Les créations folles de Laurent Craste

Par Thomas Ka

« L’objet décoratif est au cœur de ma pratique artistique. Ma recherche est centrée sur l’exploration conceptuelle des multiples strates de signification des objets décoratifs de collection, dans leurs dimensions sociologiques et historiques, mais également idéologiques et esthétiques. Cette approche s’incarne dans une réappropriation des archétypes historiques de la céramique. Mon travail de recherche considère l’objet comme un révélateur social, un “porteur de signe”1, et je me sers des archétypes historiques comme d’un matériau à part entière dans une démarche de questionnement du statut de l’objet de collection.

Ainsi, je puise à même le répertoire des modèles originaux des grandes manufactures européennes de porcelaine des XVIIIe et XIXe siècles2, et j’utilise ces modèles soit en les soumettant à une pratique de déconstruction et d’altération violente de leurs structures formelles, soit en détournant et en contaminant leurs motifs décoratifs traditionnels par un processus subversif de substitution du sujet. C’est dans cette approche de l’image et du décor que j’ai développé récemment une pratique interdisciplinaire dans laquelle objets et vidéo se combinent d’une façon tout à fait originale, en utilisant les modèles céramiques comme écrans de projection pour des motifs décoratifs animés.

Ces corruptions, tant formelles qu’iconographiques, si elles remettent en question les valeurs historiques, sociales, politiques et esthétiques de l’objet décoratif, révèlent également un rapport personnel à l’objet aussi intense qu’ambigu. »

1 Moles, Abraham A. 1972. Théorie des objets.
2 La manufacture de Sèvres, ainsi que celle de Pierre Louis Dagoty, fournisseur de l’impératrice Joséphine et dépositaire du « bon goût » à l’époque impériale, retiennent particulièrement mon attention.

Source : http://www.galeriesas.com/spip.php?article485