Dream Home : du sang, du sexe et de l'humour à l'Etrange Festival

Par Tred @limpossibleblog
Après les déconvenues Mutant Girls Squad et No Mercy, je me suis rendu sans grande attente à la projection de Dream Home. La fournée 2010 de cinéma asiatique semblait déjà être un mauvais cru pour L’Étrange Festival. Et finalement, en m’y rendant sans attente, et sans même vraiment savoir ce que réservait le film de Pang Ho Cheung (ayant seulement survolé le synopsis du film d’un œil), la sympathique surprise est tombée : c’est bon !
Comment décrire en quelques mots Dream Home pour ceux qui aiment les formules rapides… Disons que c’est un slasher social. Le genre est assez rare pour faire du long-métrage une bizarrerie agréable. Quoiqu’ « agréable » soit un terme mal choisi, étant donné la souffrance (j’adore exagérer) que m’ont apporté les scènes gores du film (que voulez-vous, j’suis une p’tite nature moi). Disons donc plutôt que Dream Home est un slasher social bien fun. Car la souffrance était bien masquée par un esprit corrosif et absurde tirant régulièrement la cloche de l’amusement. On s’éclate, devant Dream Home.
Josie Ho, actrice principale et productrice du film, campe une jeune femme rêvant depuis sa plus tendre enfance de vivre dans un bel appartement avec vue sur la baie de Hong Kong. Mais la prolétaire qu’elle est a bien du mal à accéder à son rêve. Elle trime entre deux jobs et doit s’occuper de son père malade. Mais elle tient à ce vieux rêve. Elle y tient énormément. Elle y tient plus que tout. Elle est prête à tout pour assouvir son rêve. Surtout au meurtre.
Dream Home n’est pas un slasher gentiment linéaire. Il faut s’accrocher pour coller les morceaux (le jeu de mots n’était pas voulu). Le récit est éclaté sur plusieurs époques qui se juxtaposent sans cesse. On navigue entre 2007, 2004, 1997 et 1991, pas spécialement dans cet ordre-là. Chaque époque de la vie de l’héroïne a son importance. Chaque époque pose la pierre qui l’amènera à la situation dans laquelle elle se lance et s’empêtre en 2007. En 2007, elle trucide à tout va. Et pour comprendre pourquoi cette jeune femme qui pourrait sembler si douce et docile se réveille en machine à étouffer, égorger, découper, étriper, voire énucléer (désolé si vous mangiez), Pang Ho Cheung prend un malin plaisir à brouiller les lignes du temps.
Le défaut majeur du film, c’est qu’en faisant cela, il brouille également les cartes de la personnalité de son héroïne. Du coup on a du mal à accepter les facettes contradictoires de la jeune femme. D’une scène à l’autre, elle peut se montrer tantôt femme docile, tantôt tueuse implacable. Sa détermination est toujours contrebalancée par une naïveté qui l’empêche d’apparaître comme un personnage crédible. Ce trait serait rédhibitoire si l’on n’était pas de toute façon dans un slasher ayant de grands moments de fantaisie. Notamment lorsque l’on se trouve en 2007 au cours de cette nuit d’horreur et de sang. Le massacre perpétré est constamment désamorcé par un humour jouissif, de la partie de jambes en l’air se terminant dans le sang à ce type éventré qui semble incapable de mourir, trimballant ses boyaux en mains à travers l’appartement pour grappiller quelques minutes de vie supplémentaire (je me suis déjà excusé auprès de ceux qui mangent ?).
Pang Ho Cheung a également l’intelligence de mettre son récit et son talent de réalisateur (la mise en scène fait preuve d’un soin remarquable) au service d’un discours social fin et amusant. Face à la crise du logement à Hong Kong et la flambée des prix de l’immobilier, cette quête désespérée de standing pour une femme vivant dans la simplicité depuis toujours la rend sympathique malgré ses actes. Et si on faisait ça à Paris ? Un massacre dans un bel immeuble pour faire baisser le prix des apparts ? On y réfléchit et on en reparle ?