BICENTENAIRE DE LA NAISSANCE DE FELIX PYAT (1810-2010) par Guy Sabatier

Par Bernard Vassor

04.06.2010

BICENTENAIRE DE LA NAISSANCE DE FELIX PYAT (1810-2010) par Guy Sabatier

Par Guy Sabatier

Félix Pyat est né à Vierzon dans le Cher d'un prêtre défroqué après 1789 (devenu ensuite avocat légitimiste avec la Restauration) et d'une nonne décloîtrée, le 3 octobre 1810. On comprend pourquoi la révolution française l'influença. Il fit des études au collège royal de Bourges où Jules Sandeau était son condisciple. Ensuite, son père l'envoya à Paris pour faire des études de droit en vue d'embrasser la carrière du barreau. Mais il participa à la révolution de 1830  avec les Etudiants des Ecoles, puis il fréquenta les cercles littéraires du quartier latin. Il connut George Sand avec laquelle il n'eut pas d'atomes crochus et commença une carrière de journaliste au "Figaro" (alors républicain) grâce au berrichon Henri Delatouche. Il abandonna la perspective de devenir avocat et c'est à partir de 1832 qu'il commença à avoir du succès avec ses "mélodrames de la république sociale" : Une Révolution d'Autrefois ou les Romains chez eux, Une Conjuration d'Autrefois, Arabella, Le Brigand et le Philosophe, Ango, Les Deux Serruriers, Cédric le Norvégien, Mathilde, Diogène...Il obtint un triomphe avec Le Chiffonnier de Paris interprété par Frédérick Lemaître au théâtre de la Porte Saint-Martin ! Journaliste à la Revue du Progrès, au Journal du Peuple, à La Réforme, il connut plusieurs démocrates-socialistes : François-Vincent Raspail, Louis Blanc, Godefroy Cavaignac, Alexandre Ledru-Rollin, Victor Considérant et les disciples de Fourier, Félicité de Lamennais... Quand éclate la Révolution de Février 1848,  il est nommé commissaire de la République à Bourges par le gouvernement provisoire. Ensuite, il est élu Représentant du Peuple à l'Assemblée Constituante. En Juin, il parcourt les barricades pour dissuader les ouvriers d'engager un combat qu'il estime désespéré. A la Tribune, il défend ardemment le "Droit au Travail" pour qu'il soit inscrit dans le préambule de la Constitution et il s'oppose à la proposition de Tocqueville de créer un président de la République, de surcroît élu au suffrage universel. Avec le groupe de la Montagne, il dénonce l'expédition militaire envoyée par le Prince-Président à Rome pour défendre les Etats pontificaux contre les républicains italiens. Mais leur manifestation du 13 Juin 1849 est réprimée et il doit s'exiler à 38 ans, en pleine gloire mélodramatique. Avec le coup d'Etat de Napoléon III puis la Commune, il restera pratiquemment trente ans hors de France. Il se réfugie en Suisse (Lausanne et canton de Vaud), puis en Belgique où il fait jouer un nouveau mélodrame à Bruxelles, en 1855Une Famille anglaise, enfin en Angleterre. Il retrouve les milieux des proscrits qui ont émigré à Londres. Il rompt avec Ledru-Rollin et fonde le Groupe de La Commune Révolutionnaire qui deviendra, en 1864, la section française en exil de l'Association Internationale des Travailleurs. Il rédige de nombreux libelles incendiaires contre le second empire qu'il proclame lors de meetings enflammés et qu'il fait pénétrer clandestinement en France. Il soutient "l'Indien Juarez" dont les partisans mexicains fusillent l'empereur Maximilien qui avait été placé sur le trône avec le bon vouloir de Napoléon III et l'aide de l'armée du général Bazaine. Cependant, en 1869, il accepte la seconde amnistie impériale et rentre en France. Mais son séjour sera bref car pour dénoncer l'assassinat du journaliste Victor Noir, il écrit son fameux toast à une petite balle qui en appelle au meurtre de l'empereur. Condamné, il repart à Londres. Mais il revient à la suite de la défaite de Sedan et de la proclamation de la République le 4 septembre 1870. Pendant le siège de Paris, il fonde un journal intitulé Combat qui critique la frilosité des républicains modérés face à l'occupation prussienne et révèle la capitulation de l'armée de Bazaine enfermée dans Metz. A la suite des événements de janvier 1871, il crée un autre journal : Le Vengeur dont il sortira une autre série durant La Commune de Paris. Après l'insurrection du 18 mars, Félix Pyat se rallie au mouvement, il est élu comme membre de la Commune dans le Xe arrondissement et siège à l'Hôtel-de-Ville. Quelques affaires vont un peu ternir sa participation : il va s'opposer en particulier au général Rossel qu'il soupçonne d'être un apprenti dictateur et cela l'amène à prendre des décisions malheureuses sur le plan militaire (affaire du Moulin-Saquet). Voulant appliquer les vieilles recettes de la Révolution française, il impose majoritairement un Comité de Salut public. Benoît Malon le traitera de "mauvais génie de la Commune". En outre, après être apparu sur une barricade, Pyat (âgé de 61 ans) disparaît lors des premiers jours de la semaine sanglante. Ce manque de combativité lui sera reproché violemment par Lissagaray dans son Histoire de la Commune où il se montre fanfaron et donneur de leçons avec le sang des autres. Contrairement à une légende qui le prétend parti immédiatement à l'étranger, Pyat demeure plusieurs mois dans les alentours de Paris et ne regagne Londres qu'en 1872. Il va passer huit années difficiles en reprenant l'écriture de différents libelles contre les opportunistes de la IIIe République. L'amnistie des communards lui permet de revenir en France en 1880. Avec sa compagne, la modiste Henriette Rigot, il s'installe à Saint-Gratien, 35 rue d'Ermont, qui sera sa dernière demeure. Il participe à plusieurs journaux éphémères, toujours sur la ligne de la République sociale. Il essaye de faire rejouer ses anciens drames et en écrit un nouveau L'Homme de Peine qui est joué au théâtre de l'Ambigu-Comique mais qui n'a pas de succès. Après la mort de Jules Vallès, Séverine dirige Le Cri du Peupleet Félix Pyat rentre dans la rédaction. Outre des articles politiques, Il y fait paraître en feuilleton un roman inspiré de sa fameuse pièce Le Chiffonnier de Paris. Cependant, l'affaire Boulanger bouleverse la scène politique. Lors d'une partielle à Marseille, en 1888, Pyat soutenu par les socialistes de la région (La Voix du Peuple) se présente contre le général et il est élu. Il quitte Le Cri du Peuple car ses collaborateurs, les guedistes et d'autres sont de plus en plus attirés par la mouvance boulangiste. Pyat siège à la chambre des députés avec Zéphyrin Camélinat et un petit groupe de députés d'extrême-gauche. Fidèle au principe du mandat impératif, il se rend à Marseille tous les six mois pour rendre des comptes à ses électeurs. Entouré de Jules Perrier et d'Eugène Protot (délégué à la justice sous la Commune), Pyat décède dans sa maison de Saint-Gratien le samedi 3 août 1889, à huit heures du soir. Guy Sabatier, le 4 juin 2010. ................................. Pour célébrer ce Bicentenaire, nous publions un livre qui, outre une présentation, contient le drame inédit Médecin de Néron (écrit en 1847-1848) que Pyat avait conservé dans ses bagages pendant son exil. Le manuscrit fut confié à l'ouvrier-bijoutier Henry Mathey (ex-commandant en second du fort de Vanves pendant la Commune) qui le recopia en plusieurs exemplaires du fait de son admiration pour Pyat. Mathey mourut à l'hospice de Brévannes en 1913 et Lucien Descaves qui lui avait rendu visite, récupéra un exemplaire. Il figure dans ses Archives conservées à l'Institut International d'Histoire Sociale d'Amsterdam. Comment guérir un empereur, incarnation du mal absolu, pour qu'il cesse définitivement de nuire, tel est l'intrigue de ce drame ? On y voit à l'oeuvre le socialisme utopique, humanitaire et eschatologique de Félix Pyat. _______________________

16:58 Ecrit par vassor dans Evènement | Lien permanent | Commentaires (0) | Envoyer cette note

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