Allons enfants...

Publié le 12 février 2011 par Lgdeluz

C’est Samedi, c’est Jérôme Lurie à la Tribune. Suite aux débats sur les joueurs qui ont ou n’ont pas chanté la Marseillaise avant la finale de la Coupe du Monde de Handball, il y a quelques jours, Jérôme a souhaité nous parler de sa Marseillaise. C’est tout à fait dans ma ligne, nous ne pouvons pas laisser les symboles de la république aux nationalistes et aux intégristes. En plus quel plaisir d’entendre parler des films légendaires contenant une Marseillaise… Je pense bien sûr à Rick’s Café de Casablanca. Voici le billet de Jérôme.

J'ai vu et entendu chanter la Marseillaise à de multiples occasions, lors de meetings politiques, dans des films légendaires, dans des stades. 

En France, les gens qui entonnent l'hymne national le font pour différentes raisons soit par conviction, soit par atavisme, pour donner du courage à l'équipe au maillot bleu ou bien se donner du courage, quelquefois pour marquer son appartenance à la République Française et aux valeurs universelles qu'elle représente, ou bien la défier en se faisant l'étendard d'un nation pure excluant des ennemis désignés : ceux qui ne chantent pas.

J'ai longtemps été réfractaire à certaines paroles de Rouget de l'Isle, car il s'agit d'un chant guerrier destiné à exhorté une armée en marche pour la déclaration de guerre contre l'Autriche en 1792. Cependant, l'époque voyait naître une forme d'autodétermination des peuples ayant la volonté de ne plus subir les tyrannies de monarchies despotiques et finissantes. 

N'en déplaise à certains, La Marseillaise n'était pas seulement l'hymne français. Comme chant révolutionnaire de la première heure, il a été repris et adopté par nombre de révolutionnaires sur tous les continents.

Une adaptation en russe, la Marseillaise des Travailleurs, publiée en 1875, fut même réalisée par le révolutionnaire Piotr Lavrovitch Lavrov. Vers 1900, ceux qui la chantaient en public en Russie étaient arrêtés par la police. Ce qui explique qu'après la Révolution d'Octobre, les bolcheviks l'adoptent pour hymne en 1917, avant de reprendre un autre chant révolutionnaire français : L'Internationale. En avril 1917, lorsque Lénine retourne en Russie, il est accueilli à Pétrograd au son de la Marseillaise.

En 1931, à l'avènement de la Seconde République espagnole, certains Espagnols ne connaissant pas leur nouvel hymne (Himno de Riego), accueillirent le nouveau régime en chantant La Marseillaise, dans une version espagnole ou catalane.

Durant la Seconde Guerre mondiale, la loge maçonnique Liberté chérie, créée dans les camps de concentration nazis, tire son nom de cet hymne des combattants de la liberté.

Alors oui, je suis déçu de voir que certaines personnes ne chantent pas la Marseillaise, mais si elles s'abstiennent c'est que quelque-part, la République n'a pas toujours défendu tous ses enfants comme il se doit. 

Cependant, plutôt que l'invective et le dénigrement qu'ont choisi des élus de la République ou représentants de partis politiques, je choisis d'expliquer ce que ce chant représente dans le monde entier comme espoir de liberté, de ne pas subir les tyrannies qui sévissent. Cet effort réclame de sortir de la réaction émotionnelle et de faire appel à son sens critique...

J'ai vu l'équipe de France de Handball chanter la Marseillaise, j'ai vu Nikola KARABATIC porter ce maillot bleu qui a maintenant 4 étoiles, j'ai vu ses parents en pleur et rempli de fierté de voir l'exploit de leur fils. Rappelons que M. et Mme KARABATIC sont pour l'un serbe et l'autre croate, ils ont fui la folie d'hommes remplis de haine qui a aboutie à une épuration ethnique, à un génocide. Leur reconnaissance en la France est éternelle, la mienne l'est tout autant de nous avoir donné l'un des sportifs les plus doués et exemplaires de notre histoire sportive.

Le drame yougoslave a pour origine des appels ultra-nationalistes, de gens qui entonnaient aussi un hymne national, on voit bien ce qu'ils en ont fait.

Chantons la Marseillaise uniquement pour ce que nous voulons qu'elle soit...

J. LURIE