Dee Dee Bridgewater- Igor Géhénot Trio et Franck Avitabile trio aux Dinant Jazz Nights, parc de l'Abbaye de Leffe, Dinant, le 18 juillet 2010

Publié le 18 juillet 2010 par Concerts-Review

Treizième édition des  Dinant Jazz Nights, un festival de six jours se déroulant dans le magnifique cadre du parc de l'Abbaye de Leffe.
Une organisation, en tous points, impeccable: de l'équipe d'accueil, aux bar(wo)men ou service de table, à madame pipi et aux dirigeants, tous, ont le sourire pour faire de cet événement mosan la fête la plus accueillante et conviviale de Wallonie.
On reviendra, susurre madame, en sifflotant une Leffe Rubis.
Cette année Manu Katché est le parrain des nuits dinantaises, il jouait le samedi 17.
D'autres pointures au menu: Jan Garbarek, David Sanborn, Joshua Redman ou Matt Bianco...
17h30 Igor Géhénot Trio

Igor Géhénot, pianiste de 20 ans, et un talent monstre.
Ce ket va devenir énorme.
Pour l'accompagner, Sam Gerstmans à la contrebasse, une belle carte de visite: No Vibrato, Manu Hermia, Fred Delplancq, Steve Houben, Jacques Pirotton...Samuel ne chôme pas.
Aux drums, un ami d'Igor: Antoine Pierre, pas 20 ans le Toine, mais déjà une assurance phénoménale.
Une compo personnelle 'On the Bridge' pour entamer le set, du jazz lyrique, permettant à ton esprit de folâtrer nonchalamment.
'Nuit d'hiver' du romantisme adolescent et un jeu à la Michel Legrand.
Timide et rougissant, Igor, mais la gêne disparaît lorsqu'il caresse les noires et blanches, il est doué!
Un titre plus aventureux 'City A' (?) , avec piano dissonant et rythmique saccadée.
'Highway at 2' de sa plume. Traffic fluide sur l'autoroute, du jazz limpide, d'inspiration Debussy.
Cole Porter 'What is this thing called love' un standard impeccable.
Stevie Wonder , un extrait de ' Journey through the secret life of plants' .
Le trio n'a pas choisi la voie de la facilité, mais s'en tire avec brio.
Public subjugué.
Greg Houben, fiston de Steve, armé d'un bugle, en guest.
Une ballade royale, signée McCoy Tyner 'Search for Peace'.
Le bondissant 'Magic Ball', pour Magic Johnson, termine ce concert de haut vol.
Un bis:
Un bebop nerveux du trompettiste Kenny Dorham.
Franck Avitabile Trio- Tribute to Michel Petrucciani.

Michel Petrucciani repose au Père Lachaise, depuis janvier 1999.
Personne n'a oublié le génial pianiste d'Orange, atteint d'ostéogenèse imparfaite, certainement pas Manu Katché, qui eut le bonheur de l'accompagner.
Normal qu'il invite le plus brillant élève du pianiste handicapé: Franck Avitabile!
A ses côtés , le batteur, ami de Claude Nougaro, qui a découvert Petrucciani: Aldo Romano.
Une légende vivante!
A la contrebasse:le Parisien, Diego Imbert , autre pointure du jazz made in France.
Frank débutera le set par trois pièces interprétées en solo , dont 'Twisted Nerve' sur la BO du film du même nom, mais également sur le soundtrack de 'Kill Bill'.
Du jazz sur le fil, du travail d'équilibriste: virtuosité, douceur, émotions et inventivité se frôlent.
La troisième composition frise la témérité: un ragtime steeple-chase aux saveurs Stockhausen.
Avec l'arrivée d'Aldo et de Diego commence l'hommage à MP, ils joueront des oeuvres (le bebop 'Training' par ex) du génial pianiste alternant avec des compositions du Titi.
Du Dreyfus jazz séduisant, créatif, tendre ou fougueux, fait d'improvisations audacieuses, d'harmonies complexes ou de lignes d'un classicisme serein.
Les critiques le classent dans le même tiroir qu'un Keith Jarrett ou Bud Powell.
'Le Déserteur' de Boris Vian devient une ballade poignante. Diego semblant jouer de la contrebasse avec tes cellules cérébrales, tendues à l'extrême.
Magnifique!
Aldo, d'une humilité peu transalpine, nous gratifie d'un solo tout en finesse et pour l'oeuvre suivante, le peu bilieux Avitabile y va d'une longue introduction lyrique, avant de voir la rythmique monter à bord et affronter un flow tempétueux.
'Piango , Pay the Man', Aldo fait son Maccione en intro, les potes lui font un signe: t'arrête pas Zio , on arrive, à fond la caisse sur l'autostrada.
Un morceau casse-gueule, couché Johnny, on t'a pas sonné: 'Looking up' .
Cinq étoiles chez Gault Millau!
Va boire une limonade, Aldo!
Un guest: Manu Katché pour 'Cantabile', du swing saccadé pour mettre un terme au banquet.


Standing ovation et double bis!
Le léger 'Childhood Memory' et 'El Camino' qu'Aldo avait écrit pour Claude Nougaro!
Concert brillant!
 Dee Dee Bridgewater

C'est la seconde fois, après l'AB le 8 mars, que tu assistes à l'hommage que Dee Dee rend à Billie Holiday: 'To Billie with love- A celebration of lady Day'.
C'est toujours le pianiste Edsel Gomez qui assume les arrangements, les autres ont changé!
Le grand Kenny Davis se cache derrière sa double bass - handy Craig Handy aux sax ou à la flûte et un remplacement de dernière minute (pas de Lewis Nash): le Frenchie, spécialiste des Big Bands, François Laudet à la batterie.
Très courte intro swing et voilà D D, coiffée d 'un seyant chapeau et fort élégante dans sa robe patchwork.
'Lady sings the blues', a smooth elastic voice ,dixit John Amodeo. Une version sobre et pro.
Elle a de l'humour Miss Bridgewater, elle ferait passer bon nombre de pseudo-comiques hexagonaux pour de lourds provinciaux : 'Lover Man' solo de sax meurtrier et poses de diva effarouchée.
La perle mélodramatique 'Don't explain' .
Même scénario qu'en mars, dirait-on, même si la cantatrice paraît moins exubérante.
'Them there eyes', le swing pendant lequel elle nous refait le coup Armstrong.
Louis, pas Lance!
Le sombre et magistral 'You've changed'.Tu m'aimes plus, mon amour!
'Fine & Mellow' version théâtrale de ce blues féminin. Solo de sax délirant, et Dee Dee, chatte en chaleur, de se frotter au pimp au groove indécent.

Tu riais, Kenny, vais m'occuper de toi, mon mignon: ' My mother's son-in-law' .
Une leçon de drague pendant laquelle elle nous miaule le refrain en français ...le beau-fils de ma mère...
Une version Betty Boop/ comedy capers hilarante, décorée d'une séance d' Ella Fitzgerald scatting.
'A Foggy Day' , bordel, il y a beaucoup de moustiques pour une journée brumeuse, le pauvre Craig en sait quelque chose.
François va prouver aux Yankees qu'il faut pas être né de l'autre côté de l'Atlantique pour manier les baguettes avec art.
C'est dimanche, tous à à l'église pour chanter le gospel 'God bless the child', des tripes, de la passion et Mr Handyman au sax funky.
Adolphe est ravi!
On arrive au terme du voyage: 'All of Me', un dernier swing, permettant à chaque musicien de se mettre en évidence.
Copie quasi conforme du show bruxellois, la magie opère toujours!

Standing ovation, bis!

Et le bis : ' Miss Brown to you',un fringant Music-Hall tune.
Cap sur la capitale!