La gastronomie en trompe l'oeil : chefs d'oeuvre ou hors d'oeuvre ? Au plus près du réel, une exposition impressionnante pour papilles et pupilles à découvrir au Musée Le Vergeur.
Sous le regard placide et bienveillant du couple de marchands soyeux qui observaient la scène depuis le magistral tableau de Jacob Backer, c'est un étrange ballet auquel on pouvait assister jeudi dernier. Un défilé d'apprentis marmitons chorégraphié comme une nuée d'étourneaux au plumage noir et blanc, qui apportaient sans relâche les mets les plus appétissants sur le rectangle nappé de blanc, dans un cérémonial aussi solennel que malicieux,... puisque les chefs d'oeuvre d'architecture culinaire étaient des faux ! Parodiant la pompe empesée des luxueux temples de la restauration, ils déclamaient la recette de ces plats bien trompeurs : « Macarons en plâtre et résine », avant d'ajouter une petite pirouette en rime « Des oeufs durs qui durent » concoctée avec leur professeur de français, M. Médina.
Comme le rappelait M.Alain Cottez, président de la SAVR et directeur du Musée Le Vergeur, « il est fort logique que le musée accueille un festin, puisqu'il possède encore les meubles de l'hôtel particulier qu'il a toujours été, propriété d'Hugues Krafft, le fondateur de la Société des Amis du Vieux Reims qui y reçut la fine fleur de l'aristocratie européenne. »
C'est donc tout naturellement que la salle d'apparat prêta ses bas-reliefs Renaissance à ce Projet Artistique et Culturel imaginé par Catherine Stevenot, professeur d'art appliqué. Et de fait, le résultat est époustouflant ! L'exposition Au plus près du réel porte bien son nom, car c'est seulement de tout près que l'on peut distinguer le vrai du faux. Or ce soir-là, préparations comestibles et sculptures en trompe l'oeil étaient mêlées, avec la complicité des professeurs d'art hôtelier du lycée : MM Ferrat, Theenivs et Pèse. Mieux valait exercer ses yeux avant d'user ses dents si l'on voulait les conserver intactes, et discerner qui, de ses papilles ou de ses pupilles, seraient les mieux à même d'apprécier ces plaisirs chatoyants.
Publié dans l'Hebdo du Vendredi le 30 avril 2010