Alain Menu: "Je déteste perdre"

Publié le 11 janvier 2008 par Jacqueline Favez & Yves Blanc
En 1984, Alain Menu entrait dans la prestigieuse école de pilotage Winfield. Vingt-quatre ans plus tard, le pilote suisse le plus titré en catégorie tourisme continue à gagner des courses. Et il adore ça... «En fait, ce n’est pas tant que je veux absolument gagner, c’est juste que je déteste perdre», explique le Genevois, avec un petit sourire taquin. «Du coup, ça ne me laisse pas tellement d’autres solutions que d’être devant!»


Et, devant, il l’aura été pas moins de cinq fois, la saison passée, au volant de sa Chevrolet Lacetti avec laquelle il a disputé le championnat du monde des voitures de tourisme, le FIA-WTCC. Cinq victoires superbes, remportées à Zandvoort (NED), Pau (F), Porto (P), Brands Hatch (BG) et Macau (CHN).
De son côté, le Champion du monde en titre, le Britannique Andy Priaulx, n’a remporté que trois courses. Mais il compte quand même 23 points d’avance sur Alain Menu, qui a pris pour sa part la 6e place au classement général du Championnat du monde.
Alors quoi? Qu’est-ce qu’il fiche, notre Suisse? Cette question me brûlait les lèvres depuis la fin de la saison. Je n’ai donc pas pu m’empêcher de la poser au pilote, rencontré cette semaine à deux pas de chez lui. «Trop d’abandons et trop de courses où je ne finis pas dans les points», résume-t-il. Bon, mais ça, on s’en doutait bien, qu’il fallait davantage de points pour remporter le titre. Mais encore?
Après un premier week-end de galère au Brésil, les Chevrolet ont bien marché à Zandvoort. La réaction de la FIA ne s’est pas faite attendre: les Chevrolet ont reçu un petit lest de 25 kilos, histoire de les calmer un peu. «Après, ils ont fait la même chose à Alfa. A ce moment-là, je me suis dit que la FIA n’avait pas envie de nous voir gagner et j’ai donc changé mon fusil d’épaule en visant un maximum de victoires.»
Quitte à, parfois, renoncer à marquer des points dans une course pour éviter de prendre du lest pour le week-end suivant (règlementaire, celui-là, et attribué aux pilotes en fonction de leurs résultats du week-end). «Je l’ai fait quand je pensais que les circuits à venir allaient convenir à la Chevrolet. Après coup, je pense que c’était un mauvais calcul: vu l’avance avec laquelle j’ai décroché les poles, j’aurais pu embarquer du lest, ça n’y aurait rien changé.» Après coup aussi, Alain Menu a refait ses calculs et a recompté tous les points qu’il aurait pu marquer s’il ne s’était pas «laissé glisser» vers l’arrière du peloton pour éviter ces lests. «Je serais arrivé à Macao avec quelque chose comme 12 points de retard sur Priaulx, avant les deux dernières courses, et non 22. Ce qui change complètement la donne.»
Mais avec des si... Alain Menu n’est pas du genre à ruminer des regrets, ni à nourrir de l’amertume par rapport à la décision de la FIA (qui est revenue en arrière en cours de saison, ôtant 20 kg à toutes les tractions) ou par rapport au fait qu’il ait été «sorti» plusieurs fois par ses petits camarades l’an dernier («En fait, en piste, c’est très correct»), ni même à regarder derrière lui.
Ce qui compte, c’est la saison 2008, qu’il passera de nouveau à bord de sa Chevrolet Lacetti et de nouveau sur les circuits du championnat du monde FIA-WTCC. Avec le titre en vue, cette fois-ci? «Cela a toujours été le but, explique le Genevois. Mais avec Seat, qui a passé au turbo-diesel, et peut-être BMW qui va en faire de même, ça va être difficile. La Lacetti a subi une grosse évolution entre la saison 2006 et la saison 2007. Cet hiver, il y a encore eu du travail effectué dessus mais la progression sera sans doute moins nette.»
A voir... Hier et aujourd’hui, Alain Menu était à Valence pour des essais. Il y en aura ensuite encore durant deux semaines, en Espagne, puis au Portugal. Et puis, ce sera la première course, au Brésil. Dans deux petits mois.


Les prochaines semaines ne vont donc pas laisser beaucoup de temps au Genevois pour profiter d’être enfin dans «ses» murs. Car Alain Menu est de retour en Suisse, après avoir habité en Grande-Bretagne pendant de nombreuses années. «Je ne me voyais pas vieillir en Angleterre, dit-il. Et ma femme Caroline non plus. Du coup, nous avons envisagé un retour à Genève et ça s’est fait progressivement.» Du reste, le pilote avoue en souriant que suivre le chantier de sa maison lui aura pris presque plus de temps que son métier, ces derniers temps.
Alors, maintenant que les travaux et le déménagement sont derrière, le pilote va donc avoir l’esprit libre pour se concentrer... sur le titre de Champion du monde...!
Jacqueline