Psychogeographie indoor (18)

Publié le 01 septembre 2010 par Novland


1.
Selon le grand manitou en chef situationniste : Guy Debord, la psychogéographie étudiait les lois, et les contrecoups du milieu géographique sur le comportement affectif de l’homme. Cette ancienne toute nouvelle science prenait forme lors des dérives que ne manquaient pas de réaliser les situationnistes. On les voyait généralement avinés et en bande, traversant hâtivement des ambiances variées, zigzaguant à la recherche d’effets. Ces fameux effets naissaient du frottement que tout corps (tout esprit ?) crée nécessairement en traversant un milieu géographique donné : de l’architecture au mobilier urbain tout en passant par le sens de la circulation automobile.
Une fois trouvés ces effets étaient aussitôt baptisés : « effets psychogéographiques » et le tour était joué. La psychogéographie se pratiquait le plus souvent dans des villes de gabarit imposant (Paris, Amsterdam, Londres…) de préférence dans des quartiers peu prestigieux, non touristiques et habités si possible par des étrangers (des immigrés nord-africains, des exilés espagnols, des juifs parlant encore le yiddish, etc.) On concédera que si tout cela était très beau c’était aussi un peu compliqué pour le quidam qui attend l’autobus sous un chêne centenaire.
Aujourd’hui la psychogéographie est un peu désuète, elle est passée du côté de la nostalgie et du « ludique concerné ». Les vrais psychogéographes se font très rares, l’ivresse n’est plus de saison, les temps sont mornes et les villes sont grosses…

2.

Pour en venir vraiment à ce que vous allez lire plus loin il faut que vous sachiez que je suis le modeste inventeur d’une nouvelle forme de pyschogéographie : la psychogéographie en intérieur, en indoor voire en semi-indoor pour rester en semi-franglais. Cette nouvelle forme n’est pas si simple elle non plus. Tout d’abord en tant que psychogéographe d’intérieur je suis à part, je suis même très à part puisque je suis le seul de mon espèce. Ensuite comme mes illustres prédécesseurs il m’arrive d’être ivre, mais moi je ne supporte pas l’extérieur : le sinistre outdoor. Loin des villes et de leur « brouhaha sociétal », je reste donc le plus souvent caché dans mon cocon où tout en étant souvent las je dérive en très petit intérieur.
En fait si je suis psychogéographe, c’est seulement dans la mesure où ce qui m’entoure agit également sur mon comportement affectif. Les meubles (canapé, commode, bibliothèque) remplacent le mobilier urbain, le papier peint remplace les façades, les pantoufles remplacent les automobiles et les livres remplacent un peu tout le reste. En un sens et en tant que psychogéographe d’intérieur je suis un psychogéographe apostat et schismatique qui plus que Guy Debord ne se reconnaît qu’un seul vrai maître : Xavier de Maistre.

P.-S. Les plus courageux et persistant d’entre vous pourront lire la suite de ce pénible préambule dans un vrai livre palpable et quasiment commercialisé à cette adresse. Le prix sans être modeste restera abordable.