Saigon (Ho Chi Minh-Ville), 4 mars 1993

Publié le 04 mars 2011 par Safran
VIETNAMDepuis 3 ans, il s’ouvre au tourisme. Les routards qui viennent de le visiter, nous ont fait part de leurs sentiments : les uns trouvent ce pays formidable, les autres sans intérêt. Un point commun : les prix grimpent très vite. Il suffit de consulter le dernier Lonely Planet pour s’en apercevoir.Les images que nous avons en tête : celles de Cinq Colonnes à la une, et plus récemment celles des films Indochine et L'Amant.


Camarades ! La République socialiste du Vietnam - Indépendance, Liberté, Joie - vient de nous ouvrir ses portes, prête à empocher nos dollars !

Il y a deux jours, nous arrivons, avec la compagnie Vietnam Airlines, non pas sur un vieux Tupolev ou Antonov semblable à ceux qui s’écrasent régulièrement dans l’ex-URSS, mais sur un B767 acquis auprès de la compagnie australienne Ansett, si nouvellement acquis que l’appareil est encore vierge de tout logo.À l’aéroport d’Ho Chi Minh-Ville, les formalités d’arrivée sont expédiées en cinq minutes !Le taxi est notre premier contact commercial avec le pays : “Quoi ? Douze dollars pour aller en ville ?!!”  Des regroupements intéressés se font entre routards et nous partons vers Saigon en compagnie d’un Anglais et d’un Américain.

Premier arrêt pour nous déposer devant l’hôtel que nous avions minutieusement choisi dans le guide. Opération nulle : il est en rénovation.Nous continuons jusqu’à l’hôtel de l’Américain : un bel immeuble blanc fraîchement repeint, colonnade et fronton “parthénien”, groom à l’entrée, hôtesses à la réception, marbre au sol, lustres au plafond, fauteuils de velours. Z’êtes sûrs ? C’est un hôtel pour routards ?Oui ! Le Vien Dong vient d’être rénové, mais il reste encore une aile “ancienne” où les chambres ne sont qu’à douze dollars, avec ventilo, salle de douche et toilettes, savon, PQ et serviettes. Étonnant !

Scène pastorale imprimée sur une carte postale en tissu


Passons maintenant aux formalités ; le Vietnam n’a rien à envier à la Birmanie ! On nous demande d’avoir toujours sur nous les documents suivants : passeport, visa (sur feuille séparée quand il est délivré à Bangkok), formulaire de douane, carte d’entrée-sortie avec notre numéro d’enregistrement auprès des autorités - coût : sept dollars par personne -, permis de voyage interne spécifiant les noms des villes que nous désirons visiter - coût : quinze dollars par personne -. Ce permis, déjà supprimé dans le Nord reste en vigueur dans le Sud jusqu’au 31 mars 93.Le change se fait très rapidement à l’hôtel, et sans justificatif. La monnaie locale est le dong, et pour vous donner une idée de sa valeur, 1 dollar vaut 10 000 dongs ! Nous avons l’impression de payer des sommes folles quand nous sortons 20 000 dongs pour deux petits déjeuners !

Pour se déplacer en ville, le cyclo-pousse est le moyen le plus pratique. Dans la version vietnamienne, le pédaleur est derrière, et le passager devant sur un large fauteuil recouvert de skaï. Le passage des ronds-points au milieu de centaines de mobylettes et de vélos, me fait monter des bouffées de chaleur car les feux rouges sont pratiquement inexistants.Il règne une grande fébrilité dans les rues de l’ancienne capitale : marchands de fruits, stands de cigarettes, d’eau purifiée, de savon, de cartes postales, de plans de ville, de dictionnaires. On peut également se procurer de nombreux livres anciens qui ont été réédités depuis que la censure a été assouplie, en particulier une étude très instructive réalisée au début du siècle par l’École française d’Extrême-Orient, sous le titre “Connaissance du Vietnam”.

Le soir, après le coucher du soleil, l’animation de notre quartier s’intensifie car tout le monde est dehors. Les enfants font leur toilette et s’amusent bruyamment sur les trottoirs. Leur jeu préféré semble être la toupie, une toupie artisanale en bois autour de laquelle ils entourent une ficelle pour la lancer violemment vers le sol. Non loin de là, les parents mangent et discutent allongés sur une chaise longue.Quand arrive le week-end, au secours ! De nombreux Vietnamiens sont atteints de karaokite aiguë. Ils ont, chez eux, le dernier cri de la technique japonaise, souvent introduit en fraude via la Thaïlande. Ils passent des heures en famille accrochés au micro, les yeux rivés sur le moniteur.Dans le centre-ville, les néons des hôtels de luxe illuminent les rues - pas d’éclairage urbain actuellement -, les touristes et les conseillers russes viennent manger une soupe à l’oignon au Café Givral, les Vietnamiens se promènent en famille. Bref, l’ambiance est animée et joyeuse. Tout est en effervescence.

M. & Mme Bablesse ont appelé leur fils... Raoul !