L'ai-je bien descendu (Le Goncourt) ?

Par Gerard

J'ai toujours connu, de loin, Max Genève. Sans doute parce qu'il me semble qu'un de ses éditeurs, dans le temps, m'envoyait ses nouveautés. Dans "Noir Goncourt" (Anabet), il met en scène la cocasse consanguinité germanopratine de certains éditeurs-auteurs-critiques. Un monstre tricéphale aux moeurs de voyous qui font davantage penser aux prévaricateurs du monde politico-financier qu'à des consciences élevées, des beaux esprits, de grands artistes.

 

"Les prix existent, écrit Max Genève, c'est comme la chaude-pisse, il faut faire avec. Remarquez, pour la chaude-pisse, on a des remèdes qui ont prouvé leur efficacité. En revanche, pour éradiquer la connerie en littérature, on n'a pas encore trouvé de remède" (Cité par André Rollin dans Le Canard enchaîné). Et de balancer, sec : "Certains auteurs commettent journellement des fautes graves qui peuvent s'apparenter à des crimes, quand on considère le pouvoir exorbitant que s'arrogent ceux qui sont à la fois juge et partie : s'approprier le travail d'un autre ; condamner au silence ou à la misère des confrères qui refusent de faire allégeance, sacrer un médiocre pour freiner l'ascension d'un rival plus doué ou réfractaire aux moeurs du milieu, mais aussi plagiat, concussion, trafic d'influence, qui sont monnaie courante..."

 

Après tout la littérature est devenue une multinationale comme une autre. Ce fut là ma plus grande déception de jeune homme : adolescent je voulais devenir écrivain pour échapper aux bassesses des épiciers, des curés et des militaires. Je croyais que la littérature m'offrirait un monde autre, qu'il suffirait d'y pénétrer. J'y vis tout autant qu'ailleurs la rouerie satisfaite et une bonne dose de mesquinerie qui n'appartient qu'à elle. Des artistes ? Laissez-moi rire : les épiciers, les curés et les militaires sont souvent plus authentiques que tous ces bas bleus, tous ces tartuffes de l'édition. Si la culture c'est ça, eh bien croyez-moi, lâchez la culture ! 

 

Mais il ne faudrait jamais critiquer les "rois nus" au prétexte de populisme ; et dénoncer la corruption réveillerait les extrêmes-droites.  Alors quoi ? "Collaborer" ??? Il manque à ce temps de saines colères. Soyez patients. Elles arrivent. Salutaire Max Genève.