Sanglots

Publié le 19 août 2007 par Menear
Je me suis réveillé en sursaut il y a quelques jours (peut-être une semaine), allongé sur ce canapé que j'ai récupéré il y a quelques semaines, réveil vraisemblablement causé par l'inconfort lié à ma position dans le dit canapé, mon bouquin de Pascal par terre, j'avais du m'endormir en le parcourant. En le récupérant j'ai remarqué au hasard de la chute que mon livre s'était ouvert sur cette phrase, probablement soulignée par ma grand-mère, propriétaire du livre avant moi :
Qui ne hait en soi son amour-propre et cet instinct qui le porte à se faire Dieu, est bien aveuglé. Qui ne voit que rien n'est si opposé à la justice et à la vérité ? Car il est faux que nous méritions cela ; et il est injuste et impossible d'y arriver, puisque tous demandent la même chose. C'est donc une manifeste injustice où nous sommes nés, dont nous ne pouvons nous défaire, et dont il faut nous défaire.
Il est difficile de pouvoir parler de silence lorsqu'on parle de mon appart : les bruits incessants de la rue, je m'y suis vite fait, ils n'existent plus vraiment pour moi. Mais ce soir-là il y avait autre chose. J'ai entendu quelqu'un pleurer. Ça ne pouvait pas venir de chez moi (j'étais seul), et je voyais mal comment cela pouvait venir du palier d'à côté, sachant que mon voisin est un vieux monsieur plutôt taciturne et que ces sanglots-là me semblaient plutôt féminins. L'étage du dessus, probablement.
Ces pleurs je m'en suis désintéressés par la suite : j'étais crevé et potentiellement bloqué au niveau du cou des suites de mon roupillon inopiné sur le canapé. Bref je suis allé me coucher. Je ne sais plus quelle heure il était, j'ai simplement posé Pascal, déplié le canapé et j'ai éteint la lumière.
Un peu plus tard dans la nuit ça a recommencé. A quelle heure, je n'en sais rien, probablement après trois heures. Toujours est-il qu'après ce nouveau réveil, je n'ai plus pu me rendormir. Qu'un connard klaxonne devant ma fenêtre ou que des abrutis gueulent jusqu'à sept heures du mat' je m'en accommode sans difficulté, mais qu'une bonne femme chiale toute la nuit le nez collé au plancher à l'étage du dessus, ça, je ne le supporte pas. J'ai donc rallumé la lumière et je me suis levé. Après tout ça pouvait être n'importe quoi : une dépression, qui pouvait potentiellement mener à une tentative de suicide, une prise d'otage, une femme battue, une lente agonie mortelle, une secte, un truc comme ça. Pendant un moment, une fois engagé dans l'escalier, j'en suis même venu à croire qu'il s'agissait en fait d'un petit animal ou quelque chose comme ça. La nuit, les sons se déforment, et mon état moyennement frais devait sans doute favoriser cette espèce de déformation sonore...
Une fois arrivé sur le palier de l'appartement geignard, j'ai failli frapper et puis je me suis ravisé. Je me suis découvert, pieds nus, en caleçon, sur le paillasson de cette personne que je n'avais probablement jamais vue pour lui demander d'arrêter de pleurer. Quel genre de type fait ce genre de chose ? J'ai quand même risqué une oreille contre la porte pour vérifier que cet appartement était le bon ; apparemment oui, mais la voix que j'ai entendu à ce moment-là me paraissait plus masculine que précédemment. Je n'ai pas donc su quoi en penser, et ça ne s'est pas amélioré depuis.
Je ne sais toujours pas, à l'heure actuelle, qui a pleuré cette nuit là juste au-dessus de chez moi. Le/la pleureur/euse n'e s'est pas manifesté depuis et je n'ai toujours pas croisé celui ou celle qui vit dans cet appart. Toujours est-il que cette nuit-là (et, soit dit en passant, je ne sais pas réellement pourquoi je raconte cet événement mais qu'importe), je n'ai pas réussi à me rendormir. Au boulot, le lendemain, je crois que ça s'est vu...