A qui profite la création des classements des universités au niveau internationale ?

Publié le 02 juin 2010 par Infoguerre

Dans le cadre de la compétition de l’économie de la connaissance, les classements des universités sont devenus incontournables : prestige national, ego du corps professoral, fonds alloués. Depuis 5 ans, nous voyons une transformation assez radicale des modes de fonctionnement des universités, que ce soit au niveau du recrutement, du financement, des formations proposées ainsi que des modes d’obtention des diplômes.

En 2003, « le classement de Shanghai », ou Academic Ranking of Word Universities (ARWU) a créé une innovation, il n’y avait pas classement international des universités mais seulement national. Ce classement fut créé par l’université de Shangu Jiao sous la présidence de Xie Shengwu, membre du Comité Central Chinois, non pas pour comparer les universités du monde mais pour connaitre la place des universités chinoises par rapport aux autres universités de renom. Les chinois veulent se projeter sur le long terme, se doter d’universités de classe mondiale. L’année d’après ce fut au tour du Times Higher QS de se doter d’un classement similaire en ajoutant des critères propre aux anglais.

Les critères du classement se font par rapport aux nombres d’articles publiés, de prix Nobel reçus, de professeurs nobélisés, entre autres. Un certain nombre de professeurs sont contre ce système, notamment en France : les critères choisis ne reflètent pas le vrai niveau de compétence des cours dispensés.

Néanmoins, chercheurs et étudiants français attendent ce classement avec impatience (seulement trois établissements dans le top 100). Pourtant la France est dotée de bonnes universités avec des budgets conséquents suivant les pôles de recherche (472 millions d’Euros pour Paris VI.), certes loin d’Harvard, avec ses 26 milliards de dollars. Valérie Pécresse, lors d’une interview, alors que la France était à la présidence de l’Union Européenne, a suggéré que l’UE crée sont propre classement.

L’Europe des 27 aurait tout intérêt à créer sont propre classement, en choisissant ses propres critères pour de se démarquer de celui de Shanghai. En effet, afin de maintenir leurs compétitivités au sein de l’économie de la connaissance, les universités de l’UE se doivent de mieux utiliser leurs ressources pour rester attractives auprès des étudiants et des chercheurs et ainsi éviter la fuite des cerveaux.

Même si les Etats Unis consultent peu ces classements, celui de l’US News & World Report est celui qui a le plus de résonance. De plus, ces classements sont quand même utilisés afin de maintenir et de construire une position et une réputation institutionnelle. Qu’on le veuille ou non, ils influent sur les partenariats et collaborations au niveau national et international.

Rebecca Hughes de l’Université de Nottingham (GB) pose ainsi le problème : la transparence des classements aura-t-elle pour effet de promouvoir ou d’entraver les collaborations inter-établissements à l’échelon international ? Les universités en haut de l’affiche qui présentent leurs programmes, peuvent ainsi mieux cibler le choix des partenariats qui ont un intérêt stratégique aussi bien national qu’international. Ainsi quels que soient les critères utilisés dans les classements, cela sert les intérêts des fournisseurs d’enseignement supérieur et les responsables politiques nationaux.

On peut dire qu’en France la réforme des universités découle, en partie, de ces classements. Nous avons vu qu’il y avait un débat important sur la qualité et les performances des établissements d’enseignement supérieur (EES), sur la manière dont ces critères sont établis et dans quel but.

Les implications politiques sont très importantes notamment sur l’éducation de l’opinion publique et des meneurs d’opinion. Chaque entité, chaque Etat doit se doter d’outils lui permettant, soit de se maintenir en première position, soit d’essayer de contrer la montée inexorable des EES des pays émergeants.

Les Etats Unis ont, de loin, les meilleurs outils de travail grâce entre autres à leurs moyens financiers. L’Europe, avec le traité de Lisbonne, va essayer de développer l'échange d'informations et d'expériences sur les questions communes aux systèmes d'éducation des États membres. La Chine, quant à elle, mise sur la venue de nouveaux chercheurs et la tenue de conférences pour multiplier les partenariats dans le but d’accroitre son économie de la connaissance. 

Cédric GOFFARD