Maroc-Algérie : la question des frontières ramenée sur le tapis

Publié le 08 décembre 2010 par Robocup555

Tindouf, où se trouvent les camps de séquestration de nos compatriotes sahraouis ainsi que nos prisonniers de guerre, est marocain. Le Touat, La Saoura, Tidikelt, aussi. Ce sont des territoires marocains que la puissance coloniale française a annexés et que l'Algérie indépendante a toujours refusé de rétrocéder.
Pour poser le problème dans sa globalité, il faut considérer l'ensemble de notre contentieux territorial avec nos voisins, dans ses limites géographiques et son évolution historique. C'est toute la question, jamais résolue, des frontières algéro-marocaines. Cette question a une histoire, d'abord coloniale, puis bilatérale, entre deux pays indépendants.


À l'inverse du système du Protectorat, par définition provisoire, imposé au Maroc, l'Algérie était une colonie. La France pensait y rester éternellement ou, pour le moins, plus que les cent trente-deux ans de présence effective. Elle a alors étendu le territoire algérien au détriment du Maroc, mais aussi de la Tunisie, de la Mauritanie, du Mali et du Niger. Cette extension était d'autant plus facile que ces pays dépendaient de la même métropole. Elle s'est faite à différents moments de la colonisation. Elle a pu se faire en ce qui concerne le Maroc, au moment où celui-ci était le plus affaibli. Il l'était, précisément, après la bataille d'Isly, en mai-août 1844.


L'issue de la bataille est scellée en une demi-journée. C'est le début de l'effondrement progressif de l'indépendance de l'Empire chérifien.
Aujourd'hui, cela semble tellement loin. Mais cette première grande défaite depuis des siècles d'invincibilité militaire, nous la devons à nos frères algériens.
C'est pour avoir prêté aide et assistance, sans réserve, à la résistance algérienne conduite par l'Emir Abdelkader, que le Maroc, sous le règne de Moulay Abderrahmane, s'est attiré les foudres de la France. L'histoire officielle algérienne a été revue et “corrigée", à partir d'une crise identitaire mal assumée. La vérité historique, elle, est têtue.


Toujours est-il qu'après l'épisode catastrophique d'Isly, le Maroc ne pouvait plus qu'entériner ce qu'il avait toujours refusé. À commencer par la révision et le traçage, à son détriment, de ses frontières avec “l'Algérie française". Ce fut le traité de Lalla Maghnia, conclu le 18 mars 1945.
Un diktat de vainqueur à vaincu, qui a amputé le Maroc d'une partie de ses confins subsahariens, dont, justement, Tindouf, le Touat, la Saoura et Tidikelt. Ce sont les régions qui englobent Hassi Beïda et Bechar, noms de localités où se sont déroulés les affrontements de la guerre des sables, en 1963, et que la mémoire collective marocaine a le plus retenus. C'est cet héritage que l'Algérie estime nécessaire de conserver, en y greffant de nouvelles prétentions sur nos provinces sahariennes.
En termes juridiques, et pour être plus précis, la formule consacrée est celle-ci: “Les frontières des États nouveaux doivent être établies d'après les limites des anciennes puissances coloniales auxquelles ces États succèdent".
Contrairement à l'Algérie, éparpillée en principautés, puis sous gouvernorat turc pendant plus de quatre siècles, avant d'être un département français durant treize décennies. Le Maroc, lui, n'est pas un “État nouveau". Pour être précis, il n'est pas, à la différence de l'Algérie, un État issu de la décolonisation. Le Maroc, État millénaire, se devait donc de se retrouver dans ses frontières d'avant la courte parenthèse du Protectorat français.


Cette aspiration est d'autant plus légitime qu'elle est soutenue par une série d'accords passés avec l'Algérie avant et après l'indépendance de celle-ci.
Le Maroc, suivi en cela par la Tunisie, s'est engagé vis à vis du GPRA (Gouvernement provisoire de la République algérienne) à ne soulever la question frontalière qu'après l'indépendance de l'Algérie. En retour, l'Algérie a admis que l'espace territorial qu'elle allait hériter de la France n'était pas opposable à ses voisins en général et au Maroc en particulier. Mieux. Cet engagement, quelque peu général, a été confirmé et spécifié par une convention bilatérale entre le Maroc et le GPRA où celui-ci réaffirme que “les accords qui pouvaient intervenir à la suite de négociations franco-algériennes ne sauraient être opposables au Maroc quant aux délimitations territoriales algéro-marocaines".
Une convention qui devait être confirmée par le premier président de l'Algérie indépendante, Ahmed Ben Bella, lors d'une visite de feu Hassan II à Alger, en mars 1963. Le même Ben Bella a renié, quelques mois après, tous les accords passés avec le Maroc. Ce fut la guerre des sables. Il faut rappeler qu'aujourd'hui, et après avoir été assigné à résidence pendant quatorze ans par Houari Boumediane, puis exilé par Chadli Benjedid, Ahmed Ben Bella reconnaît son erreur et la légitimité des revendications territoriales marocaines, du moins pour ce qui concerne le Sahara.

Il aura fallu, donc, passer par une guerre pour conclure un “traité de fraternité, de bon voisinage et de coopération" avec l'Algérie, à Ifrane, le 15 janvier 1969. Malheureusement, il n'y aura ni fraternité, ni bon voisinage, ni coopération, et ce, malgré une deuxième rencontre au sommet, à Tlemcen, le 27 mai 1970.


En 1972, on a cru tenir enfin le bon bout avec la convention définissant la frontière algéro-marocaine à l'issue d'une réunion, toujours au sommet, à Rabat, le 15 janvier de la même année. Cette rencontre, qui avait suscité beaucoup d'espoirs de normalisation fera long feu.
Et pour cause. Nous sommes dans l'Algérie de Boumediene, celui par qui “l'affaire" du Sahara est arrivée. Celui-là même qui déclarait, en 1974, à un an de la Marche Verte, n'avoir aucune prétention sur le Sahara marocain et qu'il encouragerait tout arrangement sur ce sujet entre le Maroc et la Mauritanie. Tout comme Ben Bella en 1963, Boumediene fera volte-face en 1975. Il hébergera, encadrera et armera les séparatistes du Polisario, après en avoir été le co-créateur. Entre le Maroc et l'Agérie, l'histoire fait plus que bégayer. Elle s'enlise pour ne plus se désembourber. Au litige frontalier, toujours vivace et impossible à occulter, est venu s'ajouter le conflit autour du Sahara marocain.

Chadli Benjdid, successeur de Houari Boumediane mort en 1979, s'appliquera à apurer tous les contentieux frontaliers de l'Algérie avec ses voisins. Ce sera fait avec la Tunisie, le Niger, le Mali et la Mauritanie. Mais pas avec le Maroc. Lors du voyage de feu Hassan II à Alger, en 1988, la convention de 1972 sur les frontières algéro-marocaines, est ramenée sur le tapis. On est à deux doigts de la normalisation.

Dans le discours du Trône de la même année, le défunt Souverain évoque la nécessité d'inaugurer une nouvelle ère entre les deux pays. Un vent d'optimisme souffle sur le Maghreb, particulièrement après la création de l'UMA (Union du Maghreb arabe), à Marrakech, en 1989. Puis plus rien. L'Algérie n'ayant montré aucun signe d'assouplissement au sujet de notre intégrité territoriale. Les accords de 1972 sur les frontières ne seront jamais ratifiés par aucun parlement marocain.

On en est encore là, quarante ans après l'indépendance de l'Algérie. La fixation maladive sur le Maroc a eu raison d'une dizaine de présidents et de semi-présidents algériens.

Elle n'a pas pu non plus être estompée ni même atténuée par la guerre civile qui a  ravagé ce pays depuis 1992.


Le contentieux avec l'Algérie reste donc entier, avec ses deux facettes frontalière et saharienne. Après la réintégration du Sahara, il faudra bien que le Maroc récupère ses territoires spoliés aux confins des frontières algériennes, jamais définies.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Fronti%C3%A8re_entre_l%27Alg%C3%A9rie_et_le_Maroc