[Chronique] Diamond Eyes : Chouette !

Publié le 16 mai 2010 par Cuttingpapers


Mine de rien, ça fait déjà quinze ans qu’ils sont là, les californiens de Deftones.
Quinze piges et six albums au compteur.

De toute la clique néo-metal qui a émergé à la fin des années 90 (Limp Bizkit, Korn & Co…), Deftones est l’élément qui a su le plus se différencier, mais aussi garder sa ligne de conduite.
Pas de frasques, pas de changement de style.
Un son particulier, hérité de la new-wave et d’influences allant de The Cure à Cocteau Twins (le très bon B-Sides & Rarities est là pour le prouver), et un chanteur à la voix reconnaissable, capable de mêler un chant éthéré à des cris assez hallucinants.

C’est donc quatre ans après Saturday Night Wrist que sort ce Diamond Eyes. Quatre ans marqué par l’accident de voiture de leur bassiste Chi Cheng (remplacé ici par Sergio Vega de Quicksand) en novembre 2008, accident qui l’a plongé dans le coma et profondément marqué le groupe.
L’attente a été longue, mais le résultat en vaut la peine.

Car c’est un groupe visiblement plus mature qui se livre ici.
Tout en gardant leur identité naturelle, Chino et sa bande ont choisi de creuser plus profondément leur sillon et de réfléchir à des moyens de l’enrichir. De fait, l’album oscille entre l’ombre et la lumière, entre légèreté et lourdeur.
Plutôt que de rentrer dans le lard et de laisser exploser leur colère ou leur désespoir, Deftones a choisi d’être plus subtil que ça.
Ainsi on se retrouve avec des paroles qui même si elles ne respirent pas la gaieté d’un matin de printemps, ne sombrent pas définitivement dans le pathos.
Le groupe module, modèle, fait varier ses tonalités.

Chino (qui soit dit-en passant a retrouvé sa ligne d’antan) semble lui-même jouer de manière plus assurée avec sa voix. Entre passage franchement aériens et hurlement comme jamais auparavant il n’en avait poussé. Royal la deuxième piste de l’album en est un bon exemple au même titre que CMND/CTRL.
Pour le reste, c’est du tout bon et comme d’habitude il arrive à véhiculer pas mal d’émotions par le biais de ses cordes vocales.
Mais c’est musicalement que le groupe semble avoir vraiment muri.

Les onze morceaux de l’album semblent encore plus travaillés qu’auparavant, et il n’est pas rare de voir au sein d’un même morceau des ruptures de tons ou des micros variations qui rendent son écoute bien moins lassante et plus jouissive que les trois quarts des productions alt-metal actuelles ou passées.

You’ve seen the butcher et son groove particulier sont à ce titre, un bon exemple des avancées du groupe.
Certaines pistes se paient même le luxe de rester gravées un petit moment dans votre tête (comme ça a été le cas pour 976-EVIL).

En résumé, Diamond Eyes est une confirmation du parcours unique bien que chaotique de Deftones.
Une preuve supplémentaire aussi que pour durer malgré tout il ne suffit pas d’être la « next big thing » ou de faire partie d’un mouvement à la mode, simplement de rester fidèle à ses bases et à ses influences, et avoir l’intelligence d’amorcer un virage un jour ou l’autre.
Deftones a sans conteste accouché, dans la douleur, d’un bien bel album.

Le clip de Diamond Eyes :