La guerre au Chemin des Dames

Publié le 05 juillet 2010 par Mpbernet



Voici la vue superbe que l'on a des pentes de la crête nommée "Le Chemin des Dames", haut lieu des combats les plus sanglants et les plus vains de la Grande Guerre. Mais cette guerre, en ce temps-là, se mène dans des tranchées, des trous d'obus, et parfois, dans des cavernes.....comme celle dite"du Dragon" ou "Drachenhöle"


La Guerre à 15 mètres sous terre…
 
Pendant la guerre, il est courant de trouver d'anciennes carrières d'extraction de pierre réaménagées pour les besoins des armées, et particulièrement dans les plateaux de l'Aisne, dans la région de Soissons. Lorsque les soldats allemands enlèvent la Caverne du Dragon aux Français, ils prennent l'avantage.

Le refuge est un emplacement stratégique : la Caverne permet des attaques et des replis par surprise sur le Chemin des Dames, route de crête surplombant les vallées de l'Aisne et de l'Ailette. Protégés du froid malgré une forte humidité, les Allemands transforment la Caverne en une véritable caserne avec postes de tirs et un réseau d'électricité. Alors que les morts s'amoncellent dans les tranchées, l'aménagement allemand dans les artères souterraines se met en place : des dortoirs, une chapelle, un puits, un poste de secours et même un cimetière… Quand ils ne servent pas à protéger des tirs ou d'attaques au gaz, les murs de pierre se parent de souvenirs de soldats au repos : dessins ou messages tracés à la fumée de bougie et autres gravures. Pour s'occuper, les plus habiles sculptent des objets en utilisant des balles et des douilles usagées.
Le 25 juin 1917, peu après l'échec dramatique de l'offensive Nivelle, des soldats français remportent une victoire : la prise de la Caverne du Dragon. Ils repoussent peu à peu les Allemands au fond de la grotte. A partir du mois de juillet et jusqu'en octobre 1917, les deux camps ennemis imposent alors leurs frontières intérieures, chacun restant sur le qui-vive. Désormais, le moindre bruit entendu dans les salles de la grotte devient source d'inquiétude…


Quel contraste, en arrivant à ce lieu de mémoire, entre les travaux des champs de ce mois de juillet et la présence, sous nos pieds, de cet antre qui servit de refuge aux armées ennemies, à cheval sous le front lui même, de sorte que, lorsque des vagues d'assaut françaises se ruaient pour escalader la pente sous le feu des mitrailleuses allemandes et tenter de prendre ce lieu stratégique, des soldats Allemands surgissaient des entrées latérales de la caverne et prenaient les Français à revers.
Quand on apprend que la caverne elle-même, immense décor de l'enfer où se distinguent très précisément les coups régulier des gouges des carriers qui exploitaient ici le calcaire dès le 16° siècle, fut à un moment aussi ligne de front : chaque camp avait érigé des murs à l'intérieur de ce trou, pour se protéger de l'adversaire...pendant qu'au jour, le feu roulant des canons parvenait, en quelques endroits, à faire ébouler le toit de roche.
Quelle émotion de voir ces reliques, conservées comme figées dans la rouille et à 12° de température et avec 100% d'humidité : des fusils, des bobines de fils électrique, téléphonique, barbelé, des douilles d'obus récupérées, détournées, décorées, des casques explosés, des bayonettes et les grenades à main (l'allemande, à manche, appelée "le presse purée" par les français) exposées côte à côte....
A quelques kilomètres, le village de Craonne, fameux par sa chanson antimilitariste, évoquant les mutineries de 1917, et qui resta interdite en France jusqu'en 1974.....

"Adieu la vie, adieu l'amour,
Adieu toutes les femmes
C'est bien fini, c'est pour toujours
De cette guerre infâme
C'est à Craonne sur le plateau
Qu'on doit laisser sa peau
Car nous sommes tous condamnés
C'est nous les sacrifiés"
Caverne du Dragon - Musée du Chemin des Dames -  02160 OULCHES-la Vallée-Foulon (02 23 25 14 18), visite guidée toutes les 30 minutes, gratuit jusqu'au 15 novembre.
Une belle exposition temporaire de photographies de Gérard Rondeau "Les fantômes du Chemin des Dames, le presbytère d'Yves Gibeau"