LES PROMESSES DE L'OMBRE, mon avis

Par Tom

Anna (Naomi Watts) est profondément marquée par la disparition d’une jeune fille décédée, dans son service hospitalier, alors qu’elle mettait au monde une petite fille. Anna récupère le seul document qui accompagnait la défunte : un journal intime écrit en russe. Dans celui-ci, figure l’adresse d’un restaurant. Se rendant dans ce riche établissement, Anna rencontre son propriétaire, un dénommé Semyon (Armin Mueller-Stahl). Ce dernier tente de convaincre Anna de lui remettre le cahier qu’elle a trouvé mais la jeune femme refuse ! Sans le savoir, Anna vient d’entrer en contact avec un puissant chef de la pègre londonienne... David Cronenberg se serait-il assagi avec le temps ? Loin d’être aussi excentrique que "eXistenZ" (1999) ou obscure comme "Spider" (2002), Les Promesses de l’ombre, son dernier film, rentre davantage dans le rang en se parant d’une trame plus classique.

Ceci n’est pas nécessairement un reproche d’autant que ce "Eastern Promises" (titre original) sonne l’âge d’une certaine maturité pour Cronenberg. Celui-ci prend son temps et ménage le suspense tout en brossant un portrait magistral d’hommes forts de la mafia russe installés à Londres. Sobre et précis, le réalisateur canadien va droit au but et lance la douce Naomi Watts dans la fosse aux lions. Fosse aux lions où l’on retrouve trois fantastiques acteurs : Viggo Mortensen, Vincent Cassel et Armin Mueller-Stahl.

On pourrait regretter que Anna, le personnage de Naomi Watts, reste quelque peu en retrait mais on ne peut pas refreiner notre plaisir de retrouver Viggo Mortensen dans la peau d’un simple "chauffeur" (en apparence !) qui grimpe petit à petit l’échelle du pouvoir au sein d’une famille mafieuse. Celui-ci forme avec le français Vincent Cassel un tandem extraordinaire.

Sobre et retenu, Nikolai Luzhin, alias Viggo Mortensen, contrebalance à merveille l’arrogance et l’ivresse du pouvoir qui colle à la peau de Kirill joué admirablement bien par Cassel… Toujours à l’aise dans le rôle de la crapule de service.

David Cronenberg sonde avec beaucoup de finesse et d’élégance la vie d’une famille du crime londonienne. Au sommet de celle-ci on retrouve Armin Mueller-Stahl en paisible patron d’un riche restaurant, qui se transforme en un implacable comploteur et meurtrier. Une grande performance ! Encore une !

Inévitablement, en voyant "Les Promesses de l’ombre", on pense à l’un des précédents films de Cronenberg : "A History of Violence". Dans ce thriller de 2005 sondant l’attrait de l’homme pour le sexe et la violence, David Cronenberg met aux prises Viggo Mortensen, un paisible commerçant en apparence, à un lugubre et mystérieux Ed Harris portant la panoplie rêvée du Men in Black : lunettes et costume noirs !

Dans "Les Promesses de l’ombre", notre cinéaste reprend certains artifices de cet "History of Violence". C’est au tour de Mortensen de jouer les mystérieux loups solitaires qui cachent bien son jeu derrière ses lunettes noires et son costume sombre. Dans cette histoire de guerre des gangs, Cronenberg n’a pas non plus laissé au vestiaire sa fougue lorsqu’il s’agit de filmer de bonnes giclées de sang !

Outre quelques gorges bien tranchées et des doigts (congelés) sectionnés, la scène du hammam est un nouvel éloge à la violence. Crue, incisive, ensanglantée,… Avec cette séquence, Cronenberg prouve qu’il n’a pas perdu de sa dextérité pour filmer l’"homme-animal" dans toute sa splendeur qui a faim de destruction et de mort !

Entre polar mafieux dépouillé de tout artifice ronflant & pure "production" made in David Cronenberg, "Les Promesses de l’ombre" trouve une place de choix parmi les sorties ciné’ de cette année ! Outre un climat oppressant relayé par trois acteurs époustouflants (Mortensen / Cassel / Mueller-Stahl), ce film est gratifié par une réelle once d’humanité insufflée par Naomi Watts campant une jeune femme sensible et courageuse... Un type de personnage que Cronenberg a rarement eu l’occasion de filmer.

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