Polar poussif (un mal français ?)

Par Borokoff

A propos de L’avocat de Cédric Anger 1 out of 5 stars

A Montpellier, Léo, un jeune avocat ambitieux qui a rejoint un cabinet prestigieux, accepte de défendre dans un procès le PDG mafieux d’une entreprise locale de retrait et de traitement des déchets. Mais quand l’entrepreneur lui propose de devenir son avocat personnel et des sommes en liquide de plus en plus importantes, Léo ne se sent pas le courage de refuser malgré les risques qu’il prend et les conséquences qu’il connait.

Que retenir de L’avocat, second long-métrage de Cédric Anger (qui est également auteur du scénario) après Le tueur ? Que c’est un polar assez linéaire dont la mise en scène et le scénario, peu inventifs, déçoivent. Benoit Magimel s’en tire plutôt bien dans le rôle d’un avocat qui a accepté d’être corrompu mais vit de plus en plus de mal le fait d’être devenu malhonnête.

Commençant comme Serpico, L’avocat est construit en flash back où Léo raconte lui-même et en voix-off sa vie et son parcours, avec lucidité et regret devant la compromission qui a été la sienne (« je suis parti en couilles »). Tout l’enjeu du film est de comprendre la trajectoire de Léo, comment en mettant un pied puis l’autre dans la corruption, il se retrouve coincé. Le dilemme moral de Léo tient à cette contradiction entre son attirance pour l’argent et son incapacité morale croissante à cautionner les crimes du PDG mafieux (Gilbert Melki, bon, fidèle à lui-même). La trajectoire et les choix de Léo renvoient à ceux du personnage que Magimel jouait dans Sans laisser de traces de Grégoire Vigneron.

Mais dans L’avocat, la voix-off affaiblit le propos du film. Le film manque de rythme, le scénario de péripéties. On devine souvent l’action et les rebondissements de l’histoire malgré de bons acteurs (Melki et Magimel en tête). Même si à la différence de Le tueur, Anger ne diffère pas constamment l’action, le rythme du film parait trop lent pour un thriller. Le scénario a un air de déjà vu (comment ne pas penser à L’impasse ?) mais Sean Penn était beaucoup plus exubérant en avocat pourri et « surcocaïné » et la mise en scène de De Palma brillante.

L’avocat est le constat d’un échec et d’un grand gâchis. Léo était un avocat ambitieux et talentueux qui a renoncé à ses idéaux. La chute du film, sans la dévoiler, dit bien que de toute façon, Léo a tout perdu puisqu’il ne pourra plus jamais exercer en droit pénal, sa seule et unique passion.

L’avocat confirme non seulement la difficulté des thrillers français à renouveler le genre du polar « à la française » mais surtout à rivaliser avec des productions hollywoodiennes, à se hisser à leur niveau. Un mal d’autant plus étonnant et paradoxal que les réalisateurs français exilés à Hollywood et qui ont réussi à percer  dans le thriller (Pierre Morel, Louis Leterrier) sont de plus en plus nombreux.

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