Crime d'Amour. Sortie belge. Kristin Scott Thomas "satanique"!!!!

Par Michcine
 Synopsis :

Dans le décor aseptisé des bureaux d'une puissante multinationale, deux femmes s'affrontent... La jeune Isabelle travaille sous les ordres de Christine, une femme de pouvoir qu'elle admire sans réserve.
Convaincue de son ascendant sur sa protégée, Christine entraîne Isabelle dans un jeu trouble et pervers de séduction et de domination.
Ce jeu dangereux va trop loin... jusqu'au point de non retour.

En marge de la sortie de ce film, la production nous offre cet entretien avec l'une des plus énigmatiques actrices du cinéma français, une "frenchie", tout aussi mystérieuse que celle qu'elle incarne dans "Crime d'Amour"....mais en mieux! ça, je peux l'affirmer sans me tromper, moi qui ai eu l'occasion de la rencontrer par deux fois. Une femme racée, avec une classe exceptionnelle, froide de prime abord, mais tellement disponible quand elle s'adresse à la presse! Ce furent deux moments inoubliables!

(Ugc Toison d'Or)

Qu’est-ce qui vous a séduit lorsque vous avez lu le scénario de CRIME D’AMOUR ?

Le scénario lui-même. J’ai aimé cette construction, cette mécanique implacable. C’était un vrai thriller au sens classique du terme. Et puis, j’ai beaucoup aimé la perspective d’avoir à jouer un tel personnage. Ça m’amusait de jouer cette femme d’une grande méchanceté qui… est punie à la fin !

Comment la définiriez-vous, justement ?
C’est un magnifique personnage de cinéma. Elle est un peu comme la belle-mère, comme la méchante reine, dans BLANCHE NEIGE. Tous ces rapports de pouvoir, de manipulation, d’ambition, c’est quelque chose qui m’est complètement étranger. Je n’ai d’ailleurs aucune idée de ce milieu-là, des affaires, de la grande finance, ce n’est pas un domaine qui m’attire ni qui m’intéresse. J’ai donc vraiment dû composer quelque chose, et c’est ça qui était excitant.

 
… pour moi, c’est vraiment le jeu du pouvoir et de la cruauté pure…

Qu’est-ce qui, selon vous, domine dans ses rapports avec Isabelle, le personnage que joue Ludivine Sagnier ? Le plaisir de l’initiation, le goût du pouvoiret peut-être même du désir, voire une certaine forme d’amour - il y a en effet quelque chose d’ambigü entre elles qui n’est d’ailleurs jamais précisé ?
C’est amusant parce que cet aspect-là m’avait davantage marquée à la lecture du scénario qu’à la vision du film. Mais sans doute parce que lorsque je vois le film terminé, je ne peux pas m’oublier, je me vois, moi…

Il y a quand même cette scène étonnante du “Je vous aime…“

Justement, je ne la crois pas ! Je ne crois pas à sa sincérité, à ce côté “Je veux être aimée...“ Pour moi, c’est de la manipulation pure.

On se demande aussi s’il n’y a pas, devant les rapports qu’entretiennent Isabelle et  Philippe (que joue Patrick Mille), et qu’elle a pourtant voulus, un zeste de jalousie…

Je la sens surtout complètement machiavélique. La vraie déception, pour elle, c’est de ne pas obtenir le poste à New York. Elle veut être la plus forte, la plus puissante, la première. Le reste ne compte pas… Mais une fois encore, c’est peut-être parce que je me vois, moi. Parce que je me vois composer, jouer… C’est étrange parce que, depuis, j’ai tourné quatre films et j’ai donc un peu de mal aujourd’hui à me souvenir… de ce qui pouvait l’habiter à chaque scène ! D’autant que c’est un personnage que j’ai joué sans difficulté, sur l’intuition, sur l’instant. Le scénario était tellement bien écrit que tout paraissait fluide, clair et évident. Comment j’avais envie de le jouer, comment Alain voulait que je le joue… Même si je ne pense pas qu’il l’avait écrit pour moi, j’avais un peu la sensation que c’était du sur mesure et que, soyons modeste !, le casting était parfait ! La seule chose, c’est que, comme l’intrigue, essentielle dans ce genre de films, est un peu compliquée, que la mécanique est bien huilée, il fallait être très méticuleux, toujours coller au scénario et non pas comme, parfois, sur certains tournages, laisser couler les choses, laisser bouger les scènes et les dialogues… C’était précis, ciselé.

Vous souvenez-vous comment Alain Corneau vous a parlé de ce personnage la première fois et vous a-t-il dit pourquoi il vous avait choisie ?

Il ne m’a pas tellement parlé du personnage finalement. Quant à pourquoi il m’a choisie, il ne me l’a pas dit, il faut le lui demander. Je pense qu’il a dû penser à moi pour le côté international du personnage, pour cette image “froide et belle“ que les gens aiment voir ou en tout cas exploiter… Je me souviens bien en revanche de la lueur qui brillait dans les yeux d’Alain quand il parlait de cette histoire, de sa recherche du crime parfait, du  déroulement de l’intrigue. Il y avait en lui quelque chose d’espiègle. C’était amusant de voir le plaisir qu’il avait à construire cette intrigue, à la tourner, à montrer comment le faible devient le fort, à faire vivre ces personnages un peu hitchcockiens.

De la même manière, on ressent chez vous un plaisir évident, un malin plaisir même, à incarner ce type de  personnages qui reviennent régulièrement dans votre carrière.

Déjà, ce sont des personnages excitants à interpréter sur le strict plan du jeu. Et puis c’est peut-être une manière pour moi d’exorciser mes démons… En fait, je me sens toujours comme une victime donc en jouant ce type de personnages, c’est comme si je prenais ma revanche !

Quel est selon vous le meilleur atout de Ludivine Sagnier pour jouer le personnage d’Isabelle ?
Elle a une sorte de transparence, d’innocence dans le regard dont Alain a très bien su se servir. Elle a une telle émotion à fleur de peau qu’on la croit naïve et innocente. Ça marche très bien pour le film. Sa transformation, son évolution n’en sont que plus fortes. C’était un grand plaisir de jouer avec elle. Elle est vive, précise et très réactive. On a vite été complices et on a même beaucoup ri ensemble. Comme si, avec un tel sujet, une telle histoire, on avait besoin de détendre l’atmosphère, de compenser… C’était très agréable.


Et Alain Corneau, quel type de metteur en scène est-il sur un tournage ?
C’est très particulier de tourner avec lui. Je pourrais dire qu’Alain est comme une batterie, mais ce ne serait pas assez fort. C’est un énorme moteur qui donne de l’énergie, qui donne envie, qui fait bouger les choses. Il est très dynamique sur un plateau. Il est partout. Il est derrière ses moniteurs, sous sa petite tente noire, et on l’entend crier : “Coupez“. Quand on le rencontre, c’est un être absolument charmant, enthousiaste, d’une culture inouïe, un homme doux même s’il est très décidé. Sur un plateau, c’est quelqu’un d’autre. Totalement passionnel. L’épée est sortie et c’est un bagarreur !


Si vous ne deviez garder qu’une image, qu’un moment ou qu’une impression de cette aventure…
L’impression qu’il me reste, c’est ce sentiment d’aller tous les jours dans ce quartier de La Défense, d’entrer dans cet immeuble et de me dire : “Heureusement, je ne fais pas ça pour de vrai ! Je suis une actrice, le soir je peux rentrer chez moi et demain être quelqu’un d’autre et tout oublier de cet univers impitoyable et terrifiant…“ C’était beaucoup plus drôle de faire semblant de faire ce voyage dans les tours de La Défense, surtout en compagnie d’Alain, de Ludivine et de Patrick Mille aussi, qui est formidable dans le film – cette manière qu’il a d’exprimer l’angoisse, le stress, la pression qui pèse sur lui... – que de devoir le faire dans la vraie vie !  J’éprouvais comme un soulagement que ce ne soit “que” du cinéma.

Avec l'aimable autorisation de UGC Espace Pro!