Ste Ludmila était la grand-mère de notre St patron de Bohême, St Venceslas, et elle fut faite étranglée à l'écharpe par la maman d'icelui, "Drahomíra ze Stodor", la femme de son fils "Vratislav", père de St Venceslas (vous suivez?).
Bon, mais revenons à notre église. Alors au début, en la commune de "Vinohrady" y avait pas d'église, et les habitants devaient se rendre en la commune de "Vršovice", dans l'église Ste Mari Magdeleine (devenue St Nicolas lors de la reconstruction gothique de 1374) afin d'assister au culte, pour ceux qui le souhaitaient (assister au culte). Après la bataille de la montagne blanche, les jésuites prirent en main les besoins spirituels des indigènes, et le culte se déroula à partir de la seconde moitié du XVIII ème siècle dans la petite "chaplette de la Ste famille", au bas des escaliers de "Nusle". Mais la population croissant, l'édifice devint exigu, et il fallut rapidement penser à plus grand. Eh oui. Alors que "Vinohrady" était pendant des siècles un champ vide avec quelques hectares de vignoble seulement, la commune devint indépendante (de Prague) en 1849, et connut un réel boom immobilier comme humain au point qu'en 1879, elle devint ville indépendante. En 1884, l'on fonda la paroisse de Ste Ludmila, et en 1885 l'on s'aperçu qu'on n'avait pas d'église (entre autre, parce qu'on n'avait pas d'Internet haut-débit non plus). "Ah ouais, c'est couillon" s'exclama le maire d'alors (eh ouais encore...) aussi l'on célébra temporairement les offices dans la chapelle de l'école communale rue de Belgique.
Signalons encore que l'association de soutien à la construction de l'église votive Ste Ludmila sur les vignobles royaux ("Vinohrady" = vignobles, appellation toujours en vigueur en souvenir de l'implantation en ce quartier de vignobles d'origine bourguignonne par le bon roi Charles IV, au XIV ème siècle) eut pour mission de promouvoir le projet auprès des sponsors individuels comme institutionnels, et les quelques 1000 membres qui la composaient eurent un grand mérite dans la récolte des fonds financiers. Du coup la construction allait bon train, tellement bon train que l'empereur en personne vint (en train) mettre un oeil sur le chantier en 1891. François-Joseph s'exclama "ach ja, sehr schön, wirklich sehr gut gemacht, finden wir". Puis il serra les paluches des notables, et après avoir avalé son cornet de merguez-knedlík-mayo en 3 temps 4 mouvements, s'échappa à l'autrichienne afin d'assister à l'ouverture de la grande "exposition générale" organisée en l'honneur du centenaire de la première expo industrielle de 1791. Quatre ans plus tard seulement, le gros oeuvre était terminé, et le 8 octobre 1893, l'on fit reviendre l'archevêquécardinal "Fanfoué" pour une énième cérémonie. Cette fois-ci notre bougre se fit entourer des évêques de Prague (Bohême) "Ferdinand Kalous" et de "Olomouc" (Moravie) "František Bauer", au motif que la nouba allait être d'enfer, et qu'ils ne devaient en aucun cas louper le festin (ni les majorettes). Et la bamboula fut grandiose.
Et maintenant quelques mots sur l'édifice à proprement parler. Les amateurs d'architecture auront sans aucun doute reconnu le style néogothique à tendance Allemagne du Nord. C'est tout en brique, et c'est du "Josef Mocker" tout craché, avec l'avantage cette fois-ci qu'il ne bousilla rien, vu que c'était du "à partir de rien". Si vous lisez mes publies depuis le début (et je vous en suis gré), alors vous savez que le Seep (Joseph) néogothisa d'innombrables édifices à Prague comme dans tout le pays. Or certains... beaucoup... d'aucuns estiment que ses "interventions" sur ces monuments furent plutôt malheureuses, et que leur restauration (souvent néogothisation) tenaient plus de l'épuration, de l'assainissement, voire de la stérilisation du style originel supprimant à jamais les caractéristiques séculaires.
Passons à la déco, parce qu'il y a plus à dire sur ce sujet. Au dessus des escaliers donc, se trouve un portail d'entrée, au dessus duquel encore se trouve un tympan (de portail).
Dedans, c'est joliment peint, et tout particulièrement dans la nef principale. Maintenant gaffe, parce que selon mes sources, ces peintures seraient d'un certain artiste viennois du nom de "Johann Jobst". Hum... peut-être, sinon que je n'ai trouvé aucune trace de ce bougre. Mais alors aucune du tout. Du coup, soit il avait un autre prénom, un autre nom, ou les 2, ou carrément mes sources sont erronées... Bref, ce qui est sûr (parce que c'est flagrant) ce sont les thèmes. Le premier c'est les saints populaires de notre pays: on peut y voir (entres-autres) St Jean Népomucène, le Cyril et mes Thodes, St Guy et St Zikmund, Ste Agnès, St Ivan et un plus rare 9parce que Morave), St Jean "Sarkander" sur lequel vous pouvez lire plus de détails dans une précédente publie. Pis y a le thème des personnages de l'ancien test amant: on peut y voir (entres-autres) Daniel, Jeremiah, Isaak, Abraham, Ezéchiel, Noé é Tsétera... Du même auteur que j'en suis pas sûr qu'il s'appelait ainsi, on retrouve une série de 9 tableaux dédiés à Ste Ludmila sur les thèmes de sa vie: Ste Ludmila visite les prisonniers, Ste Ludmila rachète les pécheurs, Ste Ludmila soigne les orphelins, Ste Ludmila bâtit des sanctuaires, Ste Ludmila enseigne le savoir à St Venceslas, Ste Ludmila se coupe les ongles des pieds, Ste Ludmila déguste des merguez à la fête de l'oignon, Ste Ludmila se rase les jambes sous la douche avant d'enfiler ses collants, et Ste Ludmila meure étranglée à coup de couteau, l'enquête étant court.
L'autel central en forme de baldaquin néogothique est une oeuvre de "Čeněk Vosmík" (l'Atlas supportant le globe terrestre sur ses épaules à la gare centrale, quelques copies des statues du pont Charles originellement "Brokoff" fecit...) sur une idée 'achement originale de "Josef Mocker" noch einmal.
Pis y a les vitraux. Alors les guides s'extasient dessus, les couleurs, etc... Personnellement... enfin bon. Ils représentent des saints (ben tiens), et tout particulièrement (plus saints que saints) les vitraux du transept, qui représentent les martyrs de Ste Ludmila et de St Venceslas. J'ignore qui en est l'auteur, d'autant plus que certains vitraux n'ont pas survécu les bombardements alliés de la fin de la seconde guerre mondiale. Par contre selon les sources, les thèmes auraient été inspirés par les plus grands artistes de l'époque, genre "František Ženíšek", "František Urban" (les splendides peintures intérieures de l'église St Pierrépaul de "Vyšehrad"), "František Sequens" ou "Adolf Liebscher" (pour changer des François). Par manque de pognon, les vitraux ont été financés par de bienfaisants bienfaiteurs dont la longue liste est précieusement conservée par la mairie de la ville, pour le cas qu'on ne sait jamais, où que des fois ça pourrait servir un jour, genre.
Après son édification, l'église comptait 5 cloches (6 avec le curé). Une Ste Ludmila de presque 3 tonnes, un St Venceslas de 1,3 t, un St Adalbert de 800 kg, un St Procope de 530 kg, et une petite vierge Marie de 78 kg. Toutes 5 sortaient de l'atelier des saintiers "Diepold", et aucune ne survécut les réquisitions des 2 guerres. Enfin si, la petite Marie, mais elle se fêla après la première guerre mondiale et fut fondue. En 1925, l'on remit des cloches au sommet de Ste Ludmila, cette fois des ateliers "Herold" de "Chomutov". Pareil, guerre, réquisition, et seul un petit tocsin vit la libération. Il fallut attendre 1993, afin qu'on réinstalle une nouvelle cloche sur St Venceslas, apparemment don privé, genre "tiens, j'ai une grosse cloche à la maison et chais pas quoi n'en faire. Ben j'vais n'en faire cadeaux à la paroisse. D'toute façon j'peux même pas en jouer après 22h, alors hein, avec tout c'que ça bouffe et l'entretien qu'ça coûte, autant qu'ça profite n'à quelqu'un". Sympa moi j'dis. Mais la cloche privée ne faisait pas assez de ramdam, alors on en installa 2 autres provenant de l'église du sacré coeur laquelle en faisait trop (de ramdam). Et puisqu'on parle de bruit, tiens, parlons un peu de l'orgue (non, je plaisante, je suis un grand amateur de musique d'orgue d'église, surtout en sauce avec des zairelles en qu'on plote). Cet orgue est d'une valeur historique comme musicale inestimables, puisqu'il est le dernier grand orgue de "Emanuel Štěpán Petr" encore en fonction dans son état d'origine (l'orgue, Emanuel Etienne Pierre, lui, est décédé depuis une paire de semaines).
En 1974, nos camarades con-munistes mirent en chantier le métro, et l'église fut fermée pour longtemps. Etait-ce afin d'éviter un éventuel accident, du fait que le trou du tunnel passait sacrément près des fondations de la maison d'à bondieu? En tout état de cause, une telle précaution n'est pas à l'ordre du jour en ce moment avec la construction du tunnel de Blanka, alors qu'elle serait fichtrement bienvenue. Bref, l'on en profita donc pour restaurer l'intérieur. En 1980 l'on posa un nouveau toit en ardoise de Moravie (qu'ils n'aillent pas dire qu'on ne les aime pas, les Moraves), et selon certaines sources, les camarades ingénieurs con-munistes planifièrent la durée des restaurations jusqu'en l'an 2000. Aujourd'hui, une telle durée semble totalement absurde, mais dans le contexte de la planification quinquennale d'avant, dans le cadre des compétences prévisionnelles d'un conducteur de tracteur, et dans les conditions d'expérience du bâtiment dont disposait l'équipe de kolkhoziens agricoles, honnêtement, 20 ans ça pourrait même sembler presque optimiste à y regarder de plus près.
Et maintenant quelques historiettes, anecdotes et autres curiosités. Selon une de mes sources, après la nouba de 1893 de l'archevêquécardinal "František Schönborn", l'on (il?) fit déménager les reliques de St Ludmila et de St Venceslas en notre église. Hum... pas sûr parce qu'aujourd'hui St Ludmila repose en l'église St Georges (au Château) depuis le X ème siècle, tandis que St Venceslas repose en notre cathédrale St Guy (au Château itou) depuis le X ème siècle (itou). Et en dehors du fameux vol de 1142 (cf. "Canonici Wissegradensis Continuatio Cosmae", tout dernier paragraphe), lorsque le maçon et tailleur de pierre Werner ("Wernherus") déroba une partie des reliques de Ste Ludmila (mais son fils les rapporta), je ne me souviens pas que les reliques des 2 saints auraient séjourné ailleurs (même pas à l'expo de Shanghai 2010).
Alors comme dit au tout début, Ste Ludmila n'est pas une exclusivité. Genre si vous faites l'impasse dessus, vos voisins ne vous jetteront pas des pierres non plus. D'autant plus qu'à l'instar de toutes les églises du pays (hors hyper centre ville de Prague, tourisme oblige), elle est généralement fermée. Et pour peu qu'elle soit ouverte, il est interdit d'y photographier.