Quand on ne prend plus la peine de déployer ses ailes et de s’envoler de l’autre côté du
périph’ pour enquêter, rencontrer, échanger…. le risque, évidemment, c’est de survoler la
réalité. Et tant qu’à faire en accord avec ses préjugés.
« On veut du polygame coco ! Du polygame qui souffre et qui enfante du délinquant! » « Yes, Sir ! »
En tant qu’oiseau de mauvais augure, je m’étonne déjà qu’il faille des fixeurs pour se
rendre en banlieue. A ce rythme-là, je change de plumage et je deviens fixeur à Palavas-
les-flots. Infiltrer le concours de tee-shirts mouillés, mettre les caravanes sous écoute,
trinquer au petit jaune sous un parasol Ricard avec la famille Groseille…. ça n’a l’air de
rien, mais on a vite fait de se prendre une boule de pétanque perdue dans le gilet pare-
balles. Cri de guerre : « on n’attend pas Patrick ?! ».
Bref, revenons à nos moutons à bec. Les journalistes du Point sont pris en flagrant délit
de bidonnage, piégés par un fixeur professionnel, las des clichetons sur les banlieues
véhiculés par les « médias ». Je ne leur jette pas la pierre : les oiseaux du Point sont
sérieux si l’on en croit leur réputation. De la race des hiboux investigateurs plutôt que des
perroquets qui répètent sans vérifier.
Mais je leur volerai tout de même dans les plumes.
- Règle numéro 1 : une rencontre n’est pas un coup de téléphone.
- Règle numéro 2 : on évite les descriptions physiques quand on n’a pas vu la tronche de la soi-disante femme polygame.
- Règle numéro 3 : on n’oublie pas les bonnes leçons, comme l’agression « antisémite » du RER D.
L’air du temps n’est pas la vérité, même si le mensonge ressemble à la réalité. Le
journaliste a des droits mais aussi des devoirs. A commencer par celui de ne pas pourrir une profession quelque peu malmenée par son absence de rigueur.
La polygamie existe, des femmes en souffrent (voir le rapport de Sonia Imloul). Sera-t-il désormais possible d’en parler sans passer pour des faussaires ?