Les gros bras de Revenu Québec

Publié le 12 mars 2011 par Copeau @Contrepoints

En 2006 l’entrepreneur Jean-Yves Archambault reçoit la visite de deux fonctionnaires de Revenu Québec. Des montants de TPS/TVQ n’ont pas été payés, disent-ils. Soudain, on décide que monsieur Archambault est un fraudeur. On épluche les livres de son entreprise. On utilise des « méthodes musclées » et douteuses. Certains montants contestés par Revenu Québec ne correspondent pourtant à aucun chèque, d’autres apparaissent deux fois dans les livres de l’inspecteur. Cinq ans plus tard, M. Archambault, qui a tout perdu, décide de poursuivre Revenu Québec.

Surprenant ? Pas quand on apprend, le lendemain de la parution de cette histoire, que Revenu Québec a des « quotas » à respecter. Deux employés de Revenu Québec ont confié à TVA que chaque employé doit récupérer un minimum de $500 par heure. Jusqu’à $3.000 dans certaines régions plus importantes, comme Laval.

Le fiscaliste Pierre Nadeau en rajoute : la mentalité qui prévaut chez Revenu Québec est « d’aller chercher le plus d’argent possible » auprès de la population. Des employés de Revenu Québec lui ont confié qu’ils avaient « beaucoup, beaucoup de pression » pour aller chercher des sommes impayées.

Les petites mouches collent, les grosses passent

Le gouvernement libéral veut récupérer 1,2 milliard en impôts non payés d’ici trois ans. C’est un but légitime. Ce qui dérange, c’est que d’honnêtes citoyens — pas tous 100% honnêtes, j’en conviens — et des PME payent, alors que les gros bonnets dorment tranquille.

Honoré de Balzac a dit un jour : « Les lois sont des toiles d’araignées à travers lesquelles passent les grosses mouches, et où restent les petites. »

Il devait être de passage au Québec. Ici, on verse $6 ou $7 milliards chaque année en subventions, crédits d’impôt et autres subventions déguisées à plusieurs grandes entreprises et multinationales (IBM, Warner Bros, des banques, etc.) Ensuite, le gouvernement essaie de se reprendre en harcelant les petits commerçants. Pourquoi ne pas simplement éliminer un ou deux milliards en subventions aux entreprises ? Ça coûterait trop de votes à certains politiciens ?

Je suis en faveur d’une imposition compétitive des entreprises. Mais si on se met à courir après les impôts impayés des PME et des individus, pourquoi alors laisse-t-on des grandes entreprises reporter leurs impôts à l’infini ? Et même, dans le cas d’Alcan, recevoir un remboursement d’impôt de $20 millions en 2004 et 2005, selon une étude du professeur de comptabilité Léo-Paul Lauzon ?

Et pourquoi ne pas mettre plus d’efforts, avec l’aide du fédéral, pour récupérer une partie des $12,5 milliards en impôts évités par les grandes banques canadiennes depuis 7 ans grâce aux paradis fiscaux? Comme le réclame le Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MEDAC).

Oh, j’oubliais. Paraît que l’évasion fiscale, il y en a beaucoup dans l’industrie de la construction. C’est pour quand, l’enquête ?

Y a-t-il trop d’« intérêts stratégiques » en jeu pour nos politiciens, qui les empêchent de s’attaquer à ces problèmes, au lieu de s’acharner sur les petits ? Appelez-moi cynique, mais de plus en plus, ce gouvernement donne l’impression qu’il refuse de céder un pouce dans ses privilèges — et ceux de sa clientèle —, et préfère sortir les gros bras pour siphonner ce qui reste aux gens de la classe moyenne.

Je m’arrête ici avant que des agents viennent cogner à ma porte.