TIGRAN " a fable "

Publié le 22 février 2011 par Assurbanipal

TIGRAN " a fable "

 Universal. 2011.

Tigran: piano, chant

Nate Wood: percussions sur le sol et la scène (n°7)

    

Attention, Talent! Tigran Hamasyan est né en Arménie en 1987. Je le suis sur scène depuis 2003. C'était au club Chorus, à Lausanne en Suisse. Il venait là auréolé du troisième prix du concours international de piano jazz Martial Solal 2002. La même année, 2002, il avait joué sur scène en duo avec Chick Corea. Le choc fut immédiat. Un nouvel univers musical s'ouvrait devant moi. Un mélange inouï de virtuosité issue de l'école russe du piano classique, une connaissance intime des standards du Jazz, un Swing impérial, une émotion venue de son Arménie natale, un feeling oriental. J'ai écrit sur ce concert et je revois Tigran Hamasyan sur scène au moins une fois par an depuis. A chaque fois il me sidère, m'impressionne, m'éblouit, m'émerveille. Parti de très haut il ne cesse de monter. Jusqu'où s'arrêtera t-il?

En 2004 il éblouissait le public de Jazz à Vannes. En 2005 en trio avec François Moutin et Ari Hoenig il jouait devant un Duc des Lombards à moitié vide, la moitié pleine étant essentiellement composée de pianistes. Quelle claque ils ont pris! Ils n'ont pas fini d'en prendre. En 2006, il finit 2e du concours international de piano Jazz Martial Solal. Je pensais alors que c'était un scandale. La preuve, le vainqueur a disparu depuis. Tigran lui a joué avec les frères Moutin, invité Claudia Solal sur scène, joué avec des Arméniens,  des claviers électriques, mélangé Jazz, Pop Music, musique traditionnelle arménienne, mis le New Morning à ses pieds en 2009. Ce garçon peut tout se permettre car ni son goût, ni son imagination, ni sa technique n'ont de limites. Enfin, récemment, il s'est recentré sur le piano et s'est lancé dans l'aventure du solo. J'ai fait partie des happy few qui eurent la bonne idée d'aller au cinéma un soir d'automne 2010 à Paris l'écouter jouer seul en hommage à  Martial Solal.

Le résultat de ces années de labeur, de recherche est là devant nous. Une fable affable. Une fable car c'est un rêve éveillé que nous vivons en écoutant cette musique. C'est digne d'un récital de piano classique sauf que Tigran ne récite pas, il crée. A partir du folklore arménien, de son imagination, d'un standard " Someday my prince will come " qu'il joue comme si personne ne l'avait jamais joué avant lui. Et puis il chante, dépassant le chantonnement de Glenn Gould et Keith Jarrett. Affable car cet homme petit de taille, grand de talent, est poli. Il nous emmène dans son monde, nous y fait courir, chanter, danser, rêver, voler, planer.

Nul besoin d'aimer le Jazz, le piano, l'Arménie pour aimer Tigran Hamasyan. Il suffit d'aimer la beauté. " La beauté est une chose rare " dit Ornette Coleman. Elle est là sous les doigts, dans la voix de Tigran. Profitez en avec cet album et sur scène car Tigran est en concert solo en France, en Suisse et en Italie cet hiver et ce printemps. A noter: le passage à Paris au théâtre du Châtelet le vendredi 25 mars 2011 avec pour invité le percussionniste indien Trilok Gurtu. Les autres dates figurent sur son site Internet. Lectrices avides de beauté, lecteurs affamés de nouveauté, réjouissez vous. Tigran vit et joue en même temps que vous.