Marie-Sabine Roger - La tête en friche

Par Clarac

Editeur : ROUERGUE - Date de parution : 15/08/2008 - 218 pages que je conseille
Germain, 45 ans vit dans une caravane au fond du jardin de sa mère. Il travaille un peu à gauche et à droite, s’occupe de son jardin et passe beaucoup de temps au café avec ses copains. Quand il ne rajoute pas son nom au monument aux morts, il compte les pigeons au parc. Germain est né d’une histoire brève du 14 juillet. Un manque d’amour maternel, un père qu’il n’a jamais connu, il garde de l’enfance l’indifférence de sa mère et les humiliations de son instituteur qui le considérait comme un bon à rien. Alors forcément, Germain n’a jamais eu envie des mots et des livres, il s’en méfie.
« Tout ça pour expliquer qu’à la fin du primaire j’étais plus souvent à la pêche que le cul posé sur un banc. Ce qui fait que plus tard à l’armée, on m’a classé dans les analphabète, nom dans lequel on entend le mot bête, qui résume très bien de ce qu’on pensait de moi, en plus poli. »
Sur un banc du jardin public, il fait la rencontre de Margueritte, 86 ans, frêle et fragile qui est en maison de retraite. Entre eux deux, une histoire d’amitié et de complicité va se nouer.
Cultivée mais pas prétentieuse, elle respecte Germain. Margueritte aime faire la lecture à voix haute et Germain va prendre goût aux mots. Lui qui avait peur de ce savoir va employer des nouveaux mots, citer Camus à ses copains au bistro ce qui donne lieu à des situations drôles. Mais surtout, il va découvrir de nouveaux horizons grâces à la lecture.
Cette histoire est un plaidoyer sans mots savants ou flonflon pour la lecture et la connaissance. Le narrateur est Germain et on suit son cheminement, ses pensées.
Plus on avance dans le livre et plus ses expressions se modifient. Par exemple, il ne dit plus « baiser » mais « faire l’amour ». J’ai trouvé beaucoup de pudeur et de sincérité dans les réflexions de Germain.
« Lorsque j’ai rencontré Margueritte, j’ai trouvé ça compliqué, d’apprendre le savoir. Ensuite, intéressant. Et puis flippant, parce que, se mettre à réfléchir, ça revient à donner des lunettes à un myope. Tout semblait en sympa, tout autour : facile, c’était flou. Et tout d’un coup on voit les fissures, la rouille, les défauts (..) »
« L’affection, ça grandit sous cape, ça prend racine malgré soi et puis ça envahi pire que du chiendent. Ensuite c’est trop tard : le cœur, on ne peut pas le passer au Roundup pour lui désherber la tendresse. »
« La chance, elle est pas communiste ».
J’avais aimé le film mais incontestablement le livre m’a beaucoup plus touchée. Merci à Gwen pour le prêt !

Dans son billet,Theoma parle du livre et du film.
De Marie-Sabine Roger, j’ai également lu des nouvelles incisives sur les personnes âgées Les encombrants que je recommande vivement !