Le gouvernement veut sacrifier la neutralité du Net

Publié le 12 février 2011 par Lyriciste

Le Secrétaire d’État à l’Économie numérique, Éric Besson, a appelé à la fin de la neutralité du Net, qui jusqu’ici semblait pourtant faire l’objet d’un consensus au sein des décideurs publics français et européens1. En donnant aux opérateurs télécoms la possibilité de vendre des accès prioritaires au réseau, le gouvernement mettrait fin à l’égalité dont jouissent les participants à Internet. Annonce après annonce, l’« Internet civilisé » défendu par Nicolas Sarkozy se dévoile : un Internet contrôlé par l’État et les industries des télécoms et du divertissement, au détriment des libertés fondamentales des citoyens.


Prenant le prétexte éculé de l’augmentation du trafic, qui croît régulièrement depuis près de 15 ans sans aucun dysfonctionnement2, Éric Besson estime que celui-ci doit être « régulé », et souhaite ainsi donner aux opérateurs la possibilité de « garantir une qualité de service minimale pour des services prioritaires »3. Derrière un vocable technique, c’est la liberté de communication des usagers d’Internet qui est directement menacée.

En effet, une telle évolution de la gestion du trafic Internet irait à l’encontre du principe originel de neutralité du Net qui garantit que les données transitent de manière non discriminée sur le réseau, quels que soient leur nature, émetteur ou destinataire. Les vrais perdants seront les citoyens, puisque l’apparition d’offres premium, fondées sur la discrimination et plus chères, mettra fin à l’égalité des participants sur le réseau.

C’est le potentiel démocratique d’Internet qui est ainsi directement mis en cause au bénéfice de l’industrie des télécoms. De fait, le gouvernement reprend exactement les positions anti-neutralité défendues par les grands opérateurs, comme Orange ou SFR4.

« L’un des éléments les plus choquants de l’intervention d’Éric Besson est qu’il ose invoquer les grands principes de la démocratie, des libertés fondamentales et de l’innovation. », déclare Philippe Aigrain, co-fondateur de La Quadrature du Net.

« La mise en place de dispositifs de discrimination des types de services au sein du réseau Internet est l’instrument idéal pour bafouer le principe de neutralité. En cédant aux demandes de quelques opérateurs commerciaux sur ce point, M. Besson sacrifie à la fois la liberté d’expression et l’innovation permise par Internet. », ajoute Benjamin Sonntag, co-fondateur de La Quadrature du Net.

« Après l’appel à l’interdiction de l’hébergement de WikiLeaks5, cette nouvelle annonce d’Éric Besson fournit une nouvelle illustration de la détermination d’un gouvernement souhaitant à tout prix contrôler Internet et l’information qui y circule », conclut Jérémie Zimmermann, co-fondateur et porte-parole de La Quadrature.

  1. 1. http://www.lemonde.fr/technologies/article/2011/02/08/eric-besson-la-neu…
  2. 2. Voir le site de référence du Minnesota Internet Traffic Studies, http://www.dtc.umn.edu/mints/, mis en place par Andrew M. Odlyzko.
  3. 3. http://www.digitalworld.fr/un-projet-abonnement-3g-prioritaire-de-vodafo…
  4. 4. Il est d’ailleurs révélateur que le ministre ait prononcé son discours lors d’une rencontre parlementaires où les intervenants extérieurs devaient s’acquitter de la somme de 10 000 euros pour y prendre la parole. http://www.numerama.com/magazine/18000-neutralite-du-net-seuls-les-lobby…
  5. 5. http://www.laquadrature.net/fr/wikileaks-et-la-censure-politique-de-lint…

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