la fonction publique dans le collimateur des Sarkozy-Chérèque

Publié le 19 janvier 2011 par Despasperdus

Après la réforme de régression sociale des retraites, on se demandait qu'elle serait la prochaine cible de la droite et de l'oligarchie. A priori, c'est au tour de la fonction publique.

Après Christian Jacob, ancien ministre de ladite fonction publique, qui annonçait...

« il ne faut pas s’interdire, non plus, de réfléchir à la pertinence de l’embauche à vie des fonctionnaires. »

... l'attaque est venue de Jean-François Mancel...

L'un dit qu'il ne faut pas s'interdire [1], pendant que l'autre, Mancel, dépose une proposition de loi pour réduire la fonction publique à la portion congrue.

Pour limiter la portée médiatique de cette attaque frontale contre les fonctionnaires et les services publics, la droite mène conjointement une opération d'enfumage des esprits avec l'annonce de négociations relative à la précarité dans la fonction publique. [2]

Si cette proposition [3] est votée, elle procédera à la réduction à terme de 80 % des effectifs de la fonction publique. [4] Aussi, à défaut de réduire la précarité sociale, la sarkozie entend bien la généraliser à l'ensemble du monde du travail !

L'exposé des motifs de ladite proposition dit ceci en substance :

  • d'abord, mettre fin à ce qui serait une exception française (le statut de fonctionnaire) sans étayer l'affirmation...
  • ensuite, « flexibiliser» pour nourrir « une nouvelle dynamique d’enrichissement réciproque des deux secteurs» public et privé, sans donner le moindre exemple démontrant une telle affirmation...
  • enfin, accélérer la réduction des dépenses de personnels (la RGPP).

Ainsi, la réduction des effectifs et la flexibilité sociale apporteraient une meilleure efficacité des services publics : Mancel décrit donc les effets d'un miracle, c'est-à-dire un fait extraordinaire inexpliqué scientifiquement. Mancel récite un concentré de novlangue libérale sans apporter la moindre preuve de ses affirmations...

Par ailleurs, le dernier motif de l'exposé de la proposition est fumeux :

« il convient de souligner que les contraintes qui pesaient sur les agents publics au nom du service de l’intérêt général et qui justifiaient les droits spécifiques liés au statut ont perdu beaucoup de leur importance d’origine, ce qui justifie aujourd’hui d’adapter le statut à ce nouvel environnement.»

Dommage que Monsieur Mancel, pygmalion d'un certain Monsieur Woerth [5], ne juge pas utile de préciser, une fois de plus, en quoi l'indépendance politique, la neutralité, l'égalité de traitement des usagers et l'impartialité, garantis par le statut des fonctionnaires « ont perdu beaucoup de leur importance d’origine»

Dans ce contexte de casse sociale, les citoyens sont en droit d'attendre des syndicats combattifs.

Or, la bataille est mal engagée.

Très récemment, J. Chérèque de la CFDT a écrit une tribune relative aux services publics [6]:

«Il faut prendre en compte ces évolutions pour rester au service des publics.»

Jusque-là tout va bien, sauf qu'il ajoute :

«il y a des fonctions régaliennes à maintenir sous l’autorité directe de l'État (parmi elles, le triptyque police-armée-justice) qui doivent être assurées par des fonctionnaires avec des obligations d’impartialité, de continuité, d’égalité de traitement, qui justifient les garanties protectrices de leur statut.»

Enfin, il estime que pour les autres services publics, les fonctionnaires ne pas indispensables :

«Une mission de service public ne se résume pas à la forme juridique de l’entreprise ou au statut du personnel.»

Le leader de la CFDT n'est pas dans une posture de lutte : navrant ! Chérèque reprend même à son compte une partie des arguments de Mancel avec la notion de services publics régaliens !

Ainsi, en échange de quelques misérables miettes qu'il conviendra de découvrir, la CFDT confirme, une fois de plus, son souhait de rester le syndicat privilégié, le syndicat partenaire du gouvernement et du patronat. Un rôle, tenu avant elle, par FO quand il y avait encore du "grain à moudre". Après tout en 1990 déjà, la CFDT avait soutenu la réforme Quilès [7], point de départ de la privation de France Télécom et de la Poste.

Bref, encore une fois l'oligarchie est parvenue à débaucher quelque collaborateur de poids... [8]

Notes

[1] Sauvons l’Université ! - « Embauche à vie » : Jacob se paie les fonctionnaires

[2] Les Échos - Tron fait un geste pour les CDD

[3] Assemblée nationale - proposition de loi visant à réserver le statut de la fonction publique aux agents exerçant une fonction régalienne

[4] Médiapart, blog de Benoit Petit - L'UMP dépose une loi pour supprimer le statut de la fonction publique à 80% des personnels !

[5] Sur Mancel, on lira avec grand intérêt la seconde partie de la Chronique du temps qui passe - DEPUIS 20 ANS, LES "AFFAIRES"SONT RÉCURRENTES CHEZ ERIC WOERTH

[6] CFDT - "Les services publics doivent être au service des publics"

[7] Sud - la réforme Quilès

[8] des pas perdus - riches et presque décomplexés