Hip hop au Centre dramatique national de Montreuil (93)

Publié le 26 mai 2010 par Onarretetout

A Montreuil (93), un festival de hip hop dans la programmation du Centre dramatique national, où j'ai vu deux spectacles : Zou et Comment Shiva.

Zou s'affirme comme une danse urbaine, rythmée par les cadences des transports en commun, mais ce n'est pas cette première partie du spectacle qui me touche le plus, même si j'y remarque la qualité des danseurs. C'est à partir du moment où ceux-ci (trois femmes, trois hommes) sont confrontés aux lignes géométriques qui se dessinent au sol et en fond de scène. Ces lignes forment angles droits et courbes qui me rappellent le dessin de Léonard de Vinci (L'homme de Vitruve). Et c'est bien de cela qu'il s'agit : prendre la mesure de l'humain, individu ou collectif. L'inclinaison dont sont ensuite affectées ces formes projetées trouble la perception du spectateur, dont le corps lui-même est tenté de suivre les décalages qui se produisent devant ses yeux. Il ne s'agit pas uniquement de la projection de formes où insérer l'humain, mais aussi de lignes renvoyant aux notations de la danse, et Stéphanie Nataf, la chorégraphe de la compagnie LosAnges, parvient ici à transmettre cadre et notation au spectateur qui n'y voit que mouvement des corps et du décor.

Comment Shiva, solo de Magali Duclos (qui danse également dans Zou), était présenté après cette chorégraphie. Trois parties m'y sont apparues : l'entrée de la danseuse sur deux briques de bois, placées alternativement l'une devant l'autre, sans poser le pied sur le sol, ce qui lui apporte à la fois sécurité (je sais où je pose le pied) et difficulté (comment garder l'équilibre?), jusqu'au moment où elle pousse au loin l'une des briques. Elle sera bien obligée alors de se risquer à même le plateau. Dénouant ses cheveux, la danseuse s'en fait d'abord un rideau de scène à travers lequel ses mains expriment désir, déception, volonté, injonction, puis elle se redresse et parcourt le plateau comme le ferait une flamme. J'ai pensé alors qu'elle dansait jusqu'au bout de ses cheveux. La troisième partie nous ramène à la question des briques que, finalement, elle abandonnera pour, me semble-t-il, trouver son propre pas. La place du corps dans l'espace, la distance entre deux points (les briques) évaluée en fonction de ce corps, qu'il se situe entre ces points ou hors d'eux, font que ce solo a exprimé pour moi la question de ma situation dans ce monde ; et comment aller vers l'inconnu. Elle y va.