Crise politique en Polynésie française, quand la France reprendra-t-elle les rênes ?

Par Teaki


Temps indécis, temps du changement, temps de crise, temps d’intolérance, temps d’espérance. Les crises des pays arabes ont toutes en commun que les leaders qui tenaient d’une main de fer et souvent collaborationniste avec l’Europe et la France en particulier ont fait long feu. Il semble que cela soit aussi le cas en Océanie qui connait une crise politique sans précédent. En Nouvelle-Calédonie, le gouvernement vient de démissionner, en Polynésie, le président vient de limoger six ministres. En ces temps de révolte populaire, on est en droit de s’interroger sur la cause de ce chamboulement de l’Océanie française. En Nouvelle-Calédonie la revendication semble ancienne et liée au partage du pouvoir, en Polynésie, le mal perdure depuis la fin de l’ère de Gaston Flosse et la planète politique locale faite d’unions et de désunions n’en finit pas de chercher sa nouvelle voie dans une organisation démocratique qui peine à trouver sa stabilité. Tout se passe comme si les polynésiens et les calédoniens se moquaient éperdument de leur avenir, de ce que font ou ne font pas les politiques. Comme s’ils avaient totalement perdu foi en leurs représentants, lassé des allées et venues, des promesses non tenues, des conflits d’intérêts, du manque d’écoute, de consultation, de sens de l’intérêt commun.

La paix est elle devenue un gros mot en ces terres d’abondance et de richesses naturelles ? Que peut faire la République face à ses territoires agités ? Gageons qu’elle ne baissera pas les bras, qu’elle montrera la voie. Il est des moments où la France doit avoir le courage d’imposer sa présence, de reprendre des rênes distendus par la distance, l’incompréhension, la fin d’un modèle.

Comme je l’ai souvent dit, les territoires d’outre-mer sont le réservoir des rêves,  de perspective de la France, une figure de proue affectionnée des français. Ce que nous faisons de bien outre-mer nous est rendu au centuple, ce que nous manquons prend la dimension d’échec national. Gare à l’effet boomerang d’une crise politique durable en Océanie. L’échéance présidentielle ne souffrira pas une autre révolte populaire en Polynésie ou en Nouvelle-Calédonie comme nous en avons malheureusement connue aux Antilles. Le président de la République en est conscient lui qui a décidé 2011 comme l’année des outremers français, année qui avait du reste bien mal commencé avec la diffusion sur TF1 de la lamentable série de téléréalité mettant en scène un pseudo prince polynésien aussi benêt qu’irréaliste courant après les cochons sauvages comme l’on court a près son chien. Cette série initiée par le brillant Christophe Dechavanne connu davantage pour son sourire continuel que sa culture de l’altérité a commencé au mois de janvier et n’a du reste pas convaincu l’audimat puisque TF1 l’a arrêtée au 4ème épisode. Année des outremers français qui a illuminé les douze colonnes de l’assemblée nationale pendant le mois de février qui verra la panthéonisation d’Aimé Césaire, un immense stand des écritures ultramarines au salon du livre, le festival de la Polynésie animer le 1er arrondissement de Paris et le jardin d’acclimatation, année qui sera clôturée je l’espère, par le célèbre festival des Arts des iles Marquises, évènement qui réunit tous les 4 ans tout ce que la planète maorie compte de créatif en matière de danse, sculpture, chants …

Si la culture pouvait inspirer la politique de manière plus pérenne, nous pourrions donner de l’air où nous manquons de temps, donner de la latitude où nous nous crispons sur le manque d’argent inspirer au lieu de contraindre, entrainer plutôt que de restreindre. Bien sûr il faut réduire nos coûts de fonctionnement mais il faut aussi remettre la machine à rêver en marche. Quel modèle de société voulons-nous en Polynésie et en Nouvelle Calédonie ? Si nous ne plaçons pas l’avenir sous le signe de l’inspiration, l’aspiration à une contrée digne d’être autonome, unifiée dans son métissage, forte de ses héritages et des différences culturelles, que donnerons-nous à nos enfants, une terre laminée par les oppositions, une terre où le mot réconciliation n’existe pas ? Il faut réconcilier les politiques entre eux et pour cela la république doit jouer son rôle de médiateur. Il est indispensable que la France prenne enfin à bras le corps ce qu’elle a laissé pourrir depuis de trop longs mois.

Nous attendons la réforme électorale de la Polynésie française engageant à davantage de stabilité pour la majorité en place pour la fin 2011. Que c’est tard quand on a connu des dizaines de gouvernements en quelques années. La République doit jouer son rôle d’arbitre sous peine de voir le jeu dégénérer dans une bataille où tout le monde sortira perdant. Alors seulement, quand les camps auront retrouvé un semblant de stabilité pourra nous engager avec confiance un retour aux urnes. Les polynésiens ne font plus confiance à 70% aux politiques en place. Qu’on se le tienne pour dit. Quand les polynésiens ne croient plus, c’est la France entière qui perd la foi.

Nos responsables politiques polynésiens ont la tête dans le guidon et ce n’est pas bon pour rouler dans la bonne direction. Ils sont pris dans une spirale dépressionnaire qu’affectionne particulièrement la région. Pas un ne sort du lot des lamentations. Pas un ne propose mieux.

Il faut se reprendre et pour cela la France doit jouer son rôle, l’Etat doit reprendre les rênes. Ne serait-ce qu’un temps de transition pour marquer son attachement, son souci d’être présent malgré l’indispensable besoin d’autonomie qui est arrivé bien trop tôt pour la Polynésie fragilisée.

Alors qui ? Les îliens devraient être plus associés aux décisions du gouvernement, eux qui ne défendent que le parti de la décentralisation de la décision par archipel et non la concentration de tous les pouvoirs à Tahiti, une hérésie sur un territoire vaste comme l’Europe.

Comment ? Avec une tutelle plus forte de la République pour arrêter l’hémorragie et montrer que la France croit encore en son outre-mer