LES SOUFFRANCES d'HAITI

Publié le 26 octobre 2010 par Abarguillet

  


Alors que notre pays est en grève par la volonté de quelques-uns, que les pompes à essence sont en panne, ce qui ne fera qu'aggraver notre déficit financier, que les ordures gisent sur les trottoirs de plusieurs grandes villes françaises, au risque de susciter une épidémie, parce que les éboueurs ne sont pas satisfaits des conditions dans lesquelles ils prendront leur retraite à 62 ans, que nos concitoyens se plaignent d'avoir une vie trop fatigante malgré les RTT, les 35 heures et les avantages acquis, une île des Caraïbes continue de souffrir au-delà de ce qui est humain dans l'indifférence générale. Pour elle et sa population, aucun avantage acquis, aucun avenir, aucun  lendemain qui chante, pas de maison, pas d'école, pas d'eau potable, pas de nourriture... l'infinie pénibilité comme seul horizon, dans un paysage de fin du monde et, ce, malgré l'incroyable dignité de sa population, malgré leurs prières, malgré leur courage. 

Si l'on reparle d'Haïti aujourd'hui, dans quelques journaux, c'est parce que le pays est frappé par une épidémie dont le nom est, chez nous, synonyme de peur ancestrale : le choléra. Pendant des années, cette maladie fit partie du cortège des misères prêtes à s'abattre sur les peuples. Ce choléra arrivait de nulle part dans les guêtres des soldats, à la suite des famines et des guerres. On ne savait rien de sa transmission, on ignorait comment la combattre. À l'égal de la peste, dont il devint le double redouté, le choléra faisait peser des menaces terrifiantes sur des territoires entiers.

Associer Haïti, pays martyr, dont les infrastructures sont encore fracassées, les camps de réfugiés toujours précaires, à ce fléau moyenâgeux qui donne froid dans le dos, prouve à quel point l'île a été laissée dans un quasi  abandon et ,depuis le tremblement de terre qui l'a condamnée à un malheur encore plus grand, combien les aides ont été insuffisantes ou mal coordonnées...

La vague mortelle, qui sévit depuis quelques semaines, a été - dit-on ici et là - endiguée aux portes de Port-au-Prince. Le choléra qui, hier, avait tué plus de 250 personnes, a pu être stoppé juste avant d'atteindre les campements et les abris qui, aux alentours des villes, remplacent les maisons d'autrefois. On ne peut que s'en réjouir. Mais on en vient également à regretter que notre monde ne sache pas s'arrêter plus longtemps sur les causes et les conséquences des catastrophes, au lieu de céder à la lacrymale compassion suscitée juste à  l'instant du drame. Car, que nous révèle ce soudain flash de l'actualité sur Haïti ? Qu'une maladie éradiquée depuis plus de cent ans a refait son apparition et que l'homme du XXIe siècle peut encore plonger dans les affres de l'insécurité la plus totale, malgré les avancées de la science et de la technique. 

Les raisons de ce nouveau malheur sont évidentes : état sanitaire déplorable, eau potable rare ou hors de prix, reconstructions qui tardent. Faut-il donc un cataclysme ou une catastrophe de cette envergure pour que l'on regarde à nouveau, d'un oeil distrait, vers la grande île des Caraïbes, qu'on la considère un tant soit peu et qu'on veuille bien lui prêter secours ? Et surtout que l'on veuille s'intéresser à la redistribution des aides et aux structures qui les gouvernent. Cette île qui vit s'émerveiller Christophe Colomb, qui fut la première à se libérer de l'esclavage, qui fut liée à la France par d'innombrables souvenirs heureux et malheureux, devra-t-elle encore et toujours tourner vers nous son beau visage ravagé ?

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