Départ

Publié le 12 janvier 2008 par Antigone

Voici un texte écrit sous l'impulsion de la consigne 61 du site Paroles Plurielles.

Il fallait s'inspirer de la photo ci-dessous et de l'incipit suivant  : "J'ai bien fait le tour de la question".

J’ai bien fait le tour de la question, mais rapidement, très rapidement. J’ai tourné trois fois les mots dans ma bouche avant que de les dire ; ils sont sortis tout seuls, sans efforts.

« Non, c’est moi qui pars ».

Il n’a pas fait un geste. Il est resté prostré dans son fauteuil, encore étourdi sans doute, par l’ampleur de sa propre déclaration matinale : « Je ne t’aime plus, Rosa, je veux partir. Nous perdons notre temps ensemble. »

J’ai réfléchi ensuite, longuement, toute la journée, au bureau, tout en classant des papiers, en répondant au téléphone, sur l’énormité de ce que j’avais dit, sur tout ce que cela impliquait. Il me devait bien ce temps de réflexion, cette porte fermée, ou plutôt claquée, silencieuse, qui avait ponctué ma phrase et clos la conversation.

Il me devait bien la peur.

J’ai pris tout mon temps pour rentrer, le retrouver dans cet appartement immense où chacun avait fait son nid petit à petit, inconsciemment, l’un à côté de l’autre, sans se toucher. J’ai pris tout mon temps pour lui redire, « C’est moi qui pars. ».

Je ne me doutais pas que ce serait si simple, que je tenais à si peu de choses.

Je ne me doutais pas qu’un jour, aujourd’hui, il me suffirait de pousser des battants de volets en bois, pour respirer et sentir sous mes paumes les battements de cœur de l’été. Je ne me doutais pas que ma vie avait encore tellement de possibles, inexploités.