“Avec la rare et impérieuse Kate Bush, PJ Harvey s’affirme...

Publié le 17 février 2011 par Mmepastel

“Avec la rare et impérieuse Kate Bush, PJ Harvey s’affirme toujours un peu plus comme l’autre très grande dame du rock anglais.”

…conclut Télérama dans un article que vous pouvez lire ici (assorti de la vidéo du concert qu’a donné la grande PJ à la Maroquinerie lundi dernier). Vous imaginez bien que le parallèle m’a à la fois interpelée et ravie.

Voici quelques heures que je l’écoute. Et je reconnais qu’une fois encore, elle surprend et innove. Pourtant, je me serais bien contentée d’un White Chalk bis tant je l’avais aimé. Mais non, il faut qu’elle repousse ses limites et vienne nous secouer dans nos certitudes. C’est bien tout l’objectif du disque si j’ai compris le titre et plusieurs de ses titres. Elle nous secoue. Et pour cela, elle n’hésite pas à accentuer les aigus de son chant déjà exploités récemment, et à faire sonner des discordances deci-delà (les chansons England ou Let England Shake sont tortueuses, voire franchement torturantes). À la fragilité de ce chant féminin suraigu et éminemment ironique, répondent en écho des choeurs masculins, pleins de virilité martiale, des trompettes ou des cors qui annoncent le début d’un combat. Car il est là le vrai sujet du disque : l’Angleterre sclérosée, bâtie sur des guerres nauséabondes.

L’album est donc moins intime que White Chalk, et c’est peut-être pour cela qu’il me marquera moins. Mais il recèle des morceaux qui, encore une fois, vont droit au coeur, comme des flèches décochées avec un sourire grimaçant. Je pense à The Last Living Rose, In the Dark Places, The Glorious Land, On Battleship Hill ou The Words That Maketh Murder… Je trouve les textes particulièrement percutants et réussis, raillant le concept de Nation, et exhibant les ravages des guerres. Le disque a toutefois conservé la “simplicité” de son album précédent avec une orchestration parfois limitée à l’auto-harpe, une ligne de piano, qui s’accordent si bien avec son chant sur le fil. La différence est l’ajout de ses fameux choeurs masculins dont on comprend ici la présence (ils rajoutent un souffle plus épique, et soulignent la dimension martiale d’un pays aujourd’hui exsangue) et de percussions sommaires, parfois simplement répétitives, comme rappelant leur antique rôle tribal, sans verser pour autant dans la rage ou l’exhortation, ne refusant même pas une certaine douceur (Hanging On The Wire).

Comme une douceur qui ferait encore plus mal qu’une grande claque, même si la secousse de l’auditeur est clairement recherchée.

Let England Shake n’est pas un disque aimable. C’est un grand disque qui appuie là où ça fait mal, qui gratte les croûtes et ne s’en excuse pas.

En écoute : In The Dark Places.