Droit à la culture (by Stefania)

Publié le 21 février 2011 par Lifeproof @CcilLifeproof

 

Je voulais vous faire un beau post en vous racontant les merveilles d’art contemporain japonais (je rentre fraîchement d’un superbe voyage au Japon !), mais pendant mes vacances j’ai dû me contenter de visiter le musée d’art contemporain de Tokyo et renoncer aux autres espaces d’art que j’avais soigneusement noté sur mon carnet mental.
Pourquoi ça ?
C’est très banal : les musées aux Japon coûtent vraiment trop chers: C’est-à-dire : pas beaucoup plus qu’en Europe, mais c’est déjà trop pour en enchaîner 3 ou 4 dans une semaine. Lorsqu’on vous dit (très gentillement, les japonais sont adorables) que votre carte de presse n’est pas acceptée, vous commencez à faire vos comptes.
Cette petite expérience m’a emmenée à une réflection qui date désormais de ma dernière année d’études : les musées gratuits. Oui, mes chers, ça existe et pas trop loin de nous tous : en Angleterre. Depuis les années 1990 les musées les plus importants de Londres ont supprimé la vente de tickets et le grand débat s’est ouvert entre ceux qui défendent la gratuité de la culture et les sceptiques.

Tate Modern, Ondres, exposition personnelle de Doris Salcedo, Shibboleth


Je me rappelle aussi d’une petite discussion à laquelle j’avais assisté il y a trois ans entre les gardiens du Musée Matisse où je travaillais en tant que guide, à la veille de l’introduction de la gratuité dans les musées municipaux de Nice. Ils croyaient qu’il y aurait plus de monde, de touristes et de classes indisciplinées, tous simplement parqués dans les salles et utilisant les toilettes gratuitement. Ne croyez pas qu’il s’agisse d’une critique acide sur des jeunes un peu vifs, c’est une des idées reçues les plus difficiles à extirper parmi les défenseurs du ticket, même chez les critiques d’art et les politiques.
L’expérience britannique montre que cette recette a été un succès: on compte une augmentation de 40% des visites dans les dix dernières années, jusqu’à 70% pour le British Museum. Croire que les revenus des musées ne proviennent que de la vente des tickets d’entrée est une grosse erreur très répandue. Les visiteurs qui se rendent à la Tate Modern et qui épargnent 10 euros (chacun) sont bien plus disposés à dépenser cet argent dans le bar du musée, dans la librairie, dans ceux qu’on appelle en jargon des spécialistes, les « services supplementaires ».

Tate Modern, Londres, exposition personnelle de Louise Bourgeois
De plus, si vous avez la chance d’habiter dans une ville qui a une offre culturelle telle que celle de Londres (mais aussi de Paris), si vous devez dépenser à chaque exposition 10-11 euros vous n’aurez pas forcement envie de le faire toutes les semaines (sauf si vous êtes vraiment passionés – et riches). Si vous habitez à Londres, vous pouvez voir un musée différent toutes les semaines, sans être obligé de ne mangeant que du pain à la fin du mois. Sinon vous faites comme moi à Tokyo : vous privilegiez un musée et vous renoncez aux autres. Mais c’est bien dommage ! (surtout que les expositions au musée d’art contemporain étaient un peu bof).
Tout cela n’a rien à voir, comme je vous disais, avec l’économie de la culture, mais avec une vieille idée snob de la culture qui serait réservée à une élite qui n’a pas besoin de se rendre dans un musée sauf pour s’en vanter devant ses amis bourges et ignorants.

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MOT Musée d'art contemporain de Tokyo

4-1-1 Miyoshi, Koto-ku, Tokyo 135-0022

expositions à partir du 26 février 2011

- personnelle de Kyoji Takubo

- Nearest Faraway, exposition collective d'artistes originaires de Tokyo