La publication du classement mondial de la liberté de la presse par Reporters sans frontières

Publié le 16 novembre 2010 par Unpeudetao

L’Union européenne perd son statut de leader

Reporters sans frontières a exprimé à plusieurs reprises son inquiétude face à la dégradation de la situation de la liberté de la presse dans l’Union européenne.
Le classement 2010 confirme ce constat. Sur les vingt-sept pays membres de l’UE, treize pays se trouvent dans les vingt premiers. Quatorze pays sont sous la vingtième place et certains se retrouvent même très bas dans le classement : Grèce (70e), Bulgarie (70e), Roumanie (52e), Italie (49e). L’Union européenne n’est pas un ensemble homogène en matière de liberté de la presse. Au contraire, l’écart continue de se creuser entre les bons et les mauvais élèves. Plusieurs pays démocratiques où Reporters sans frontières avait signalé un certain nombre de problèmes ne connaissent aucune progression. Il s’agit, en premier lieu, de la France et de l’Italie où incidents et faits marquants ont jalonné l’année en cours, confirmant leur incapacité à renverser la tendance : violation de la protection des sources, concentration des médias, mépris et même impatience du pouvoir politique envers les journalistes et leur travail, convocations de journalistes devant la justice.

L’Europe du Nord toujours en tête

Cette année encore, plusieurs pays se partagent la première place : Finlande, Islande, Norvège, Pays-Bas, Suède et Suisse. Ils ont déjà occupé la première place du classement depuis sa création en 2002. La Norvège et l’Islande ont toujours été premiers du classement, sauf en 2006 pour le premier et en 2009 pour le second. Ces six pays montrent l’exemple en respectant les journalistes et les médias mais également en les protégeant face à la justice. Ils continuent même à progresser, comme l’Islande qui a proposé un projet de loi exemplaire et unique au monde en la matière : « Initiative islandaise pour les médias modernes » (IMMI, Icelandic Modern Media Initiative). Un pays comme la Suède se distingue par son cadre légal (l’Acte sur la liberté de la presse) particulièrement favorable à l’exercice du métier de journaliste, la force de ses institutions et le respect des contre-pouvoirs, dont la presse, dans le bon fonctionnement de la démocratie.

Dix pays où il ne fait pas bon être journaliste

Si les années précédentes, Reporters sans frontières pointait le doigt sur le trio infernal, Erythrée, Corée du Nord, Turkménistan, les mauvais élèves forment, cette année, un groupe plus large de 10 pays, dont les écarts entre eux sont plus resserrés, marqués par les persécutions contre la presse et l’absence totale d’informations. La situation de la liberté de la presse n’en finit pas de se détériorer et il devient de plus en plus difficile de les distinguer les uns des autres et d’établir une hiérarchie. En 2010, l’écart de points entre les dix derniers pays est de 24,5 alors qu’il était de 37,5 points en 2009 et de 43,25 points en 2007. A noter que pour la première fois depuis la création du classement annuel en 2002, Cuba ne fait pas partie des dix derniers.
Cette progression est principalement due à la libération de 14 journalistes et 22 militants pendant l’été 2010. La situation sur place, cependant, n’évolue guère, la censure et l’oppression étant toujours le quotidien des dissidents politiques et des professionnels de l’information.

La Birmanie, où une élection parlementaire doit se tenir en novembre prochain, n’offre aucun espace de liberté et répond, aux rares tentatives d’informer, par la prison et les travaux forcés.

Il faut enfin souligner que plusieurs pays ouvertement en guerre, théâtres d’un conflit larvé ou d’une guerre civile (Afghanistan, Pakistan, Somalie, Mexique) voient des situations de chaos se pérenniser, s’ancrer une culture de la violence et de l’impunité où la presse est une cible privilégiée. Dans ces pays, parmi les plus dangereux au monde, les journalistes sont directement visés par les belligérants, comme le montre la prise d’otage de Stéphane Taponier et Hervé Ghesquière, retenus en Afghanistan depuis maintenant 300 jours.

Croissance économique ne vaut pas liberté de la presse

Si le développement économique des BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) est assez semblable, le classement 2010 a révélé une importante disparité des situations de la liberté de la presse. Le Brésil (58e), qui jouit d’une évolution législative favorable, progresse de 13 places par rapport à 2009 tandis que l’Inde chute de 17 places et se retrouve en 122e position. La Russie, particulièrement meurtrière l’année précédente, occupe toujours une place médiocre (140e).
La Chine, quant à elle, même si elle connaît une blogosphère d’une étonnante vitalité et de plus en plus mobilisée, continue de censurer, d’emprisonner les voix dissidentes, et stagne à la 171e place. Ces quatre pays endossent désormais les responsabilités des puissances émergentes et doivent tenir leurs obligations dans le domaine des droits fondamentaux.

De très fortes chutes

Philippines, Ukraine, Grèce et Kirghizstan voient leur position dans le classement se dégrader fortement. Aux Philippines, le massacre d’une trentaine de journalistes commandité par un baron local ; en Ukraine, la lente et sûre détérioration de la liberté de la presse depuis l’élection de Viktor Ianoukovitch en février 2010 ; en Grèce les troubles politiques et les violences subies par plusieurs journalistes, et au Kirghizstan, la campagne de haine ethnique dans un contexte de confusion politique expliquent ces fortes chutes dans le classement. Les évolutions sont malheureusement souvent en trompe-l’œil. Certains pays dont la position dans le classement s’améliore nettement retrouvent en réalité leur place traditionnelle après une année 2009 difficile, voire désastreuse.
C‘est le cas, par exemple du Gabon (+22), de la Corée du Sud (+27) ou de la Guinée-Bissau (+25).

 
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 Le classement complet sur le site de Reporters Sans Frontières :

http://fr.rsf.org/press-freedom-index-2010,1034.html