Dans mon quartier

Par Villefluctuante

Soudain, derrière un taillis, un château apparaît comme une petite pâtisserie avec trop de chantilly.


 

Dans une battisse en rénovation le cartouche « labor » apparaît au regard. Image d'un passé révolu prônant la valeur du travail.


 

Le restaurant Kébab a brulé dans la nuit. Les rumeurs les plus folles circulent en ville sur l'origine de l'incendie.


 

Derrière les façades existent encore des jardins sauvages.


De cette fenêtre s'échappe de jour comme de nuit le son surélevé d'une télévision jamais éteinte. Parfois l'occupant de l'appartement regarde depuis sa fenêtre les gens passés. Regarder,écouter.


 

C'est le premier mai et le défilé s'étend nonchalamment le long de la rue principale.


 

Un sculpteur s'est installé dans un ancien magasin. « passage latent des racines du passé vers un magnifique présent de lumière ». Inutile de dire qu'ici on l'attend de pied ferme le présent de lumière.


 

Un marchand propose de jolis pavillons sous cloche, rêve tranquille d'un petit chez-soi sans les autres.


 

Comme souvent les poubelles sont éventrées redonnant à la rue sont caractère médiéval.


 

Les chats hantent la rue, nourris par les mamies.


 

Le plafond de cette venelle est toujours crevé. Longtemps il a servi de cache au petit dealer du bout de la rue. Le marchand parti, seul la béance est restée, comme un tabernacle illicite.


Régulièrement des véhicules de pompiers et de gendarmerie sont dans la rue pour des interventions diverses : malaises, coups et blessures, interpellations... au point qu'on y fait même plus attention. La misère est acceptée en l'état, on essuie juste la plaie qui suppure.


Des manifestants, toujours les mêmes, qui prennent régulièrement la tête d'un maigre cortège pour rappeler que les licenciements touchent durement la ville et qu'une partie de la population souffre.


Un jardin d'enfant bondé à la sortie de l'école. Malgré l'effort considérable des employés communaux pour rendre l'endroit trivial, les enfants trouvent toujours le moyen de s'approprier les lieux en les détournant.


Un avis pour la perte d'un furet qui interroge : est-ce la mode des pets atypiques où la présence du massif forestier tout proche avec des possibilité de chasse à l'ancienne ? Toujours est-il que depuis quelques jours nous fredonnons en passant : « il court, il court, le furet... »


Des jeunes hommes qui réparent inlassablement leur mobilette qui leur permettra ensuite de sillonner le quartier en pétaradant pour attirer l'attention des filles.


Sur le marché un producteur local étale devant lui quelques sacs contenant ses haricots et ses plants d'oignon. A lui seul, il représente toute la fierté du coin pour la « mogette ».

Des vieux que l'on ne croise qu'au marché, à croire que la semaine ils se cachent. L'endroit semble être le dernier lieu de sociabilité pour eux, vestige du passé dans une ville qui a considérablement changée.


Un bar de nuit où la jeunesse clean se retrouve pour discuter et boire des bières tandis qu'un dealer d'héroïne habite juste au dessus et inonde la rue de son commerce.



Dans une venelle près du magasin hard-discount, un endroit où quelques personnes se retrouvent pour consommer immédiatement le produit de leur course et le jeter là en tas. Et depuis le temps que ça dure, la tas est maintenant conséquent.

Un café nommé Marius en mémoire du père de la patronne où on se lamente de la rue déserte à 19H00, « la faute à Internet, aux ordinateurs et aux voitures. Alors qu'avant, quant on appelait encore l'endroit le bout de la ville, c'était mieux, les gens se parlaient ».