Génération « information – addiction » & pathologies associées

Publié le 23 juin 2010 par Caroleblancot

Parfois je me demande comment font les autres !
Dorment-ils aussi avec leur smartphone a proximité pour ne pas laisser passer THE information à traiter sans délai, LE mail auquel répondre immédiatement ? Vérifient-ils également d’une main fébrile la présence de leur téléphone dans leur sac ou dans leur poche si celui-ci n’a pas sonné ou vibré les 15 dernières minutes ? Ont-ils 3 bouquins inachevés dont la lecture est sans cesse interrompue ? Leur sacoche contient-elle chaque jour une dizaine d’articles à lire pour décider si oui ou non ceux-ci mériteront un traitement particulier ? Reçoivent-ils comme c’est mon cas 200 mails en moyenne par jour, 10 DM (directs messages) sur twitter, 15 messages en moyenne par jour par Viadeo et 8 sur LinkedIn ? Traitent-ils 4 appels téléphoniques entrants en moyenne ? Entretiennent-ils activement en complément de leur activité professionnelle 4 réseaux et 3 communautés qui drainent à elles-seules plusieurs centaines d’inputs quotidiens ?
Je ne parle même pas de la vingtaine d’outils informatiques maniés chaque jour pour une tâche différente et à laquelle on se connecte avec un mot de passe particulier. (En ce qui me concerne, mon capital ‘where & what’ caractérisant mon identité numérique recelle pas moins de 150 url pour 15 mots de passe différents) [Et après on s'étonne que je n'ai pas la télévision ! Mais quand donc voulez-vous que je la regarde. Je la regarderai sur iPad, voilà tout...]

Quand je lis ce qui suit, j’obtiens les premières réponses à mes questions… Et puis récemment, tandis que j’étais réveillée à 5h du matin, j’ai compris que certains, dont l’expertise et l’activité principale ont trait au Social Media, ont effectivement pour habitude de poster « Bonjour à tous » sur Twitter à cette heure si matinale. Il n’y a pas d’heure pour les relations virtuelles !

Génération d’addictions

Entre les wagons de mails, les tonnes de coups de fils, les monticules de dossiers, les sollicitations par messages instantanés, le « trop-plein » n’est pas loin. « Chaque salarié doit traiter dix à quinze fois plus d’informations aujourd’hui qu’au début des années 2000, » estime Jean-Pierre Testa, responsable de l’offre management des équipes à la Cegos. Dans le même temps, la sacro-sainte secrétaire qui filtrait, classait, organisait… – bref, permettait au manager de ne pas se laisser submerger – est en voie de disparition dans les entreprises. « Il faut trouver le subtil équilibre entre la nécessité d’être informé pour assurer une veille technologique ou le suivi de ses clients et celle de ne pas être noyé par l’information », prévient Loïc Lebigre, responsable emploi et formation à l’ADBS, association des professionnels de l’information.
Source

« Chaque semaine, je fais hospitaliser 2 ou 3 cadres noyés sous l’information »

Submergés par les mails, joignables à tout moment… les cadres sont constamment sous pression. « La profusion d’informations va au-delà de ce que peut supporter le corps humain », alerte Marie Pezé, docteur en psychologie et responsable de la consultation « souffrance au travail » à l’hôpital de Nanterre.

Capital.fr : Pourquoi le trop-plein d’informations est-il source de stress, voire de souffrances ?
Marie Pezé : Les nouvelles technologies de l’information ont un impact évident sur notre façon de travailler : il faut répondre dans l’instant, prendre des décisions au quart de tour. On ne peut plus s’organiser, ni prioriser ses tâches pour donner un sens à son travail. La boîte mail ou les sites de microblogging comme Twitter en sont les meilleures illustrations. Devenue le tonneau des Danaïdes, elle se remplit sans fin et à toute vitesse, ce qui finit par user très vite nos capacités cognitives. Le fonctionnement logique de notre cerveau change : notre concentration se fractionne, nous avons tendance à raisonner de plus en plus en mots-clés.

Capital.fr : Pourtant, cette course à la réactivité semble inéluctable…
Marie Pezé : On demande au manager de gérer et digérer toujours plus d’informations, d’être joignable 24h sur 24, donc de devenir un athlète de la quantité. Mais l’homme n’est pas une machine. Ces exigences dépassent ce que le corps humain peut supporter. La rétine de l’œil, par exemple, ne devrait pas lire 400 mails par jour, et pourtant ce seuil est souvent dépassé.

Capital.fr : Comment les managers font-ils face à cette surcharge d’informations ?
Marie Pezé : Très mal pour certains. Chaque semaine, je fais hospitaliser deux ou trois cadres en urgence dans un service psychiatrique pendant huit jours. C’est la solution pour qu’ils réussissent à déconnecter complètement, je leur confisque ordinateur et téléphone portable. C’est très efficace ! Ils sont souvent tétanisés car ils savent qu’ils laisseront passer des informations importantes et qu’ils risquent d’être pénalisés dans leur travail. Mais lorsqu’ils viennent me voir, c’est que leur surcharge de travail a dépassé la limite du supportable.

Capital.fr : Quels symptômes doivent nous alerter ?

Marie Pezé : Les pathologies de surcharge de travail se manifestent de différentes façons : irritabilité, troubles du sommeil, troubles alimentaires, perte d’acuité visuelle, problèmes de concentration, oublis (clés de voiture, numéro de carte bleue ou de sécurité sociale). Ne plus dire bonjour, au revoir, merci dans ses emails est tout aussi révélateur. Le manager est tellement obsédé par la masse d’informations qu’il doit encore traiter, qu’il en oublie les civilités de base. Lorsque le corps nous envoie ces signaux, il faut en parler à son médecin traitant. Sinon le risque de débordement est réel : agression des collègues, burn-out, voire suicide.
Source : www.capital.fr/ Propos de Marie Pezé recueillis par Arnaud Normand (12/05/2010).

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