Mon nouvel ami fantôme à Paris

Publié le 24 octobre 2010 par Miiiiissk

24 octobre 2010. Je viens d’atterrir à Paris où je passerai le prochain mois.

Parlant de mois, ça fait aujourd’hui un mois jour pour jour que mon papa – le plus fort – nous a quittés. Que mon papa «a décidé de nous quitter», en fait. Et d’arrêter de souffrir.

Ou plutôt, que mon papa, par choix «est décédé». Parce que je ne me suis pas encore fait une tête à savoir si ça mort biologique signifie la fin en soi ou s’il est avec nous d’une quelconque façon. Je souhaite de tout coeur qu’il soit là, avec moi, avec nous, tout le temps. J’espère qu’il me regarde de temps en temps, bien assis sur son petit nuage et que je le fais rigoler quand je fais des gaffes ou que je dis des jokes plates. Mais je ne sais pas.

En cessant de respirer, c’est comme s’il m’avait soufflé «Allez, ma grande. C’est le temps d’y penser, là. Pas de «dernière minute» sur ce coup-là, hein! C’est le temps de décider ce à quoi tu crois.» Ça fait un mois et je n’ai pas encore décidé. Pour le moment, il est là quand ça me tente qu’il soit là. Et il a le dos large:«Pas le temps de me rendre? Ah ben papa doit penser que c’est mieux que je n’y aille pas», «Une contravention évitée de justesse? Intervention de papa!», «Un serveur chiant qui échappe soudainement une soupe sur sa chemise devant tout le monde? Cré papa!» Ainsi de suite…

Aujourd’hui, son dos s’est élargi jusqu’au cimetière du Père Lachaise. Alors que je descendais la rue Gambetta avec M. Paul – un chemin par lequel je suis passée de nombreuses fois en joggant l’an passé – je me demandais comment je réagirais maintenant, quand je me promènerais dans les cimetières. J’ai toujours aimé y marcher, les découvrir. Toujours aimé le calme qui y règne (!). Mais qu’en serait-il maintenant? Maintenant que je comprends la douleur qu’ont pu susciter ces tombes, que je me demande ce qu’il est advenu de toutes ces personnes, que le mot cimetière a maintenant une signification différente et pluridimensionnelle dans mon lexique perso?

J’en étais à peu près là dans ma réflexion quand M. Paul, pointant le mur de pierre qui entoure le Père Lachaise s’est écrié: «Check! On dirait le coyote de Bugs Bunny qui a foncé dans le mur!» J’ai checké et, pour la première fois, j’ai aperçu cet espèce de fossile humain dans la pierre:

Est-ce l’emplacement dédié à un monument temporairement retiré pour restauration? Une sculpture artistique? Sais pas. Et je n’ai pas envie de chercher.

Pour moi, c’était papa qui, de toute la largeur de son dos, me disait: «T’as toujours aimé les cimetières. L’an passé, aller au Père Lachaise, c’était ton p’tit bonheur des crépuscules dominicaux. Veux-tu ben me dire pourquoi ce serait différent maintenant? Si t’as envie de commencer à te faire des histoires, ben je vais t’en faire en dehors du cimetière pour te satisfaire. Kin. V’là un bonhomme qui a l’air d’un fantôme l’autre bord des tombes. Mets sur mon dos toutes les belles affaires qui t’arrivent, ça va me faire plaisir. Mais commence pas à m’utiliser comme plate excuse pour arrêter de faire ce que t’aimais.»

Bien reçu, p’pa D’ailleurs, ce beau soleil qui m’a éblouie quand j’ai détourné le regard de M. Fantôme, je le mets sur ton dos aussi:

Kin toi-même


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