Comment réussir son entretien d’embauche? Côté recruteur.
Première source de recrues : le réseau de proches. En tant que petite ou jeune société, je n’ai pas les moyens de solliciter les services d’un cabinet de recrutement, et je n’ai pas non plus 600 € à mettre dans une annonce chez le numéro 1 mondial du recrutement en ligne. Qu’ai-je à disposition pour recevoir des candidatures? Les sites gratuits, nombreux mais d’audiences incertaines (à tenter tout de même), l’ANPE et l’APEC, lesquelles génèrent un nombre important de candidatures et nous accompagnent dans le tri, mais le classement des offres est un peu rigide et ne permet pas toujours de ranger l’annonce dans la bonne case, avec là aussi des résultats incertains (à tenter tout de même aussi!). Parmi les moyens gratuits de diffusion d’annonces dont nous avons fait l’expérience, celui qui s’est révélé le plus efficace est notre réseau : nos proches, amis, tous ceux qui nous connaissent. Bien-sûr le succès dépend fortement du type de collaborateur recherché (par exemple notre réseau n’a jamais aidé à dénicher nos développeurs Python!). Mais outre sa gratuité, le réseau présente un avantage de poids : les amis et proches jouent naturellement le rôle d’ambassadeur de votre société auprès des candidats. Il en résulte des candidatures en petit nombre mais extrêmement bien qualifiées, et des candidats qui arrivent en entretien bien renseignés (et rassurés) sur la petite entreprise dans laquelle ils mettent les pieds. Chez GymGlish, près de la moitié de l’équipe actuelle, c’est à dire une dizaine de personnes, a été recrutée grâce à notre réseau de proches. Merci les amis!
Première cause de ratages : pas assez d’entretiens. Ma petite entreprise doit recruter, c’est urgent, et je suis donc enclin à accorder le poste au premier candidat convenable rencontré. Erreur! D’après notre expérience, multiplier les entretiens, recevoir plusieurs candidats bien-sûr, mais aussi faire plusieurs entretiens par candidat, menés par différents intervieweurs, est la meilleure façon de prévenir les futures séparations, autrement plus coûteuses en temps et énergie. Alors la procédure est alourdie, ralentie, mais sur ce point les petites entreprises peuvent s’inspirer des grands groupes. Concrètement, il s’agit d’organiser au moins deux ou trois tours de sélection, et faire interviewer les candidats ‘short-listés’* par au moins deux ou trois personnes différentes : managers, mais aussi collaborateurs proches même sans ascendant hiérarchique. La diversité des entretiens génère naturellement une diversité des retours, et révèle toujours des informations croustillantes, parfois incohérentes. C’est la méthode promue par Google également : les nouvelles recrues sortent d’une série de 6 entretiens en moyenne, et les décisions sont collégiales (‘On est toujours plus intelligent à plusieurs’ est un de leurs crédos). Chez GymGlish, nous avons en sept ans d’existence signé 33 CDI, connu 5 licenciements (de notre fait, c’est à dire douloureux pour les personnes concernées, et déstabilisant pour tout le monde), et une assignation au conseil des prud’hommes. Point commun entre les cinq personnes licenciées : elles ont toutes été recrutées suite à trois entretiens ou moins (contre 5 entretiens en moyenne aujourd’hui). Le conflit au prud’hommes concerne un ex-stagiaire devenu salarié : un seul entretien. Petite boite certes, tournée vers l’action, le terrain... Mais question recrutement, désormais nous prenons notre temps.
Notre ‘truc’, Acte 1 : peindre un tableau un peu noir de l’entreprise. J’ai trouvé un candidat intéressant, en tout cas compétent. Comment m’assurer de sa motivation? Pas facile en entretien : à la question ‘Etes-vous motivé(e) par le poste?’ aucun candidat ne vous répondra ‘Non’ séance tenante (‘Allez merci... salut...’!!!). Notre truc : lors du dernier entretien, peindre un large tableau de la vie dans l’entreprise sous tous ses aspects, professionnels et humains, positifs et négatifs. Après les questions/réponses, l’entretien tourne ainsi au monologue : moi recruteur je vais m’ouvrir sur mon entreprise, sa culture, nos projets, nos façons de travailler, de manager, nos objectifs à court et long termes. Et je vais bien insister sur les aspects ingrats, les difficultés, les tâches à faible valeur ajoutée, les lacunes de notre encadrement (etc). Peindre ce tableau un peu noir de l’entreprise peut paraître incohérent avec l’objectif de séduire, mais il est préférable d’évoquer les ‘galères’ avant de signer, plutôt que le candidat les découvre une fois en poste et nourrisse un sentiment de défiance. Un recrutement est un pacte, un ‘deal’, il est important d’en énoncer toutes les dispositions avant de signer, et ce au-delà de celles qui figureront dans le contrat. Il n’est pas rare que nos employés nous rappellent, plusieurs années après leur recrutement ce que nous leur avons précisément dit en entretien, et en particulier les aspects négatifs du tableau. ‘Vous n’aviez pas menti!’ témoignent-ils : les ‘galères’ étaient bien au rendez-vous, et paradoxalement, nos relations de confiance s’en sont trouvées renforcées.
Notre ‘truc’, Acte 2 : mettre la balle dans le camp du candidat. Le tableau est peint, le monologue terminé, l’entretien touche à sa fin. Je vais maintenant mettre la balle dans le camp du candidat, lui demander de se positionner : à lui de savoir s’il se sent motivé ou non par la mission et l’environnement de travail décrits; dans le cas d’une entreprise jeune et donc à risques, à lui de savoir s’il ‘sent’ ou non le projet, je ne peux pas le forcer. Ainsi l’entretien se termine par un surprenant “Nous ne vous rappellerons pas.”… “A vous de revenir vers nous avec un petit email, ‘à froid’, décrivant vos ressentis à l’issue des entretiens, l’état de votre motivation, vos craintes, questions... Et pas de formalisme s’il vous plaît, soyez simplement sincères.” Bilan chez GymGlish où nous procédons ainsi depuis le début : près d’un tiers des candidats n’envoie jamais cet email . Parmi ceux qui répondent, un tiers encore nous écrit avec gentillesse qu’il ne pense pas convenir. Au final, c’est un candidat sur deux qui s’élimine de lui-même, souvent sans que rien n’en présage en entretien. Celui qui reste en lice nous confirme sa motivation, s’ouvre à son tour sur ses aspirations, réserves éventuelles, sur ce qu’il n’a pas su dire en entretien. Les premières dispositions du deal sont énoncées, et la balle revient dans mon camp. Maintenant, et maintenant seulement, je vais pouvoir faire une proposition.
Ces quatre façons de faire ne sont ni nouvelles ni scientifiquement éprouvées. Elles se sont révélées déterminantes chez GymGlish, ce qui justifie que nous les partagions avec d’autres entrepreneurs et dirigeants de petites sociétés. Recruteurs, saisissez donc à nouveau la requête ‘Réussir son entretien d’embauche’ dans google, écumez quelques centaines de premiers résultats très objectivement sans intérêt, et regardez : notre petit témoignage est désormais là rien que pour vous.
* Un candidat ‘short-listé' est un candidat sélectionné pour la dernière phase de recrutement.
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