Le film le plus bizarre de ma vie

Publié le 06 juin 2010 par Www.streetblogger.fr

Ces derniers temps j’ai une envie de nouvelles expériences, dans tous les domaines possibles et inimaginables. Si j’ai encore du chemin avant de pouvoir faire une soirée dans les souterrains de la capitale, le cinéma est un endroit beaucoup plus facile d’accès. C’est donc là que j’aime à découvrir des films totalement à des années lumières de ma culture générale. Face à l’overdose de films de super-héros inintéressants et bourrés de placements de produits orchestrés par les grandes marques, mon choix s’est récemment porté sur des longs-métrages plus atypique comme le très brumeux Guerrier silencieux du Danois auteur de la trilogie Pusher Nicholas Winding Refn, où la fable contemporaine  Mamuth estampillée Groland. Néanmoins mon envie la plus forte restait sur le film de Gaspar Noé Enter The Void après que je fus mis en appétit par une bande-annonce assez brute.

Mon premier contact avec Gaspar Noé doit dater de 1998, à l’époque j’avais à peine 12 ans. Je regardais Nulle Part Ailleurs période Thierry Dugeon qui parlait de cet étrange film où durant les projections « presse » et avant-premières, certaines personnes du public trop choquées auraient quitté la salle, certaines prises de vomissement. A l’époque on parle d’un film intitulé Seul Contre Tous. Le personnage principal joué par Philipe Nahon, est un ex-boucher repris de justice qui sombre dans la haine et la violence. Pas un scénario trop au goût du pré-ado que j’étais.  Pendant le reste de mon adolescence j’entendrais parler des délires et du prodige de Gaspar Noé, géniteurs d’un cinéma rude et surtout de polémiques régulières. Irréversible sorti en 2002, révolte le tout-Paris qui se pavane alors au festival de Cannes. La principale raison est la scène de viol que subit le personnage joué par Monica Belluci. Là encore toujours pas d’envie de ma part de voir ce film. Sans m’inscrire dans quelconque polémique d’alors, je ne me sens tout simplement pas concerné.

2010, Enter The Void, Samedi soir dernière séance à l’UGC des Halles, la salle n’est pas très grande mais remplie. Je suis placé au milieu et je me dis que si j’ai une envie de partir pour vomir ou autre je suis vraiment pas à la bonne place. En même temps en douze ans, j’ai développé une préférence pour les films souvent rudes et trash, je me dis que le souci ne devrait pas être là. Mais quand même, 2h30 de film environ, je me demande comment faire si le film est trop barré. J’ai même une petite pointe de stress, quel genre de scène hardcore je pourrais voir, bizarrement ce film est le premier de Noé à être passé entre les gouttes de la polémique. L’inconnu est vraiment ce qui m’attend, pour moi qui n’est jamais vu de film de ce réalisateur, et qui même n’est jamais trop tenté l’aventure du film très spécialisé au ciné façon film d’anticipation slovaque en version originale.

Visuellement Enter The Void, c’est vraiment dingue ! Une plongée ahurissante dans le Tokyo by Night interlope et violemment érotique à coup de vues planantes surplombant les bâtiments et les personnages. Des couleurs vives s’attachent à montrer que la vie de la ville est surement plus intense la nuit. Les lieux que traverse le personnage principal ou son esprit en témoignent d’ailleurs largement. Des rues qui mènent dans un strip-club, des boîtes bondées et bruyantes, un love hôtel à l’appartement d’un dealer maître d’esclaves sexuels, on traverse tout un panorama attirant par ses couleurs mais aussi repoussant tant une odeur malsaine s’en dégage. Avec des vues aériennes surplombant un Tokyo multicolore aux allures de maquette animée on a l’impression en fait d’être dans un conte de fée à l’envers où les drogues et le sex à outrance sont rois. Le cadre global du film est donc assez fou et vraiment prenant, pourtant des grosses lacunes sont présentes.

Les vues de caméra planantes sont intéressantes au début, mais au bout d’une heure et demie et déjà une vingtaine de séquence de la sorte on commence à s’ennuyer. Planer au dessus des personnages et avoir un bout d’intrigue en plus toutes les cinq minutes c’est un peu lassant à force. Le plus insupportable est surement la fin de chacune des séquences où la caméra est aspirée dans une des formes cylindriques proposées par le décor pour nous faire entrer dans une sorte de délirium en images d’animation d’une minute. Autant vous dire que j’ai passé la dernière  heure de la projection à croire que c’était la fin du film à chaque fin de séquence. Bloqué au milieu de la salle j’avais bien envie de faire comme la dizaine de personnes présentes qui ont quitté le cinéma avant la fin du film.

Problème je voulais aussi savoir comment cette intrigue allait se dénouer. Deuxième déception. Sérieusement c’est ça un film de Gaspar Noé ?! On dirait un scénario de dessin animé Disney écrit par des cracks addict ! L’amour familial fusionnel poussé à son paroxysme c’est très bizarre. Pour sûr comme a dit Noé dans une émission, ce n’est que du cinéma mais j’avoue que je m’attendais à un truc un brin plus complexe que cette fin que je vous laisse le loisir d’apprécier ou pas.

Ma première expérience de Gaspar Noé et de cinéma « bizarre » a donc dans un sens été enrichissante et intéressante pourtant, je ne vais pas crier au génie, y a des limites. Ce scénario est quand même bien léger et le processus d’évolution de l’intrigue est usant. Pour essayer d’étayer mon jugement, j’ai regardé par la suite Irréversible puis Seul Contre Tous. Autant vous le dire, le premier ne sert strictement à rien à part montrer que la vie peut basculer à tout moment. Le second est beaucoup mieux et montre la descente aux enfers d’un boucher au chômage que la vie n’a pas épargné.

Entrer dans ce cinéma quand on est un novice peut paraître difficile, cependant je renouvèlerais l’expérience avec plaisir tant les blockbusters US m’ennuient.

Adrien aka Big Ad