Anthologie permanente : Pierre Chappuis

Par Florence Trocmé

Pierre Chappuis a rendu, au festival de Soleure, en Suisse, un bel hommage à son ami Philippe Jaccottet, à qui était remis le Grand Prix Schiller. On peut retrouver cette intervention dans le livre publié à cette occasion par La Dogana et dont Alain Paire a rendu compte déjà dans le site.  
 
 
 
Midi fluide 
que trouble ici et là une ombre. 
 
 
Déjoint, tressaille à peine, 
comme frôlé au passage 
incognito. 
 
 
Mur de verdure et de vent 
 
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Midi en février 
 
Après d’autres, peinant et me réjouissant comme eux et comme eux poussé en avant, la même soif au fond de la gorge, suivre après tant d’autres, renouvelée à chaque enjambée, la même piste, la phrase la plus simple, linéaire, essentielle, aussi peu désireux qu’eux d’en connaître le terme.... 
 
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Mon pas résonne dans le vide. 
 
 
Matin de mai 
– subit désenchantement – 
sur un chemin perdu. 
 
 
Dans les arbres 
– cris et battements d’ailes–, 
des étangs non loin 
 
(rêvant d’être au pays de Sylvie) 
 
Pierre Chappuis, Comme un léger sommeil, José Corti, 2009, pp. 15, 47, 72. Lire la note d’Antoine Emaz à propos de ce livre.  
 
 
 
Minute perdue 
 
A gauche de la piste qui suit en ligne droite le fond de la combe se déploie, versant ensoleillé sans trace ni ride aucune, une étendue lisse, lumineuse, nue. Pur espace que jonchent par poignées, délicatement, des tiges de gentianes sèches, courts traits droits ou obliques, parfois brisés, sortant de la neige, telles les barbes d’une gravure effacée. On dirait, dans le silence sans pesanteur qui règne, une broussaille, plutôt un égaillement de sons à peine audibles, parents, presque égaux, soumis à aucun ordre, qu’on tenterait vainement de rassembler, résonnant toutefois comme la promesse d’une musique future faite de tintements, toute proche quoique affaiblie par la distance.  
 
Mais revenir après coup sur un instant aussi bref qu’un éclair, lumineux et discret comme lui, absolu et aussitôt repris – dépit !–, noyé dans le cours du temps, qu’est-ce à dire ? Où mes pas d’eux-mêmes m’avaient porté, les mots manquent à le faire, s’y refusent opiniâtrement, m’obligent en dernier recours à les retourner contre eux-mêmes, les figer, les engluer dans un commentaire là où j’attendais d’eux un transport.  
 
Pierre Chappuis, La Rumeur de toutes choses, José Corti, 2007, p. 99 et 100 
 
 
 
Pierre Chappuis dans Poezibao : 
Bio-bibliographie, extrait 1, « notes sur la poésie », Comme un léger sommeil (par Antoine Emaz) 
 
 
 
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