Cette nuit, l’espace Schengen s’est élargi à vingt-quatre pays

Publié le 21 décembre 2007 par Willy
Cette nuit, l’espace Schengen s’est élargi à vingt-quatre pays





A 00h01 précise ce matin, les frontières entre les huit pays d’Europe centrale et orientale (hors Roumanie et Bulgarie) plus Malte et les anciens Etats membres de l’Union européenne ont été levées, marquant ainsi leur intégration dans «l’espace Schengen». Désormais, on peut circuler librement de Tallinn à Lisbonne, de Varsovie à Brest, que l’on soit européen ou non, les contrôles étant reportés aux frontières extérieures. Dans les aéroports, ils ne seront, eux, levés que le 31 mars, au moment du passage à l’heure d’été, pour des raisons pratiques. Symboliquement, Robert Fico, le Premier ministre slovaque, et Alfred Gusenbauer, son homologue autrichien, ont scié, hier, une barrière à la frontière.

Schengen, c’est quoi ?

C’est le nom d’un village luxembourgeois où fut signé, en juin 1985, un traité entre l’Allemagne, la France et les trois pays du Benelux visant à supprimer les contrôles frontaliers. Ces pays ont ainsi contourné le refus britannique d’étendre la liberté de circulation, prévue dans le traité de Rome, aux simples voyageurs : pour Londres, cette disposition n’oblige nullement à la suppression des contrôles aux frontières, mais permet simplement aux travailleurs européens de s’installer dans toute l’Europe. Londres voyait dans la création d’un espace de libre circulation la préfiguration d’un «super Etat». Il a ensuite fallu cinq ans pour négocier la «convention d’application» de l’accord de Schengen: la suppression des contrôles internes et leurs reports aux frontières extérieures impliquaient des «compensations de sécurité», notamment l’instauration d’une coopération policière et judiciaire. Elle est entrée en vigueur en 1995 pour permettre à tout citoyen européen de voyager en Europe sans contrôle policier.

Qui est membre de l’espace Schengen ?

Tous les Etats membres ont rejoint, les uns après les autres, cet espace. Mais la Grande-Bretagne et l’Irlande (liée à son ancien colonisateur par un accord de libre circulation) persistent à rester en dehors, tout en participant au volet coopération policière. La Bulgarie et la Roumanie, elles, se préparent activement à rejoindre leurs partenaires. Quant à Chypre, elle ne peut accepter que la ligne de démarcation avec la partie nord de l’île occupée par la Turquie devienne une frontière extérieure. Schengen s’est même étendu en dehors de l’Union, les pays nordiques étant liés entre eux par un espace de libre circulation, l’Union a accepté, en 1996, que la Norvège et l’Islande, intègrent Schengen. La Suisse elle-même rejoindra cet espace commun en novembre 2008. Mais le minuscule Liechtenstein, enclavé entre la Suisse et l’Autriche, n’a pas achevé sa préparation ce qui risque de poser un problème.

La sécurité dans l’espace Schengen est-elle assurée ?

C’est l’éternelle question: les contrôles aux frontières empêchent-ils les criminels de circuler et les immigrés clandestins d’entrer ? Pour la criminalité, les policiers ont déjà répondu: la coopération policière est bien plus efficace que des contrôles d’identités aux frontières. Schengen a permis de mettre en place une gigantesque banque de données (le SIS) qui recense toutes les personnes recherchées ou interdites du territoire, les voitures volées, les faux billets, les papiers falsifiés. Aujourd’hui, le SIS compte plus de 20 millions de données accessibles à tous les policiers. En 2009, un second système (SIS II) va intégrer des données biométriques et les Britanniques y seront connectés. De même, les policiers ont obtenu un droit de poursuite transfrontalier, des équipes communes d’enquêtes ont été mises en place, etc. Ce système est complété par la coopération policière mise en place par l’UE (notamment Europol). Pour l’immigration clandestine, il est moins sûr que les contrôles aux frontières extérieures soit une bonne chose, même si elles ont été sécurisées (détecteurs infrarouges, caméras, équipe commune de surveillance, visa commun, etc.). Ilkka Laitinen, le patron de l’agence Frontex, chargée de coordonner la surveillance des frontières extérieures, estime carrément, dans un entretien à l’AFP, que «c’est un choix délibéré de l’UE de se concentrer plus sur la liberté de mouvement des personnes que sur les questions de sécurité.»

A lire également : http://bruxelles.blogs.liberation.fr/coulisses/2007/12/lespace-schenge.html

Par JEAN QUATREMER - http://www.liberation.fr