Fabienne Labrette-Ménager, Député et chef d’entreprise….un modèle de femme dynamique et « audacieuse »

Publié le 14 janvier 2011 par Lmanagement

Fabienne Labrette-Ménager, député de la Sarthe, chef d’entreprise et mère de famille, nous apporte sa vision « audacieuse » sur son parcours politique et entrepreneurial.


Politique

- Député de la Sarthe
Vice-présidente de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

- Vice-Présidente du Conseil Général

Entreprise

- Administrateur de sociétés

Pourriez-vous nous rappeler en quelques mots votre parcours ?
Je suis née à Paris de parents chefs d’entreprise. Originaire de la Sarthe par mes grands-parents maternels qui vivaient à Fresnay-sur-Sarthe. J’y suis revenue  m’y installer depuis plus de 22 ans au côté de ma mère.

J’ai été élevée dans l’esprit de l’engagement « politique », puisque j’ai le souvenir de mon père qui collait des affiches durant les années 70.

Dès l’obtention de mon bac, je suis partie un an aux Etats-Unis, à Philadelphie, pour parfaire mon anglais. Aujourd’hui, cela peut paraître normal mais à l’époque, en 1979, c’était très rare !
A mon retour en France, j’ai travaillé dans le tourisme et en tant que responsable Export.
Puis, à 33 ans, j’ai décidé de reprendre des études et j’ai obtenu un DESS en Marketing des services.

En 1996, j’ai créé une entreprise de travail temporaire afin d’aider à l’insertion professionnelle au travers de parcours individualisés.  Nous avons ainsi développé jusqu’à trois agences.

Enfin en 2002, j’ai créé une société de commercialisation de produits du terroir. C’est à cette époque que j’ai choisi également de revenir vers un engagement ancien en faveur de la vie politique. Ainsi, en 2001, j’ai été élue conseiller général du canton de Fresnay-sur-Sarthe, puis en 2004, élue au conseil régional et enfin, en 2007 Député.

Elue Député six ans seulement après votre « engagement politique » et de surcroît à l’âge de 46 ans, ce qui fait de vous la plus jeune députée: comment pouvez-vous expliquer ce parcours si rapide ?

Il est vrai que mon parcours politique a été très rapide puisque entre 2001 et 2007, j’ai effectué tous les mandats : du mandat municipal à la députation !
Comment j’explique ce parcours ? Par mes motivations politiques, mon statut de chef d’entreprise et mes valeurs entrepreneuriales.

  • Tout d’abord, je me suis engagée politiquement afin de pouvoir aider et servir les gens. Faire de la politique dans ses valeurs premières de la « vie de la cité ». Je souhaite, en toute humilité, agir politiquement pour faire bouger les choses ! Ainsi, quand je me suis présentée en 2001, je n’étais soutenue par personne et « non-connue » politiquement. Ce qui peut paraître comme une faiblesse en politique c’est avéré pour moi un point fort puisque j’ai ainsi joui d’une grande liberté et indépendance de parole ! Je me suis fait connaître à travers mon « franc parlé » et mon authenticité !

  • De plus, en 2001, à l’âge de 40 ans, j’étais chef d’entreprise et maman de deux enfants, donc complètement libre et indépendante pour me dire « si je ne suis pas élue, ce n’est pas grave, je repars sur d’autres projets ! »
  • D’autre part, ce qui a été important pour moi, c’était de garder mon mandat au conseil municipal de Fresnay-sur-Sarthe, avoir toujours un pied « opérationnel » et proche des gens.
  • Enfin, j’ajouterais que mes valeurs de chef d’entreprise m’ont permis d’oser politiquement. L’audace, le dynamisme et mon éducation avec des parents chefs d’entreprise m’ont appris à savoir prendre des risques : ne pas avoir peur d’essayer ! Il ne faut pas attendre que quelqu’un vienne vous chercher, sinon ça ne se fera pas…il faut y aller et oser ! Mon voyage aux Etats-Unis, m’a également apporté une ouverture d’esprit sur l’entrepreneuriat avec une façon d’appréhender la prise de risque qui est différente.
    Par exemple, aux Etats-Unis, les banques prêtent davantage  à une personne qui a connu un premier échec de création d’entreprise puisqu’elles estiment que l’on apprend de ses propres échecs ….alors qu’en France, c’est le contraire : la peur de l’échec freine la prise de risque et l’entrepreneuriat!

Au travers de mon parcours politique, je souhaite également témoigner aux personnes qu’il est possible de réussir même sans soutien….il faut oser !

Au niveau des entreprises : 30% des créations d’entreprise sont le fait de femmes contre 50% aux Etats-Unis et 70% au Canada
Au niveau politique, pour avoir plus de femmes « élues », il y a eu une loi sur les quotas.
Qu’est-ce qui freine les femmes françaises à s’affirmer en entreprise et en politique ?

Il existe de nombreux freins à l’affirmation des femmes en politique et en entreprise. Un des freins majeurs est lié à l’éducation « judéo-chrétienne » : « la femme ne doit pas gagner plus d’argent que son mari… ». Il faut ainsi déculpabiliser les femmes et faire émerger les talents féminins….changer l’état d‘esprit et apprendre aux femmes à lâcher prise car elles ne sont pas des « superwomen ».

Par ailleurs, les femmes ne se mettent pas en avant, car étant plus « pragmatiques » elles n’en ressentent pas le besoin. Par exemple, en politique, lors de débats ou réunions, les femmes ne posent pas de questions car elles ne vont prendre la parole que s’il y a un intérêt réel et pratique ! En général, les femmes ne possèdent pas encore les codes pour réussir dans la politique ou faire carrière.

Il est ainsi important pour les femmes « d’apprendre à oser penser qu’elles peuvent faire carrière ».

Vous parliez des quotas : je pense que la loi sur les quotas, 40% de femmes dans les conseils d’administration des entreprises françaises, dessert les femmes. Je ne crois pas que ce soit par ce biais là que l’état d’esprit pourra changer. Il faut changer l’éducation et les politiques de détection des talents dans les entreprises afin que les femmes viennent d’elles-mêmes et osent !

Et concernant la fameuse question qui revient toujours quand on parle des femmes et de leurs carrières, la conciliation vie privée/vie publique…que répondez-vous à cette question ? Peut-on réellement parler de frein pour l’évolution des femmes ?

Cette question de conciliation renvoie selon moi à la notion de « culpabilité ».

Par exemple dans une élection on remarque souvent que contrairement à ce que l’on pourrait penser : les femmes ne votent pas pour les autres femmes qui se présentent !

Pourquoi ? Car l’image des femmes qui réussissent les renvoie à leurs propres échecs ! « Comment une femme pourrait réussir à concilier sa vie de famille et sa vie professionnelle ou politique, et s’épanouir, là où d’autres ont échoué ? » Les femmes entre elles ne se font pas de cadeaux !

Vous pensez-vous « féministe » ?

Je ne suis pas féministe : je ne défends pas uniquement les femmes. Je suis pour les talents et pour l’égalité par la liberté en faisant évoluer l’état d’esprit.

Je comprends les mouvements féministes, l’époque où les femmes ont eu besoin de se fédérer et de défendre leurs droits. Je n’oublie pas pourquoi ma mère était féministe : en 1965, elle devait encore demander sa paie à son mari ! C’est le mari qui signait le contrat de travail.

Les femmes ont appris à travailler et à se débrouiller pendant la guerre de 1939-1945 mais l’économie française a continué à évoluer sans prendre en compte cette émancipation.

J’ai observé que vous préfériez que l’on vous appelle « Madame le Député » et non « Madame la Députée », pourquoi ce choix ?

Effectivement, je suis pour que l’on m’appelle « Madame le Député » car « député » est une fonction et non un genre. Il n’y a donc pas de féminin ou masculin.
On a tort de vouloir tout féminiser ! Par exemple, dans l’armée on dit « une sentinelle » et ça n’a jamais posé de problème !

Mère, chef d’entreprise et député….vous considérez-vous comme un « rôle modèle » pour les jeunes femmes ?

Forcément, j’ai envie d’être un « rôle-modèle » pour les femmes afin de leur donner envie et leur montrer que « c’est possible », mais ce n’est pas essentiellement ce qui me pousse.
J’ai envie d’aider les femmes à se développer et à révéler leurs propres talents…

Je suis fière aussi à titre personnel, vis-à-vis de mes enfants, de leur montrer que même en partant de zéro, tout est possible avec de la persévérance et de l’audace !

Je m’intéresse aussi à montrer mes échecs : les parcours de vie dans la politique ou dans l’entreprise, c’est tout un cheminement avec ses réussites et ses échecs ! Le tout étant de savoir en tirer un apprentissage : après un échec, la réussite est toujours possible !

Quelles sont selon vous 4 qualités ou valeurs pour être un « bon député » ? …et une de vos qualités majeure ?

Il faut selon moi, être ouvert, persévérant, avoir une bonne prise de recul et surtout ne pas être susceptible !

Ce n’est pas facile de faire face à sa propre susceptibilité mais il faut se dire que si les gens ne sont pas contents ce n’est pas contre vous. Les gens ne vous reprocheront jamais votre opinion politique puisque ce sont vos propres convictions mais ils vous reprocheront de ne pas en avoir !

Me concernant, je dirai que je suis loyale et fidèle, je n’oublie pas ceux qui m’ont fait confiance et qui ont cru en moi…