L'étrange destin de François Bayrou

Publié le 20 août 2010 par Lheretique

Orange Sanguine a repris au début du mois un article de Sud-Ouest qui retraçait brièvement une part de l'enfance de François Bayrou.

La diversité des parcours est toujours étonnante au sein d'une même famille. J'ignorais totalement qu'un des oncles de Bayrou, un frère de son père, avait été polytechnicien, ou qu'une de ses tantes, jeune soeur de son père, avait été médecin. Un autre a été mécanicien, tandis que Calixte, le père de Bayrou est un autodidacte agriculteur.

Aujourd'hui, il n'y aurait pas photo : un père autodidacte, un oncle mécanicien, ce serait le déclassement social et l'éclatement de la famille, le polytechnicien ne supportant de cohabiter avec un mécanicien et un agriculteur, ce dernier fût-il lettré.

Mais j'imagine qu'il y a 50 ans, c'était quelque chose de possible. On a l'illusion que les barrière sociales ont sauté aujourd'hui, que tout un chacun devient accessible, et en fait, je crois, bien au contraire, qu'elles n'ont jamais été aussi fortes, parce qu'elles sont inconsciemment intériorisées. C'est même bien pire que cela : les classes sociales vivent dans des mondes séparés avec l'illusion d'évoluer dans le même monde, alors qu'il n'en est rien.

Quand je me représente les repas de famille des Bayrou avec chacun leur livre à table, je repense à ma propre grand-mère. Mes grands-parents, du côté de mon père, étaient de tout petits propriétaires. Pas d'élevage de chevaux, mais quelques vaches, des cochons, et tout de même un cheval de trait. Ma grand-mère et ma grande-tante avaient du toutes deux s'arrêter au certificat d'études. Elles réussissaient bien l'une et l'autre à l'école (elles ont d'ailleurs toujours eu un style et une orthographe impeccables), auraient voulu continuer, mais il n'y avait pas d'argent à la maison pour cela, et mon arrière grand-père ne voulait pas qu'une soeur ou qu'un frère fût plus favorisé qu'un ou qu'une autre. Personne n'alla donc au-delà du Certificat d'études primaires. Mais de ce regret amer, ma grand-mère et ma grande-tante conservèrent une admiration et un goût pour les livres et la culture qu'ils transmirent à une large partie de leur descendance.

Il y avait donc chez mes grands-parents et ma grande-tante des livres, achetés souvent à la sueur de leur front, et il en fallait pour ramasser les bottes de paille, les charger sur la charrue puis les hisser au grenier.

Dans mon enfance, au temps où je concevais sans la moindre hésitation l'existence éternelle de Jésus de Nazareth, j'étais absolument convaincu que ma grand-mère et ma grande-tante étaient nécessairement destinées à être sanctifiées. J'avais d'ailleurs naïvement demande à ma grande-tante un jour si elle était bien une sainte.

Mes grands-parents votaient pour l'UDF. Ma grande-tante, j'en suis moins sûr ; je pense qu'elle a voté à plusieurs reprises à gauche, mais je ne saurais dire quand exactement.

En lisant cette biographie courte et ciblée de François Bayrou, j'ai eu la sensation étrange de retrouver quelque secrète correspondance entre nos deux enfances.

Bon, il est devenu un acteur majeur de la sphère politique, et moi, euh...un illustre inconnu :-)

Mais bon, en dehors de ce léger détail, il y a des ponts :-)