Leçon de sagesse : le pot fêlé

Publié le 21 novembre 2010 par Richardlefrancois

Une vieille paysanne n’avait pour seule richesse que deux grandes jarres pour aller puiser l’eau.
L’une des jarres était fêlée, alors que l'autre, intacte, rapportait toujours dans sa panse rebondie une pleine ration du précieux liquide.


Chaque matin la femme allait au ruisseau, chacune des jarres suspendue au bout de la perche qu'elle portait en balancier de part et d’autre du cou.

 
Au terme de la lente marche de retour, du ruisseau au logis, la jarre fêlée n'était plus qu'à moitié emplie d'eau.
Jour après jour, le manège se poursuivait au pas chaloupé de la vieille qui, de fait, ne ramenait chez elle qu'une jarre et demie d'eau.


La jarre intacte était très fière de la perfection de ses formes et de sa performance alors que l’humble jarre fêlée se sentait bien misérable de ne retenir qu’une demie ration d’eau.

Alors qu'elles étaient près du ruisseau, après des années de ce qu'elle percevait comme un honteux échec, « la fêlée » humblement s'adressa à la vieille. « J'ai honte de moi. Mon corps imparfait laisse l'eau s'échapper tout le long du chemin. Pourquoi me gardes-tu ?»

Étonné, le visage de la vieille s’éclaira d’un sourire ô combien malicieux.
« As-tu remarqué ces fleurs de ton côté alors qu’il n'y en a pas de l'autre? J'ai toujours su à propos de ta fêlure… », dit-elle dans un murmure.

« J’y ai vu un signe et j’ai cru le comprendre. J'ai semé des graines de ton côté afin que chaque jour, lors du retour vers la maison, ton eau les arrose. Durant toutes ces années, saisons après saisons, j'ai pu ainsi cueillir ces superbes fleurs que je vends au marché et qui décorent ma table. Sans toi et ta fêlure je n'aurais pu avoir ces bouquets parfumés».


Une perle d’eau claire en larme attendrie s’échappa de la jarre, roula sur le long du col et se perdit dans l’herbe.


Chacun de nous a ses propres manques et ses propres fêlures par lesquelles s’écoulent les forces de la vie.
Chacune de ces particularités, chacune de ces imperfections et chacun de ces manques arrosent à notre insu les bas côtés de nos parcours.
Allons, salut à vous, amis fêlés, essuyez vos yeux!
Boiteux, blessés de la vie, artistes, poètes, distraits, originaux et autres imparfaits, que cette journée vous soit douce !
Prenez le temps de remarquer ces fleurs qui bordent votre chemin!
Pour ma part, je m’en vais de ce pas en cueillir quelques unes pour en faire un bouquet que j’appellerai différence, que j’appellerai tolérance, que j’appellerai destinée ou que j’appellerai tout simplement « La Vie ».

http://planete.qc.ca/henripull/henripull-5102006-112822.html