La réalité des amours imaginaires

Publié le 05 octobre 2010 par Audinette

Xavier Dolan livre dans « Les amours imaginaires » une vision du trio amoureux qui n’est pas pour nous déplaire. Au départ, un schéma – presque – classique : Marie Camille et Francis, deux amis proches, tombent amoureux de Nicolas, qui a tout pour incarner l’objet de désir parfait, soit, entre autres choses : un charme fou, un goût prononcé pour la poésie, une affection pour les soirs de fête et les grandes virées à la campagne. L’inconvénient avec les objets de désir parfaits, c’est que quand on les aime le fantasme prend le pas sur la réalité. Les deux amoureux transis vont donc être troublés par les signes, réels ou imaginés, que leur renvoie l’arrache-cœur.

« Les amours imaginaires » révèle – ou confirme, d’après ceux qui ont vu « J’ai tué ma mère » – le talent singulier de Xavier Dolan. C’est visuellement très réussi, avec une bande son qu’on voudrait écouter en boucle. Il y a un souffle de légèreté dans cette histoire d’amours contrariés, grâce à un esprit de dérision qui n’enlève rien à la façon dont les obsessions sont dépeintes avec justesse. Surtout dans les courts portraits ponctuant le film. « Je voudrais pas mourir devant hotmail », tout le monde a connu. Chacun s’y reconnaitra et trouvera sans doute de quoi guérir définitivement d’un être sublimé.

Dommage que ça abuse du ralenti sur image. Ça se défend en tant que parti-pris : c’est le reflet de la transfiguration de la réalité opérée par les sujets amoureux, mais ça frôle le concept « ce qui est culte ne peut se passer de ça ».

Le film défend malgré tout très bien ce qu’exprime sa signature d’ouverture : « Il n’y a de vrai au monde que de déraisonner d’amour ». Musset aurait peut-être détesté qu’on l’utilise pour une œuvre qui a un côté bobo-parisien – pourtant c’est montréalais, comme quoi les étiquettes n’ont rien d’intéressant. Ou il aurait soupçonné, certainement à juste titre, que son esprit imprègne un film particulièrement réaliste sur les amours imaginaires.

Les amours imaginaires

De Xavier Dolan avec Monia Chokri, Niels Schneider, Xavier Dolan

1h35