J’avais deux amis – Nico Naldini

Par Livraire @livraire

Nico Naldini, né en 1929, écrivain, réalisateur et poète, était le cousin de Pier Paolo Pasolini.
Ce poème est dédié à Comisso (très certainement Giovanni Comisso, écrivain italien mort en 1969) et à Pasolini.

J’avais deux amis

J’avais deux amis
qui sont morts.
Le premier mort
m’a dit :
ne te tourmente pas,
pour les vivants
tout est jouissance.

Le second mort
m’a dit :
que de fois tu as eu
peur que je meure
tu dois maintenant
vivre avec cette peur.

Le premier était riche
de résurgences,
d’étés et de fleuves,
d’adolescents se déshabillant
comme anges qui volent.

L’autre était pauvre,
dur avec lui-même,
il n’avait eu jour de répit,
sans amour,
il avait une jouissance minée,
une vie rêvée,
pleine d’enfants assassins.

Ne me dites plus rien,
suffit avec ton grand affairement
même maintenant
qu’ il est défait.

Nous étions enfants
dans les nuages d’avril
et la pluie
comme un chant,
maintenant nous devons être seuls.

L’autre ami va errant
mi-rêvant d’être encore vivant,
mi-vivant dans la meilleure
partie de moi-même.

I vevi doj amis

I vevi doj amis
ch’a son muàrs.
Il prin ch’al è muàrt
al mi à dita :
no rumià
pai vifs al è
dut un gioldi.

Chel altri ch’al è muàrt
al mi à dita
quantis voltis ti vevis
poura ch’i murìs,
adès ti as da vivi
cun che poura.

Il prin al era sior
di resultùms
di estàs e di fluns
di fantàs ch’a si spojavin.
coma anzui ch’a svualin.

L’altri al era puarèt
dur par sè
sensa requie di un di
sensa amour
al veva un gioldi crepàt
un vivi insumiàt
di frus assasins.

No dizeimi pì nuja
basta cul so gran dafà
encia adès
ch’al è disdifat.

I ierin fioj
cui nuj di avril
e la ploja coma un ciant
adès i vin di essi
bessoj.

L’altri amì al va torseòn
miès insiumàt di essi enciamo vif
mièsvif drenti la part
miej di me.


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