Avicenne : l'homme volant

Publié le 12 janvier 2011 par Joseleroy

J'avoue ne pas être un spécialiste de la philosophie d'Avicenne mais j'ai toujours été intéressé par ce petit texte : l'homme volant.

Avicenne imagine un expérience de pensée, celle d'un homme étant crée soudainement en train de tomber dans l'espace. Supposons que cet homme ne voit pas son corps ni ne sente l'air. Eh bien , il serait certain d'exister mais n'aurait aucune idée de son corps.
Autrement dit, par cette petite expérience de pensée, Avicenne veut démontrer que ce que nous sommes n'est pas un corps mais une âme autre que le corps.

Et ce que nous sommes n'a ni longueur, ni largeur, ni profondeur; ce que nous sommes n'a aucune taille.
"Il faut que l'un de nous s'imagine qu'il a été créé d'un seul coup, et qu'il a été créé parfait, mais que sa vue a été voilée et privée de contempler les choses extérieures. Qu'il a été créé tombant dans l'air ou dans le vide, de telle sorte que la densité de l'air ne le heurte, dans cette chute, d'aucun choc qui lui fasse sentir ou distinguer ses différents membres lesquels, par conséquent, ne se rencontrent pas et ne se touchent pas. Eh bien ! qu'il réfléchisse et se demande s'il affirmera qu'il existe bien, et s'il ne doutera pas de son affirmation, de ce que son ipséité existe, sans affirmer avec cela une extrémité à ses membres, ni une réalité intérieure de ses entrailles, ni cœur, ni cerveau, ni rien d'entre les choses extérieures. Bien mieux, il affirmera l'existence de son ipséité, mais sans affirmer d'elle aucune longueur, largeur ou profondeur. Et s'il lui était possible, en cet état, d'imaginer une main ou un autre membre, il ne l'imaginerait ni comme une partie de son ipséité, ni comme une condition de son ipséité. Or tu sais bien, toi, que ce qui est affirmé est autre que ce qui n'est pas affirmé. Et la proximité est autre que ce qui n'est pas proche. Par conséquent, cette ipséité dont est affirmée l'existence a quelque chose qui lui revient en propre, en ceci qu'elle est lui-même, par soi-même, non pas son corps et ses organes qui, eux, ne sont nullement affirmés. Ainsi a-t-on l'occasion d'attirer l'attention sur une voie qui conduit à mettre en lumière l'existence de l'âme comme quelque chose qui est autre que le corps, mieux qui est autre que tout corps. Et que lui, il le sait et le perçoit. S'il l'avait oublié, il aurait besoin d'être frappé d'un coup de bâton."
Avicenna's De Anima, livre I, chapitre 1, trad. Souad Ayada

Je vais surement faire dire à Avicenne plus que ce qu'il voulait signifier par son expérience de pensée mais je pense que l'expérience du saut en vol libre doit provoquer une sensation d'espace grisante.
J'avais une amie bouddhiste qui avait un satori chaque fois qu'elle sautait en parachute , ce qui faisait cher la scéance de méditation.... En effet, en vol libre, il y a juste l'espace avec le paysage qui se rapproche et une immense vacuité.