La fabuleuse page Facebook de Dunkin' Donuts

Publié le 10 août 2010 par Vinsh

Tu sais, j'ai l'air comme ça de donner des leçons à la Terre entière et d'être, par conséquent, un être de lumière tellement supérieur en tout qu'il peut se permettre toute cette condescendance. Alors qu'en fait, pas du tout, je suis un peu grassouillet et pas bien sportif (donc pas bien foutu), chevrotant de la parlotte et riche d'une vie intérieure multiple, puisqu'on est bien une quinzaine à s'engueuler à l'intérieur de mon crâne pour décider de ce qu'on va bien pouvoir faire dans les cinq prochaines minutes.
Aujourd'hui, pour démystifier un peu cette figure inaccessible qu'à coup sûr j'incarne dans tes rêves humides, je vais plutôt te parler du côté grassouillet de la force, parce qu'en fait, pour l'hystérie et les troubles dissociatifs de l'identité, c'est un peu la thématique habituelle, ici, tu vois.
Donc, la graisse.
Il y a trois ans, à Berlin, je suis tombé en pâmoison devant une émanation purulente de la gastronomie américaine, aussi scandaleusement absente de France que Burger King : j'ai nommé Dunkin' Donut. Ou comment une chaîne peut faire du Starbucks, mais en mettant en avant un amas d'huile destiné à accompagner ton café du matin, du midi, du goûter ou du soir : le donut. Sauf qu'en fait, tu prends pas du café à chaque fois, sinon non seulement t'aurais les artères bouchées, mais en plus tu n'aurais pas la moindre chance de réussir à crever de ta crise cardiaque dans ton sommeil. C'est quand même ballot.
D'une certaine manière, heureusement que Dunkin' Donut n'est pas implanté en France, probablement refroidi par les années de dur labeur psycho-sublimino-publicitaire et de travail au corps que McDo a dû fournir pour s'implanter correctement chez nous. C'est que le donut, culturellement, c'est pas très Roquefort.

Mais il y a quelques mois de cela, grâce à ce merveilleux état de fait qui veut que le ouèbe soit oueurld ouaïde (mais si j'écris world wide, tu comprends aussi, non ?), j'ai pu rejoindre la génialissime Fan Page de cette enseigne de sains produits préparés à base d'huile végétale et de céréales : il ne peut rien y avoir de mal à cela, non (hem) ?
Et je ne regrette pas mon clic : avec tous les onglets et contributions des fans (très actifs) de la marque, je trouve à chaque visite une affriolante nouveauté à me mettre sous la dent. Au sens figuré, j'entends, puisqu'on ne peut pas encore faire sortir de la bouffe d'un écran d'ordinateur (perspective futuriste hautement improbable qui me laisse toutefois songeur).

Ainsi, depuis le début de l'année 2010, on a droit au fantastique soutien "bien-être et auto-congratulation" de  Maurice, le donut qui parle (n'est-ce pas fabuleux ??), qui sert de mascotte à la Page. Si vraiment les donuts t'ont fait prendre quinze kilos en deux mois, il continuera à te dire que "you look fabulous", et ça c'est vachement sympa de sa part, je trouve.
On a aussi les fans qui postent des poèmes d'amour à Dunkin' Donut sur le Mur, parce que c'est important, dans la vie, de pouvoir compter sur quelqu'un. Ou ceux qui racontent comment ils ont rencontré leur conjoint au Dunkin' Donut... ou qui l'ont épousé là. Ou encore ceux qui, contre les bégueules qui s'inscrivent sur la page et s'en prennent verbalement à ce temple de l'obésité infantile, défendent vaillamment leur enseigne chérie.
Ou les fans qui envoient des photos d'eux avec leur(s) donut(s), devant leur Dunkin' Donut local, avec leur café Dunkin' Donut... Il y a d'ailleurs un psychopathe qui semble avoir fait le tour des Etats-Unis de tous les établissements de la marque, qui s'est fait prendre en photo devant chacun d'entre eux, et qui a envoyé le tout aux administrateurs de la page (lesquels devraient, je pense, le récompenser en lui offrant une carte de fidélité gold valable à vie) (ou alors, en appelant la police). Je me souviens qu'une nuit de Chômagie, ma pote Lilibuzz et moi avions, au téléphone, fait défiler toutes les photos de la page, en se les commentant simultanément comme nous l'aurions fait d'un album dédié à une soirée "dossier". Et bah c'était au moins aussi marrant.
En gros (hin hin hin), je suis subjugué par la relation bizarrement fusionnelle que Dunkin' Donut a réussi à développer avec ses clients; mais est-ce avec ses clients en général, ou seulement avec ces quelques dizaines de milliers de fanatiques facebookés ?
Mon coeur saigne de ne pouvoir m'inscrire au Dunkin' Perks, pour me faire envoyer un coupon qui me donnerait droit à un verre gratuit d'une de ces boissons qui ressemblent un peu à du beurre fondu avec du Nesquik dedans... Enfin, en vrai, je pourrais m'inscrire, hein, mais bon, le coupon ne me servirait à rien, puisqu'aux dernières nouvelles, non, non, non, les importateurs d'obésité de Dunkin' Donuts ne se sont toujours pas implantés en France.
Mon tour de taille les remercie. Mais pas ma compote de cervelle.