C’était prévisible…

Publié le 20 juin 2010 par Goure

Var : des larmes et des questions après les intempéries meurtrières.

Cinq jours après les violentes inondations qui ont mortellement touché le Var, dans une ambiance lourdement marquée par le recueillement, et cependant qu’émergent des questions sur la connaissance, par les autorités, des risques de crues dans le secteur, la situation matérielle des sinistrés tend à s’améliorer. Hier, l’électricité était de retour dans la quasi-totalité des foyers et l’eau rétablie dans la moitié des 22 communes sinistrées, alors que 4500 personnes étaient encore engagées dans les opérations de déblayage et de recherches.”Faisant leur déclaration d’assurance ou vidant les maisons, les gens prennent la mesure du désastre, témoigne Sandrine, membre de la cellule d’urgence basée à la sous-préfecture de Draguignan, nous avons reçu plus de deux cents personnes, dont certaines qui n’ont plus rien” et doivent compter sur “l’élan important de solidarité qui s’est créé“.

Officiellement, le bilan des victimes est toujours de 25 morts, dont certains ont été inhumés hier, et d’une dizaine de disparus. Hier, le quotidien Var-matin faisait pourtant état de 29 décès, information que ne confirment pas la préfecture et les services de secours. Après le choc, le département tente d’évaluer les dégâts et de panser ses plaies. À la veille de l’ouverture de la saison, de nombreux campings ont été dévastés, notamment à Fréjus ou Roquebrune-sur-Argens. D’autres secteurs ont été aussi durement frappés : les éleveurs ovins ont perdu plus de 3000 bêtes - 155 tonnes de carcasses ont été enlevées -, de nombreuses exploitations agricoles ont subi des dommages et des centaines d’entreprises ont été inondées. Dans ce contexte d’”hébétude” selon les mots d’une habitante de Draguignan, un début de polémique se fait jour.
Plusieurs études montrent que les autorités connaissaient les risques encourus dans certains secteurs proches des rivières de la Nartuby ou de l’Argens. En 2005, la direction départementale de l’équipement (DDE) décrivait dans un plan de prévention des risques d’inondation (PPRI) les conséquences terribles d’une crue remarquable. À Draguignan, plusieurs secteurs d’habitations et des bâtiments administratifs “seront fortement touchés en cas de crue centennale“, indiquait ce document. Le PPRI n’est toutefois pas rétroactif et, depuis 2005, aucun permis de construire n’a été accordé en zone inondable a assuré au JDD la mairie de Draguignan.Le journal fait encore état d’une étude de la Mission risques naturels (MNR), démontrant que, dans le Var, plus de 9500 établissements professionnels et 59000 logements sont situés en zone inondable. Alors que le président de la République doit se rendre dans le Var, demain après-midi, lundi 21 juin 2010 , pour visiter les sinistrés, François Fillon a demandé à Jean-Louis Borloo et Chantal Jouanno, ministre et secrétaire d’État à l’Écologie, de “faire le bilan des dispositifs de prévision et de risques liés aux crues de type méditerranéen“.Le document est sommairement libellé “Plan de prévention des risques prévisibles, commune de Draguignan, la Nartuby”. Rédigée en 2005 par les services de l’État (DDE), cette étude détaille de manière implacable le scénario des crues qui ont mortellement frappé la sous-préfecture du Var. “On dénombre dans la zone inondable de la Nartuby, environ 50 bâtiments commerciaux ou artisanaux, 150 habitations individuelles et 15 immeubles collectifs en zone inondable. En outre, une maison de retraite, la maison d’arrêt et le SDIS (la caserne de pompiers, ndlr) sont fortement touchés en cas de crue centennale”, peut-on y lire. Or, c’est précisément ces zones qui ont connu les dégâts les plus importants. Ce plan de prévention identifie de “très forts risques” dans plusieurs secteurs de Draguignan et de Trans-en-Provence et fixe un objectif clair : “Interdire les implantations humaines dans les zones les plus dangereuses où, quels que soient les aménagements, la sécurité des personnes ne peut être garantie intégralement et les limiter dans les autres zones inondables” .

 Dès 2005, les services de l’État avaient identifié de “très fort risques” dans les secteurs touchés.

Dans les villages sinistrés l’eau potable revient peu à peu et l’électricité a été rétablie dans la quasi-totalité des foyers. Le temps des questions est là: ce drame était-il prévisible ?

La Provence.com - Publié le dimanche 20 juin 2010  .