J’ai enfin vu Bright Star, hier soir. Voici une de mes...

Publié le 30 juin 2010 par Mmepastel

J’ai enfin vu Bright Star, hier soir.

Voici une de mes scènes préférées. Au-delà de sa beauté formelle et contenue, la lumière, la musique, les papillons bleus qui volètent et tournoient, les mots d’amour de Keats, l’émerveillement de Fanny, la candeur de sa soeur (et son visage si touchant), elle me paraît métaphorique du film.

C’est un film dans lequel il faut s’abandonner je crois. Il faut se laisser prendre par son romantisme violent et dépoussiéré de toute mièvrerie. C’est un film sur la beauté et sa force qui l’emporte sur la fragilité du monde réel, dont John Keats était si pénétré :

“-Une chose de beauté est une joie éternelle ;

Son charme s’accroît ; jamais elle ne

Rentrera dans le néant ; toujours au contraire elle nous assurera

Une retraite paisible, un sommeil

Plein de doux rêves, la santé et une respiration égale.

Aussi, chaque matin tressons-nous

Une guirlande de fleurs qui nous enchaîne sur la terre,

En dépit du découragement, de l’inhumaine disette

De nobles créatures, des jours tristes,

De toutes les routes pestilentielles et enténébrées

S’ouvrant à nos recherches : oui, en dépit de tout,

Une forme quelconque de beauté rejette le crêpe

Loin de nos esprits assombris.”   (Endymion)

Quoi de mieux que des papillons pour symboliser cela ? Ils sont sublimes, de petits chefs-d’oeuvre de la nature ; ils aiment la chaleur, se déploient hors de leurs chrysalides dans la chambre des soeurs, font trois tours, ravissent les yeux et puis meurent. C’est leur destinée. Comme la vie fragile de John Keats, qui écrira son oeuvre en trois ans, aimera Fanny quelques saisons puis mourra. Ils auront connu la beauté.

Mais le monde ne contient pas que beauté. Le monde est âpre. Les malades sentent mauvais, ils vomissent du sang, l’amitié n’est pas toujours sincère, sans argent vous êtes condamné à mourir de froid et de maladie. Fanny l’apprendra dans la douleur. Elle qui n’était que frivole, comprendra la beauté des mots, de la nature et la laideur que peut aussi contenir la réalité. Son personnage est extrêmement intéressant. Personnage têtu et plein, son ouverture à un autre monde que le sien est une réussite. Découvrant la souffrance engendrée par l’amour, elle dira : “Plus jamais je ne m’en moquerai”.

Merci Jane Campion.