portera mieux.

Sources et références pour cet article

  1. Canoe Santé - Remicade
    sante.canoe.com/drug_info_details.asp?brand_name_i...