La petite blonde avec une chaussure verte (et des lunettes rouges)

Publié le 22 mars 2011 par Darksroker

En arrivant sur Omnizine, je m’étais promis de ne jamais y faire de politique. Et pour cause, aucun de mes acolytes masculins n’a abordé le sujet, à l’exception de Robert U dans un article remarqué sur un certain Jean et son papa. Sur Omnizine, on ne pète pas plus haut que nos culs, on est des jeunes, je dirais même qu’on est des BN, on est là pour se divertir et divertir les vagabonds de passage et autres fidèles qui nous lisent. Sur un site comme Omnizine, en règle générale on aborde des sujets légers. Et la politique, c’est tout sauf léger.

Pourtant moi, j’ai aimé chaque seconde passée avec Eva Joly en cette journée nuageuse et  glaciale de mars, après avoir mangé mon burger au « That’s 70’ restaurant » du coin de la BEM. Je le revendique, mon petit cœur de fille romantique a battu la chamade dès l’instant où je me suis retrouvée dans la même pièce qu’elle.

Alors je me suis dit qu’il fallait quand même que je profite de la tribune qu’Omnizine m’offre et de cette formidable rubrique « l’humeur de » pour vous faire partager mon enthousiasme, en toute sincérité, sans faire de propagande politique, juste pour parler d’une personnalité et de ce rêve de gamine qui se réalise quand on rencontre une idole. Vous allez voir, ça sera sympa !

Eva Joly. Ces quelques syllabes fondent en bouche comme un nom de scène de starlette internationale. La réalité est beaucoup moins glamour quand la jeune et jolie Gro Farseth débarque en France comme jeune fille au pair dans une famille bourgeoise parisienne. De cette expérience, la fille d’ouvrier norvégien a profité jusqu’au bout, montant dans le légendaire ascenseur social (connu pour fonctionner au rythme de travail d’un cheminot de la SNCF de 48 ans en fin de 15ème mois). Un mariage avec le fils de la famille plus tard, Gro, qui a préféré adopter son deuxième prénom plus universel, devient Madame Joly. Eva Joly.

La légende est en marche. Notre égérie de la droiture devient quelqu’un à la force de ses neurones. Cours du soir à la fac de droit pour mieux travailler et élever ses enfants la journée, devenue magistrate suite à un concours « exceptionnel » à 38 ans, elle est propulsée sur le devant de la scène grâce à l’affaire ELF dont elle dirige l’instruction. Des années de lutte contre la corruption plus tard, la voici quasi candidate à la présidentielle d’Europe Ecologie – Les Verts. Et moi du haut de mes 20 ans, j’ai eu la chance de la rencontrer et de l’interroger sur son parcours et ses ambitions dans le cadre des merveilleuses Rencontres Sciences Po/Sud-Ouest avec d’autres étudiants de l’IEP de Bordeaux.

Quand elle arrive, le constat est sans appel. Eva elle est petite, elle porte les stigmates du temps sur son visage et sa voix trahie sa fragilité. A défaut de lui donner les atouts du politique, ces particularités lui offrent une candeur absolument fascinante. Comme ce petit bout de femme peut y arriver ? Quelles forces intérieures puissantes a-t-elle en réserve ? Il était clair pour moi avant de la rencontrer que sa force venait de son caractère : droite, honnête, convaincue. J’avais mis mon idole sur un piédestal et une petite voix en moi avait peur depuis déjà plusieurs semaines que la réalité casse le mythe. Pour ne pas garder le suspens trop longtemps, je dois vous avouer qu’elle l’a renforcé. Attention, c’est le moment que j’ai choisi pour faire un portrait en guimauve de la plus frenchy des norvégiennes.

D’abord, Eva quand elle vous regarde dans les yeux ne ment pas. J’ai même l’intime conviction qu’elle en est tout simplement incapable. Elle préfère vous renvoyer dans vos plates bandes sur une question gênante plutôt que de pratiquer la langue de bois. Elle préfère vous vexer en vous disant clairement que cette question n’est « pas intéressante » plutôt que de passer 10 minutes à la contourner. Eva est juge avant tout et son jugement est sans appel : quand elle aime, ça se sait, quand elle n’aime pas, ça se sent. En découle la limpidité d’un propos sans tricherie. Quand elle parle de la misère humaine et dit de sa voix douce et hésitante « c’est important que des gens soient là pour les aider à s’en sortir, pour leur montrer qu’ils son soutenus », les yeux dans le vide, on la croit. Aucune démagogie ne peut se cacher derrière ça. Le bouleversement est bien là, loin des mises en scène pleine de bravitude d’autres femmes politique. Eva Joly est un être de chair et de sang plus réel que ces monstres d’acier que la politique nous sert depuis des lustres.

Si Eva Joly pèse ses mots la plupart du temps, il existe des sujets où la femme assurée cède sa place à la femme romantique. Je veux parler de cette figure de l’amoureuse douce et vaillante, si rare à croiser au quotidien. Quand on lui demande pourquoi le droit, pourquoi la France, une seule réponse lui vient à la bouche : « j’étais amoureuse ». Voilà, c’est ça. Ce que les filles veulent. Vivre l’amour à un tel degré de plénitude que rien ne peut être trop grand pour celui-ci. Qu’importe si le reste de la vie est routinier, banal, si tout se finit dans les larmes. On aura au moins une vraie belle histoire à raconter. Et pas une histoire de princesse Peach, pas une connerie à la Blanche-Neige. Une histoire de vraie féministe, un récit à mettre dans les manuels scolaires à la page « Les filles valent autant que les garçons ». La grandeur du sexe faible à l’état brut se cache dans le corps d’Eva Joly.

De la Norvège, elle conserve un accent charmant et les valeurs d’humilité chères aux scandinaves. Pourtant, incapable de dissimuler quoi que ce soit, phobique du mensonge, la députée européenne ne mâche jamais ses mots. Elle le confesse, parfois ils lui manquent pour s’exprimer, et on assiste impuissant à des défaites cuisantes lors de débats télévisés, comme celui de Mots Croisés qui l’opposait notamment à Nadine Morano. Eva l’avoue, elle n’a pas encore travaillé avec ses conseillers les « questions difficiles ». Mais ce qui gène le plus, ce n’est pas tant les hésitations que le manque de diplomatie. Aucun agacement ne se lit su son visage et malgré cela les mots qui sortent sont durs. Quand elle veut arrêter la conférence, fatiguée d’avoir parlé pendant 1h30, elle s’exprime maladroitement. Une fois de plus pourtant, la franchise d’Eva, cette valeur essentielle et noble, si absente dans le monde politique, sublime son propos et sa personne.

Eva, elle est tout ça à la fois. Plus qu’une personnalité médiatique et politique, elle représente en réalité toutes ces valeurs que la France réclame dans un murmure collectif, elle est l’antidote aux maux du politique, elle est le symbole d’un ré-apprentissage de la confiance du peuple envers le politique. Dire que je la vois présidente serait une utopie, dire que je ne le désire pas serait un mensonge, dire que c’est la meilleure solution pour la France serait arbitraire. Alors je vais simplement terminer ainsi :  G(r)o Eva, G(r)o !


© Boops pour OmniZine - L'omni-webzine des omnivores de la culture, des sports et de la geekitude !, 2011. | Permalien | Pas de commentaire